Au Liban, journée de mobilisation pour les premières législatives depuis le début de la crise
Malgré une crise sans précédent, le scrutin devrait maintenir le statu quo en faveur des forces politiques traditionnelles, en raison d'une loi adoptée en 2017.
C'est une première depuis le mois d'octobre 2019. Les Libanais étaient appelés aux urnes, dimanche 15 mai, pour les premières législatives depuis le début de la crise socio-économique qui agite le pays. Un important dispositif de sécurité a été déployé pour ce scrutin auquel sont appelés quelque 3,9 millions d'électeurs qui doivent renouveler les 128 membres du Parlement jusqu'à 19 heures locales. L'affluence était faible dans la plupart des régions à la mi-journée. Et les médias locaux ont fait état de coupures d'électricité dans plusieurs bureaux de vote. Les résultats sont attendus lundi.
>> Liban : des élections législatives sur fond de désarroi économique
Il s'agit d'un premier test pour les candidats indépendants et groupes d'opposition qui ont émergé après le soulèvement populaire, accusés de corruption et d'incompétence. Le scrutin devrait pourtant maintenir le statu quo en faveur des forces politiques traditionnelles. Les élections se tiennent conformément à une loi adoptée en 2017, à l'avantage des partis au pouvoir, et en l'absence du principal leader sunnite, Saad Hariri, qui les boycotte.
Les législatives de 2018 avaient été dominées par le puissant Hezbollah chiite pro-iranien et ses alliés, notamment le Courant patriotique libre (CPL) du président Michel Aoun et le mouvement chiite Amal, du président du Parlement, Nabih Berri. Une grande partie des candidats, parmi les partis traditionnels et les indépendants, ont cette fois mené leur campagne avec des slogans "souverainistes", accusant le Hezbollah de servir les intérêts de l'Iran et de maintenir son emprise sur le Liban grâce à un important arsenal militaire.
Le taux de chômage a triplé en deux ans
Dans les régions où le Hezbollah est fortement présent, le déroulement du scrutin a été émaillé d'incidents entre partisans de formations rivales. Selon l'Association libanaise pour la démocratie des élections (Lade), chargée de la supervision du scrutin, plusieurs de ses membres ont été agressés dans des bureaux de vote, certains dans la Bekaa, bastion du Hezbollah. Dans la même région, le parti chrétien des forces libanaises, fermement opposé aux armes du parti chiite, a annoncé que plusieurs de ses délégués ont été frappés et chassés de bureaux de vote.
Causée par des décennies de mauvaise gestion et de corruption, la crise sociale et économique au Liban a été classée par la Banque mondiale comme la pire au monde depuis 1850. En près de deux ans, la monnaie nationale a perdu plus de 90% de sa valeur sur le marché noir et le taux de chômage a presque triplé. Et selon l'ONU, près de 80% de la population vit désormais en dessous du seuil de pauvreté.
Malgré la colère populaire, la classe politique profite de l'absence de l'Etat, désormais incapable de fournir les services de base, pour activer ses réseaux de clientélisme communautaire traditionnel qui reposent sur des aides financières. Comme le résume le chercheur Sam Heller dans un article publié par le groupe de réflexion américain The Century Foundation (en anglais) : "Paradoxalement, les premières élections nationales au Liban depuis le début de la crise semblent peu susceptibles de faire une grande différence."
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