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"Maintenant nous sommes mis à l’écart" : en Israël, la minorité druze se sent mise au ban par la loi sur "l'État-nation juif"

Jugée discriminatoire par l'opposition, la loi qui définit Israël comme "l'État nation du peuple juif" est vivement critiquée par la minorité druze. Ni juive, ni arabe, elle représente seulement 2% de la population, mais est pourtant un allié historique du pays.

Article rédigé par franceinfo - Marie Semelin
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des Druzes sur les hauteurs du Golan, annexées par les Israéliens, regardent la province de Quneitra, dans le sud-ouest de la Syrie, de l'autre côté de la frontière, le 7 juillet 2018. (JALAA MAREY / AFP)

En Israël, la loi qui définit le pays comme "l'État nation du peuple juif", fait toujours polémique. À l’entrée du cimetière militaire de la plus grande ville druze, Daliat el-Carmel, dans le nord du pays, un mot a été accroché par des juifs israéliens. "Pardon pour cette loi", est-il écrit, "nous savons ce que vous faites pour le pays". Un message réconfortant pour Ameer, qui était soldat durant la seconde intifada, car beaucoup de gens de son village sont enterrés ici.

Les Druzes donnent tout autant à ce pays que les Juifs.

Ameer
habitant de Daliat el-Carmel

à franceinfo

Cette loi sur "l'État-nation juif" est jugée discriminatoire par l'opposition qui a demandé au Parlement de débattre, mercredi 8 août, de ces "atteintes aux valeurs de démocratie et d'égalité". Dans le pays, c'est la minorité druze, peu connue, ni juive, ni arabe, qui est devenue le visage de cette contestation, avec une importante manifestation le week-end dernier. Cette minorité représente seulement 2% de la population et pratique un islam hétérodoxe.

Les Druzes sont des alliés historiques pour Israël. Ils font le service militaire, mais aujourd'hui, ils se sentent trahis. "Avant on le ressentait un peu, mais après ce que Netanyahou a fait, on le ressent à 100%. On est des citoyens de second zone", se désole Ameer. "Je vais vous dire quelque chose, si un Palestinien attrape un Juif et un Druze, il tuera le Druze. Il ne tuera pas le Juif, parce qu’ils nous haïssent car on parle arabe", rapporte l'habitant de Daliat el-Carmel.

Le combat des Druzes au Parlement

Le parlement compte aujourd'hui quatre députés druzes. Amal Nasser el-Din a été l’un des premiers d’entre-eux. Il s'est engagé au côté du Likoud, le parti du Premier ministre, Benyamin Netanyahou. L'élu "voudrait une loi qui protège les Druzes parce qu'ils étaient aux côtés des Juifs avant même la création de l’État d’Israël". Le membre du parti au pouvoir "soutient tout à fait des lois qui renforce le caractère juif de l’État, c'est leur droit". Toutefois, il a une demande : "Il faut que la loi nous protège, car maintenant nous sommes mis à l’écart."

D’après la tradition druze, la loyauté envers l’État où vit la communauté est un précepte à suivre. Mais, des chercheurs israéliens pointent depuis plusieurs années le nombre grandissant de Druzes refusant de servir dans l'armée, car ils s'identifient aux Palestiniens et non aux Israéliens. "Nous sommes les natifs. Mon père, mon grand-père, son père, nous étions là bien avant l’établissement d’Israël", défend Maisan Hamdan, qui a créé une organisation qui soutient cette vision. "Et maintenant nous sommes des invités ? À un moment donné ils nous diront : "Allez-vous en, ce n’est pas votre terre. Et, ce sera légal", poursuit la jeune femme.

Le Premier ministre Benyamin Netanyahou a établi un comité ministériel pour trouver une sortie à cette crise, mais les leaders de la communauté druze le refusent. Ces derniers continuent de demander l’amendement de la loi pour qu’elle contienne le mot "égalité".

Les Druzes, des alliés historiques pour Israël, se sentent discriminés - reportage de Marie Semelin

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