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Gaza : "Le but du Hamas est d'aller jusqu'au bout"

A plusieurs reprises depuis le début du conflit, des tirs de roquettes ont interrompu les cessez-le-feu, pourtant validés par le Hamas. L'organisation contrôle-t-elle réellement toute la bande de Gaza ? 

Article rédigé par Tatiana Lissitzky - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min

Après trois jours de trêve, les combats ont repris entre le Hamas et Israël. L'organisation islamiste a annoncé, vendredi 8 août, au Caire (Egypte), qu'elle ne prolongerait pas le cessez-le-feu en vigueur dans la bande de Gaza, parce qu'Israël refuse d'accéder à ses demandes. Le Hamas exige au minimum l’ouverture d’un port sur la Méditerranée, à défaut d’obtenir dans l’immédiat la levée du blocus qui asphyxie l'enclave depuis sept ans et la construction d’un aéroport international.

Déjà, dans la nuit de jeudi à vendredi, 33 roquettes avaient été tirées depuis la bande de Gaza vers Israël, selon l'armée israélienne. En réponse, l'Etat hébreu a lancé de nouvelles opérations dans la matinée. Mais le Hamas a rejeté la responsabilité des tirs, qui ont finalement été revendiqués par le Jihad islamique. Ces tirs de roquettes posent la question des dissensions qui peuvent exister entre le Hamas et les autres factions palestiniennes, mais aussi au sein du Hamas lui-même.

Francetv info a interrogé à ce sujet Mohamed-Ali Adraoui, docteur en sciences politiques, chercheur à l'Institut universitaire européen de Florence et auteur de Du Golfe aux banlieues : le salafisme mondialisé.

Francetv info : Existe-t-il des dissensions au sein du Hamas ? 

Mohamed-Ali Adraoui : En réalité, des dissensions existent à tous les niveaux. Entre la branche armée et le bureau politique, dans la branche armée elle-même, mais aussi entre les générations. Car la situation à Gaza n'est pas la même qu'il y a dix ans. Mais il existe aussi des désaccords entre le Hamas intérieur et extérieur, c'est-à-dire entre ceux qui se sont exilés, comme Khaled Mechaal (le chef du bureau politique), et ceux qui sont restés à Gaza. Et ces divergences entre les différents courants peuvent rendre la politique du Hamas peu lisible.

En temps normal, les décisions du mouvement sont débattues et prises par consensus au sein de trois instances : le Majlis Al-Choura, le conseil consultatif, qui prend les décisions stratégiques, le bureau politique, dirigé par Khaled Mechaal en exil au Qatar, et la branche militaire, les brigades Ezzedine Al-Qassam, dirigées par Mohammed Deif.

Le Hamas a rejeté la responsabilité des tirs de la nuit, et c'est le Jihad islamique qui les a revendiqués. Les deux groupes s'accordent-ils sur leurs actions ? 

Il y a effectivement un dialogue entre les différentes factions palestiniennes, notamment concernant les trêves. Pour qu'une trêve soit négociée, il y a des discussions entre le Hamas et Israël, mais aussi entre le Hamas et les autres factions ainsi qu'au sein du Hamas lui-même. Et parfois, plutôt qu'un acte prémédité, le tir d'une roquette peut aussi être le fait d'une unité locale isolée.

Le Hamas a été élu démocratiquement et a la capacité d'influer sur le Jihad islamique. Mais il combat aussi d'autres groupes, comme le courant salafiste, proche des salafistes irakiens ou syriens. Israël préfère de loin négocier avec le Hamas, car il est le moins mauvais des interlocuteurs possibles. 

Quelle est la stratégie du Hamas désormais ? 

Le raisonnement du Hamas est simple : après un mois de guerre, des milliers de morts et de blessés, des centaines de milliers de déplacés, des milliards de dollars de destructions, autant aller jusqu'au bout. C'est plutôt rationnel. Les médias ont les yeux rivés sur Gaza, les grands de ce monde se sont exprimés et une inflexion semble se dessiner au niveau international.

Malgré toutes les souffrances endurées par les Gazaouis, le Hamas a gardé leur soutien. Par les négociations en Egypte et en maintenant un certain niveau de violence avec les tirs de roquettes, les factions palestiniennes pensent réellement pouvoir améliorer le sort des habitants. Le but final est d'arracher à Israël un compromis qui améliorerait les conditions de vie des Gazaouis en allégeant le blocus. Par exemple, en agrandissant la zone de pêche (qui est le principal revenu de la bande de Gaza).

Le Hamas cherche aussi à obtenir l'aide de la communauté internationale. Car la situation est dramatique. Un enfant sur deux à Gaza souffre de malnutrition et 80% de la population dépend de l'aide internationale pour la nourriture. Maintenant, la question est de savoir si nous nous dirigeons vers un regain de tension.  

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