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Que va faire Hollande en Israël et dans les territoires palestiniens ?

Francetv info vous explique les enjeux de cette première visite du chef de l'Etat français.

Article rédigé par Benoît Zagdoun
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
François Hollande et son homologue israélien Shimon Perez à l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv (Israël), le 17 novembre 2013. (MARCO LONGARI / AFP)

Pour François Hollande, c'est une première. Il entame, dimanche 17 novembre, son premier voyage en Israël et dans les territoires palestiniens en tant que président de la République. Il est d'ailleurs attendu "avec impatience" par le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, qui promet de dérouler le "tapis rouge" pour cet "ami proche de l'Etat d'Israël" au moment où la France affiche son intransigeance dans les négociations internationales sur le programme nucléaire iranien.

L'Elysée aussi accorde une grande importance à l'événement. Pour preuve, ce déplacement s'étale sur trois jours, ce qui en fait l'une des plus longues visites présidentielles à l'étranger. Et le chef de l'Etat est accompagné d'une demi-douzaine de ministres et de nombreux grands patrons.

Francetv info détaille les objectifs de cette visite d'Etat qui ne sera pas uniquement diplomatique. 

Afficher sa fermeté au côté d'Israël face à l'Iran

Dès sa descente d'avion à l'aéroport Ben Gourion de Tel Aviv, les premiers mots de François Hollande ont porté sur le nucléaire iranien. "La France ne cédera pas sur la prolifération nucléaire", a affirmé le chef de l'Etat, rappelant ainsi la position officielle de Paris dans ce dossier. "Tant que nous n'aurons pas la certitude que l'Iran a renoncé à l'arme nucléaire, nous maintiendrons toutes nos exigences et les sanctions", a ajouté le président.

Hollande en Israël promet de ne pas céder sur le nucléaire iranien (FRANCE 2)

Il y a une semaine, c'est le chef de la diplomatie française qui a tenu des propos similaires, lors des pourparlers de Genève. Par la voix de Laurent Fabius, la France a affiché son opposition à un projet d'accord provisoire en négociation entre l'Iran et les puissances du P5+1, dont elle fait partie avec les quatre autres membres permanents du Conseil de sécurité de l'Onu (Etats-Unis, Chine, Grande-Bretagne et Russie) et l'Allemagne.

Une approche différente mais un objectif commun. "La politique française sur ce dossier, l’attitude de Laurent Fabius, qui aurait fait capoter les négociations de Genève, est extrêmement bien perçue en Israël", analyse Charles Enderlin, le correspondant de France 2 à Jérusalem, sur son blog.

Car, même si leurs tactiques divergent, la France et Israël s'accordent pour estimer que le volet militaire de ce programme, farouchement contesté par la partie iranienne, "doit cesser", souligne l'Elysée. L'Etat hébreu, considéré comme la seule puissance atomique de la région, estime qu'un Iran disposant de l'arme atomique menacerait son existence et se dit régulièrement prêt à mener des frappes contre les installations nucléaires iraniennes.

La France nouveau meilleur allié d'Israël. Paris fait même désormais figure de meilleur allié de Tel Aviv sur le sujet. Les relations entre Israël et les Etats-Unis traversent en effet une grave crise. Benyamin Netanyahu presse les grandes puissances de ne pas accepter un accord "dangereux" avec Téhéran qui impliquerait un assouplissement des sanctions qui asphyxie l'économie iranienne. Ce que veut justement l'administration Obama.

Les négociations reprendront mercredi à Genève. Quelques heures après la fin de la visite de François Hollande en Israël.

Ménager Israéliens et Palestiniens 

Les années Chirac furent celles d'"une politique arabe", le quinquennat de Nicolas Sarkozy fut marqué par "un net réchauffement" des relations franco-israéliennes, observe Le Monde. Qu'en sera-t-il de la présidence Hollande ? Un collaborateur de ce dernier déconseille, dans Le Monde, de se livrer "au petit jeu de savoir si le chef d'Etat est pro-israélien ou pro-palestinien".

Un programme équilibré. Le locataire de l'Elysée est en effet adepte du compromis. Cela tombe bien. "Une visite en Israël et dans les territoires palestiniens est un exercice délicat d'équilibrisme diplomatique entre Israéliens et Palestiniens, où les manifestations symboliques ont une grande importance", commente le quotidien.

Démonstration avec le programme du voyage présidentiel. François Hollande s'entretiendra avec les président et Premier ministre israéliens Shimon Peres et Benjamin Netanyahu, et avec le chef de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, à Ramallah. Il se recueillera au mémorial dédié à l'ancien président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat, mort en 2004, et sur la tombe du Premier ministre israélien assassiné en 1995, Yitzhak Rabin.

Sans "surprise". "C'est une visite d'Etat solennelle, probablement la seule du quinquennat. On ne va pas jeter un pétard au milieu des discussions israélo-palestiniennes", confie l'entourage de François Hollande au Monde. "Il ne devrait pas y avoir de surprise", confirme à francetv info Charles Enderlin, le correspondant de France 2 à Jérusalem.

Lundi soir, lors de son discours à la Knesset, le parlement israélien, François Hollande ne s'autorisera donc certainement pas une prise de position forte. A l'inverse de François Mitterrand qui, en 1982, s'y était déclaré favorable à la création d'un Etat palestinien. Ou de Nicolas Sarkozy qui, en 2008, y avait plaidé pour une Jerusalem "capitale de deux peuples", rappelle le JDD

François Hollande devrait ainsi éviter les faux pas. Comme celui de l'ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin qualifiant en 2000 le Hezbollah libanais de "terroriste". Ou comme le coup de colère de Jacques Chirac s'agaçant, en 1996, de la pression des services de sécurité israéliens.

Réaffirmer la position de la France

François Hollande entend plaider la relance du processus de paix, encore fragilisée par la récente démission de la délégation palestinienne aux négociations, faute de progrès constatés. Il devrait donc "encourager" Israéliens et Palestiniens à réaliser les "compromis" et les "efforts nécessaires" pour surmonter leurs dissensions, explique-t-on à l'Elysée

Une solution à deux Etats. "La position de la France est archiconnue", explique Charles Enderlin. "Une solution à deux Etats, une Palestine viable et indépendante, avec Jérusalem-Est pour capitale, aux côtés d'Israël, vivant dans la sécurité. C'est la politique de tous les présidents français qui ont précédé François Hollande."

L'opposition à la colonisation. Quelques jours après que Benyamin Netanyahu a ordonné le gel d'un important projet de constructions en Cisjordanie, François Hollande "devrait répéter l'opposition de la France à la colonisation, lors de sa visite à Ramallah", prédit le correspondant de France 2. Une ligne politique conforme à la position de l'Union européenne.

Le soutien financier aux Palestiniens. Le chef de l'Etat devrait également réaffirmer le traditionnel soutien à la cause palestinienne. Lui, qui a soutenu l'idée d'accorder à l'Autorité palestinienne le statut d'observateur aux Nations unies, obtenu en 2012, devrait confirmer son aide financière aux territoires palestiniens.

"Mahmoud Abbas tient beaucoup à l'aide française, politique, diplomatique et économique, précise Charles Enderlin. La France participe au financement de l'Autorité palestinienne. Directement (quelque 60 millions d'euros), et dans le cadre de l'aide européenne (à hauteur de 16% des 300 millions fournis par Bruxelles). En tout, cela représente 110 millions d'euros d'aide cumulée aux Palestiniens."

Améliorer les relations commerciales avec Israël

François Hollande espère aussi resserrer les liens économiques entre la France et Israël. L'Elysée les juge "guère à la hauteur de la qualité de la relation politique".

Les échanges entre les deux pays  "ne sont pas au beau fixe", confirme Charles Enderlin. Ils ne s'élevaient qu'à 2,3 milliards d'euros en 2011. Pis, "en 2013, la France est passée de la 10e à la 11e place dans le classement des fournisseurs d'Israël. Derrière les Etats-Unis, l’Allemagne, la Suisse ou les Pays-Bas", note le correspondant de France 2. 

Une quarantaine de grands patrons comme ceux d'Alstom, d'Arianespace ou de Vinci, font donc partie de la délégation présidentielle. Le Monde croit savoir que des contrats avec Alstom, la SNCF, Orange et EDF pourraient être signés. 

Le chef de l'Etat entend aussi "rééquilibrer" ces flux économiques, poursuit Charles Enderlin. Les entreprises françaises investissent en effet 1,5 milliard d'euros en Israël, contre à peine 107 millions d'euros pour leurs homologues israéliennes en France, chiffre Le Monde. 

"Cette visite devrait surtout constituer un encouragement pour les entreprises des deux pays", tempère le journaliste de France 2. C'est l'objectif de la 2e Journée de l'innovation Israël-France, que François Hollande, Benyamin Netanyahu et le président Shimon Peres inaugureront, mardi à Tel Aviv. Car le conflit israélo-palestinien n'est pas de nature à inciter les entrepreneurs français à s'implanter en Israël.

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