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Reportage "Si tu respires, tu t'étouffes" : des Libanais dénoncent l'utilisation de phosphore blanc par l'armée israélienne

Tandis qu'Amnesty International demande l’ouverture d’une enquĂȘte pour "crime de guerre", le porte-parole de l’armĂ©e israĂ©lienne ne nie pas l’usage de ces munitions dans le sud du Liban, mais "surtout pas dans des zones de population dense".
Article rédigé par Noé PignÚde
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un obus explose au-dessus du village de Dhayra, au Liban, le 16 octobre 2023. (AFP)

Dans ce champ du village de Dhayra, le long de la frontiĂšre entre le Liban et IsraĂ«l, des Ă©clats d’obus jonchent le sol. C'est l'autre front de cette guerre dĂ©clenchĂ©e le 7 octobre par les attaques terroristes du Hamas : au nord d'IsraĂ«l, les bombardements ont Ă©tĂ© nombreux entre le Hezbollah libanais et l'armĂ©e israĂ©lienne. Ils ont dĂ©jĂ  fait plus d’une centaine de morts.

Le calme est revenu depuis le dĂ©but de la trĂȘve Ă  Gaza, permettant aux journalistes d'accĂ©der aux villages bombardĂ©s. Les habitants accusent l’armĂ©e israĂ©lienne d’avoir utilisĂ© du phosphore blanc lors de certaines attaques. Et sur plusieurs de ces Ă©clats d'obus se trouvent effectivement l'inscription "WP", les initiales anglaises de "phosphore blanc", une substance extrĂȘmement toxique, utilisĂ©e pour provoquer des Ă©crans de fumĂ©e ou des incendies.

Un Ă©clat d'obus avec l'inscription "WP" pour "phosphore blanc" en anglais. (NOE PIGNEDE / RADIO FRANCE)

"Si tu respires, tu t'étouffes immédiatement"

Oday, le propriĂ©taire des lieux, nous montre ces centaines de dĂ©bris noires qui prennent feu lorsqu’on les Ă©crase : "Ça, c’est du phosphore. C’est lĂ  depuis une quarantaine de jours, et regardez, il est toujours actif. Si tu respires, tu t’étouffes immĂ©diatement", explique-t-il. Des caractĂ©ristiques typiques de la substance chimique, d’aprĂšs plusieurs experts. Son utilisation est interdite dans les zones civiles, selon le droit international humanitaire.

Pourtant, ici, on retrouve des rĂ©sidus jusqu’à l’intĂ©rieur des maisons ravagĂ©es par les flammes. Le 16 octobre dernier, alors que son village est lourdement bombardĂ© par l’armĂ©e israĂ©lienne, Ibtissem est chez elle avec son mari.

"J’ai senti une odeur de fumĂ©e. Je lui ai dit : 'Ă©teins ta cigarette'. Mais en fait, ça venait de l’extĂ©rieur ! Il y avait des flammes devant la porte."

Ibtissem, habitante de Dhayra

Ă  franceinfo

Ibtissem raconte avoir essayé d'éteindre les flammes. "Puis, je me suis évanouie", ajoute-t-elle.

L'armée israélienne ne nie pas

Comme elle, une dizaine d’habitants sont transfĂ©rĂ©s Ă  l’hĂŽpital. Les mĂ©decins diagnostiquent tous des intoxications au phosphore blanc. Le Liban annonce qu’il va porter plainte auprĂšs des Nations unies. "Dans la mesure oĂč elle utilise une arme d'une maniĂšre qui, intrinsĂšquement, ne peut pas distinguer entre cibles civiles et militaires, parce qu'elle est explosĂ©e dans l'air au-dessus d'une zone peuplĂ©e, c'est une violation des lois de la guerre, par dĂ©finition", assure Ahmed Benchemsi, qui travaille pour l’ONG Human Rights Watch. 

Un morceau d'obus au phosphore qui se consume. (NOE PIGNEDE / RADIO FRANCE)

Amnesty International demande d’ailleurs l’ouverture d’une enquĂȘte pour "crime de guerre". Joint par tĂ©lĂ©phone, le porte-parole de l’armĂ©e israĂ©lienne, Olivier Rafowicz, ne nie pas l’usage de munitions au phosphore dans le sud du Liban : "Mais ces obus-lĂ  sont utilisĂ©s pour crĂ©er des Ă©crans de fumĂ©e et non pas pour viser, ni pour crĂ©er des Ă©lĂ©ments incendiaires, et surtout pas dans des zones de population dense, assure-t-il. Et ceci dans le cadre des exigences du droit international." L'utilisation lĂ©gale du phosphore blanc sur un thĂ©Ăątre de guerre est encadrĂ©e par le protocole III de la Convention sur certaines armes classiques. IsraĂ«l n’a jamais ratifiĂ© ce protocole. 

A la frontiÚre avec Israël, des Libanais dénoncent l'utilisation de phosphore blanc par Tsahal.. Le reportage de Noé PignÚde

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