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L'énigme des houthis dans la guerre au Yémen

Sous les frappes aériennes d’une coalition de dix pays sunnites, mise sur pied par l’Arabie saoudite, les combattants houthis poursuivent leur progression au sol. Appuyés par les partisans de l’ancien président Ali Ab, évincé en 2012 par le printemps yéménite, ils ont pris le contrôle du chef lieu de la province de Chaboua, du terminal gazier de Belhaf sur la mer d’Oman.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Combattants houthi dans la province de Saada, jouxtant la frontière saoudienne, le 4 juin 2013. (Reuters - Mohamed al-Sayaghi )

Si leur percée fulgurante, qui a réussi à mettre en échec la stratégie saoudo-américaine dans la péninsule arabique, est une énigme, elle n’est pas une surprise pour les Yéménites. Redoutables guerriers des hauts plateaux du nord comme peuvent l’être les Afghans dans leurs montagnes, ils sont issus de la communauté zaïdite, une branche de l’islam chiite, évaluée à un tiers d’une population de 27 millions en majorité sunnite de l’école chaféite (jurisprudence fondée au IX° siècle).

Hormis deux interruptions lors des occupations ottomane et britannique, leur communauté avait dominé le nord du pays durant un millénaire avant de voir le pouvoir de leur Imam renversé par la révolution républicaine en 1962

Guerres intra-communautaires
Un bouleversement qui va marginaliser cette communauté y compris après l’arrivée au pouvoir en 1978 d’Ali Abdallah Saleh, pourtant zaïdite lui aussi. Artisan de la réunification en 1990 des deux Yémen, la République arabe du Nord et de la République démocratique et populaire du Sud, et allié de la puissante confédération tribale sunnite des Hached emmenée par le parti islamiste Al Islah du clan des Al Ahmar, le président Saleh va mener plusieurs guerres contre sa propre communauté pour se maintenir au pouvoir.

En effet, sous l’impulsion de Hussein Badredine al Houthi (tué en 2004), les zaïdites, ou désormais houthis, entrent en lutte contre son pouvoir qu'ils jugent trop aligné sur la stratégie égypto-saoudo-américaine depuis le 11 septembre 2001.

Rapprochement avec l'Iran
Accusé par le pouvoir de vouloir rétablir l’imamat perdu, ils vont progressivement se rapprocher de la nouvelle résistance à l’Occident incarnée par la République islamique d’Iran et la Syrie. Ils vont même, tout en s’inspirant du modèle et des slogans du Hezbollah libanais, s’allier à des tribus sunnites dissidentes et surfer sur la révolte de 2011 qui a mis fin à trente-deux ans de règne d’Ali Abdallah Saleh.

«Mort à l'Amérique! Mort à Israël! Maudits soient les juifs!»: slogans d'inspiration iranienne sous le portrait du chef défunt Hussein Badreddine al Houthi dans la province de Saada le 4 juin 2013.  (Reuters - Mohamed al-Sayaghi)

Opportunément instrumentalisés et officiellement défendus par Téhéran au prétexte de leurs origines chiites et paradoxalement soutenus aujourd’hui par les forces restées fidèles à l’ancien président Saleh, ils ne cessent de pousser leur avantage sur le terrain. Rejetant la solution d’une fédération pour ramener le calme dans le pays, ils ont marché sur Sanaa d’où ils ont chassé le nouveau président Abed Rabo Mansour Hadi et contraint l’Arabie Saoudite à entrer en guerre. En poursuivant leur marche triomphale sur Aden, ils contraignent maintenant Washington à hausser le ton contre l’Iran.

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