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Liban: des attentats qui font craindre une contagion par le conflit en Syrie

Une série d’attentats dans un village libanais à majorité chrétienne, près de la frontière avec la Syrie, fait craindre au pays le péril islamiste. En l’absence de revendication, le mode opératoire s’apparente à celui des djihadistes d’Al Nosra, quant à la cible, elle rappelle les opérations menées contre les chrétiens d’Irak avant la prise de contrôle de leurs biens par l’Etat Islamique.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min

Située sur le principal axe routier reliant la ville syrienne de Qousseir à la plaine de la Bekaa libanaise, la bourgade d’Al-Qaa à majorité chrétienne a été secouée par une série d’attentats, lundi 27 juin 2016, avant le lever du soleil.

Un bilan qui aurait pu être plus lourd 
Les assaillants ont été repérés par un habitant qui prenait son souhour (petit déjeuner du Ramadan avant l’aube). «Son fils est sorti avec son fusil de chasse, il a tiré sur eux…j’ai entendu des tirs et des explosions», a raconté Fadi Bsherrawi à l’AFP parlant de son voisin.
 
Selon une source militaire, «le premier assaillant a frappé à la porte de l’une des maisons, mais devant la méfiance des habitants, il a déclenché sa ceinture explosive». Alertés par l’explosion, les gens du village ont accouru sur les lieux, à une centaine de mètres de l’église, pour porter secours et c’est à ce moment que deux autres kamikazes se sont fait exploser.
 
«Nous avons poursuivi le quatrième assaillant et tiré sur lui avant qu’il ne se fasse sauter», a indiqué de son côté Bachir Matar, le maire d’Al-Qaa. Ce qui laisse penser que le bilan de 9 morts, dont les 4 kamikazes, et une quinzaine de blessés aurait pu être beaucoup plus lourd.

Des attentats qui portent à la fois la marque d'Al-Nosra et Daech 
Si le mode opératoire de ces attentats-suicides, en série, porte la marque du Front Al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaida, leur message est plus diffus. Il rappelle que les djihadistes de Daesh avaient procédé de la même manière contre les chrétiens d’Irak. Ils terrorisaient la population par des attentats, des enlèvements et des crucifixions pour les pousser à fuir et faire main basse sur leurs maisons déclarées «biens islamiques».
 
«Ils visent Al-Qaa car ils veulent chasser les habitants du village pour en prendre le contrôle. Qaa est l’exemple du vivre ensemble et les terroristes veulent tuer tout ce que cette bourgade représente. Si les chrétiens s’en vont, le Liban-message du Pape Jean Paul II et de l’Imam Moussa Sadr cessera d’exister», a affirmé le curé du village, Elian Nasrallah, dans un témoignage à l’Orient-le-Jour.

Une réponse aux propos guerriers du Hezbollah 
Le pays des Cèdres n’en est sans doute pas là, mais la volonté de pousser la population dans «le piège de l'autodéfense» comme le souligne dans un tweet le chercheur Joseph Bahout, est là.

Quelque soit la partie derrière les attentats d'Al-Qaa il est nécessaire de se méfier des chausse-trappes dans lesquels pourraient tomber les parties appelant à l'autodéfense. Un piège est possible.#Liban


Ces attentats interviennent en tout cas deux jours après les déclarations guerrières du chef du Hezbollah, chiite pro-iranien, engagé contre les djihadistes en Syrie pour la défense du régime de Bachar al-Assad
 
Hassan Nasrallah y expliquait la stratégie du Parti de dieu comme une lutte contre le califat de Daech en Irak et en Syrie, mais aussi au Liban et en Jordanie, «qui vient de payer le prix de ses erreurs de calcul en faveur des terroristes», a-t-il dit.
 
Les attaques d’Al-Qaa ont eu lieu en effet quelques heures après la revendication par l’organisation de l’Etat islamique d’un attentat contre l’armée jordanienne. Une voiture piégée conduite par un kamikaze a explosé à un poste de garde-frontières avec la Syrie faisant 7 morts et treize blessés.

Battu à Fallouja en Irak, pris en étau à Raqqa en Syrie, Daech semble en effet multiplier les fronts pour tenter d’alléger la pression sur les djihadistes.
 
 
 
 
 

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