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Rébellion de Wagner : "Cela fait voler l'idée d'une union sacrée derrière le président", analyse une spécialiste

Au lendemain d'une journée riche en tension et en rebondissements pour la Russie, la directrice du Centre d'études du monde russe François Daucé analyse au micro de franceinfo ce dimanche l'affaiblissement du Kremlin et de son chef Vladimir Poutine.
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Françoise Daucé, directrice d’études à l’EHESS et directrice du Centre d'études des mondes russe, caucasien et centre-européen, invitée du 8.30 de franceinfo dimanche 25 juin 2023. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"La rébellion de Wagner vient faire voler en éclat le mythe de l'unité de l'ensemble de la Russie derrière son président", a estimé Françoise Daucé, directrice du Centre d'études du monde russe, caucasien et centre-européen (CERCEC). Les forces du groupe paramilitaire Wagner ont commencé à quitter leurs positions en Russie dimanche 25 juin, après la volte-face de leur chef Evguéni Prigojine, qui avait défié Vladimir Poutine. Françoise Daucé considère que cette rébellion "a fait voler l'idée d'une union sacrée derrière le président en montrant au grand jour les divisions au sein même du pouvoir".

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La directrice d'études à l'EHESS voit dans cette "mutinerie une tentative d'influer sur le pouvoir à Moscou". "C'est un conflit à l'intérieur de l'élite politique et militaire", précise Françoise Daucé. Elle rappelle d'ailleurs qu'en Russie, "les relations de pouvoir sont actuellement fondées sur des liens interpersonnels". "Depuis son arrivée au pouvoir, Vladimir Poutine a fait le choix de nommer au ministère de la Défense des proches choisis pour leur loyauté, mais qui n'étaient pas des généraux de l'armée", souligne cette spécialiste de la Russie. Or, pour Françoise Daucé, "cette loyauté personnelle est remise en cause et suscite des tensions de plus en plus fortes dans l'armée". "On a le sentiment que Vladimir Poutine a joué avec le feu militaire, que l'arme a semblé se retourner contre lui", ajoute-t-elle.

Une rébellion avortée, mais à quel prix

Face à cette "surenchère militariste et nationaliste", Françoise Daucé constate que "les forces d'opposition politiques et libérales sont empêchées d'agir dans le pays, et sont pour une partie en exil". "On ne sait pas très bien quelles sont les forces à l'intérieur du pays qui pourraient venir faire contrepoids à cette dérive extrêmement inquiétante", juge-t-elle.

Françoise Daucé revient par ailleurs sur la volte-face samedi d'Evguéni Prigojine, qui s'est faite "au prix de négociations dont on ignore la teneur". Si "officiellement toutes les poursuites contre [le chef de Wagner] ont été suspendues", pour la directrice du CERCEC, "la prise de décision étant extrêmement opaque, on ne sait pas ce qui va se passer derrière". "C'est un dénouement de façade dans l'immédiat, pour calmer la situation, mais on peut penser qu'on n'en restera pas là parce qu'il y a eu une forme d'humiliation de Vladimir Poutine et du haut commandement de l'armée", note Françoise Daucé. Elle n'imagine pas vraiment que soient "réintégrés d'anciens mutins dans les rangs réguliers de l'armée russe".

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