Conflit Israël-Hamas : les incursions ciblées dans la bande de Gaza visent "à tester la défense du Hamas", explique un ancien militaire
Les incursions ciblées dans la bande de Gaza mener par l'armée israélienne visent "à tester la défense du Hamas et l'obliger à ouvrir le feu", a expliqué vendredi 27 octobre sur franceinfo Michel Goya, ancien colonel des troupes de Marine, historien militaire. Tsahal a mené une nouvelle incursion au sol vendredi. Pour l'ancien militaire, il s'agit d'"une phase préparatoire à une opération terrestre de conquête du territoire de Gaza de plus grande ampleur", a-t-il assuré. Mais "les Israéliens ne peuvent pas mener des guerres très longues", sans "mobiliser les réservistes", a souligné Michel Goya. Le temps joue contre Israël, selon lui. "À un moment donné, très certainement, il faudra une opération de conquête", a-t-il expliqué.
franceinfo : Comment interprétez-vous ces incursions ciblées de l'armée israéliennes dans la bande de Gaza ?
Michel Goya : Ils ont réorganisé toutes leurs armées en groupements tactiques. Une vingtaine de véhicules blindés à chaque fois, avec un dosage de véhicules du génie avec des véhicules d'infanterie blindés, deux chars Merkava. Vous en avez à peu près 80 le long de la bande de Gaza. Et avec ça, pour l'instant, ils effectuent des raids. Ce sont des entrées et des sorties qui visent à la fois à préparer un peu le terrain, à ouvrir des voies de passage et éventuellement déminer pour pouvoir attaquer plus facilement par la suite. Mais surtout pour tester la défense du Hamas et l'obliger à ouvrir le feu sur eux. Et puis riposter et détruire autant que possible tous les défenseurs qui sont identifiés par des tirs à distance, ça use l'adversaire, ça aguerrit les troupes israéliennes.
Ça permet aussi d'éviter des pertes ?
Ce sont des opérations sans grand risque. Les troupes israéliennes sont les troupes les mieux protégées et les plus blindées au monde. Vous avez des véhicules qui dépassent tous la cinquantaine ou la soixantaine de tonnes. Les véhicules d'infanterie sont aussi très protégés. En gros, ils ne risquent pas grand-chose, même s'il y a déjà eu déjà des pertes en réalité. Mais d'un autre côté, ce n'est pas ces opérations qui seront décisives.
Ce n'est pas cette stratégie qui va permettre de détruire le Hamas ?
Le Hamas a une double face. C'est à la fois une organisation armée, mais c'est aussi un État. S'il faut détruire le Hamas en tant qu'État et en tant que force armée, il n'y a pas d'autres solutions que d'aller à l'intérieur de Gaza, de conquérir toute la bande de Gaza. Puis à l'intérieur, y détruire autant que possible tout ce que l'on peut du Hamas.
Les otages, c'est l'arme absolue pour le Hamas ?
C'est une arme très importante. C'est pour cela qu'ils ont été capturés, pour servir de monnaie d'échange, d'instrument de pression. Ils ont permis de créer un groupe de pression avec des familles, avec même les pays étrangers parce qu'il y a énormément d'étrangers parmi ces otages. C'est un atout évidemment dans la main du Hamas qui pourrait éventuellement s'en servir pour peut-être monnayer un cessez-le-feu, mais ce qui aboutirait d'une certaine façon à une victoire.
Est-ce que ces incursions ciblées de l'armée israélienne peuvent permettre de libérer des otages ?
Non, ce n'est pas assez précis pour avoir des informations sur les otages qui, de toute façon, sont à l'intérieur de Gaza, sans doute pour la plupart déjà sous Gaza dans les tunnels. Ce n'est pas ces opérations qui permettent de localiser des otages. Ça se fait par d'autres moyens de renseignement électronique éventuellement. Ce n'est pas le but en tout cas de ces raids.
Ces incursions pontuelles peuvent-elles durer longtemps ?
Il y a une donnée fondamentale de toutes les guerres israéliennes, c'est que les Israéliens ne peuvent pas mener des guerres très longues. Pour faire des opérations de très grande échelle, de très grande intensité, il faut mobiliser les réservistes, même si ce ne sont pas eux qui seront forcément engagés en première ligne à Gaza. Mais on en a besoin pour peut-être tenir les autres fronts en Cisjordanie. Le problème, c'est que quand vous mobilisez des réservistes, vous paralysez la vie de la société. Il n'est pas possible de faire des guerres de plusieurs mois. La dernière guerre contre la Hamas en 2014 a duré 50 jours. C'était même un record depuis 1948. Il y a un problème de durée, incontestablement. À un moment donné, très certainement, il faudra une opération de conquête qui peut durer quelques jours ou quelques semaines, suivie ensuite peut-être d'une opération de nettoyage qui, elle, peut durer très longtemps. On est encore dans une phase préparatoire à une opération terrestre de conquête du territoire de Gaza de plus grande ampleur.
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