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Cessez-le feu entre Israël et le Hamas : "Jérusalem-Est reste un baril de poudre prêt à exploser à tout moment", redoute un journaliste palestinien

Kassam Muadi estime cependant que "les factions palestiniennes et Israël ont intérêt à le respecter". 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Des Palestiniens à Ramallah, le 21 mai 2021.  (ABBAS MOMANI / AFP)

Kassam Muadi, journaliste palestinien basé à Ramallah en Cisjordanie, estime vendredi 21 mai sur franceinfo que "cela va recommencer" malgré l’annonce d’un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas après 11 jours de conflit sanglant. "Jérusalem-Est est un baril de poudre qui est prêt à exploser à tout moment", dit-il.

franceinfo : Comment est l’ambiance ce matin à Ramallah ?

Kassam Muadi : À Ramallah comme dans tous les Territoires palestiniens, la nuit a été assez chargée parce que les Palestiniens ont observé de près l'entrée en vigueur de ce cessez-le-feu. Et puis, c'était les célébrations un peu partout en Cisjordanie, à Hébron, à Bethléem, à Naplouse, à Ramallah. Des centaines de Palestiniens, même dans les villages, étaient dans la rue, avec des feux d'artifice, des klaxons. À Gaza aussi. Les Palestiniens prennent cela comme une sorte de victoire.

Le Hamas sort-il gagnant de cet affrontement ?

On parle toujours du Hamas, mais en fait, les Palestiniens ne voient pas les choses comme ça. Sur le terrain, il y a tout une mosaïque politique et militaire. Il y a près de 12 factions palestiniennes idéologiquement très diverses et différentes qui ont coopéré ensemble dans une chambre d'opérations communes. Mais c'est vrai que dans le discours israélien, on veut mettre l'accent sur Hamas parce que, comme c’est islamiste, ça fait bien pour la propagande.

À votre avis, le Hamas va-t-il respecter cette trêve ?

Les factions palestiniennes ont intérêt à le respecter et je pense Israël aussi. Les deux côtés ont été assez fatigués pendant ces 11 jours. Bien sûr, les pertes humaines sont plus lourdes du côté Palestiniens. À Gaza, 232 morts, dont 65 sont des enfants. En 2014, sur 2 500 personnes mortes, 500 à 600 étaient des enfants. Il faut savoir qu'à Gaza, il y a un million d'enfants et la moitié de la population a moins de 18 ans. Même s'il y a un cessez-le-feu à Gaza, cela ne veut pas dire que les tensions qui ont commencé il y a deux semaines vont se terminer. Cela n'a pas commencé à Gaza. Cela a commencé à Jérusalem et ensuite en Cisjordanie. En Cisjordanie, 28 Palestiniens sont morts dans les affrontements entre des Palestiniens qui protestaient et les forces d'occupation israélienne. Et même à l'intérieur d'Israël. C’est sans précédent.

Ces violences à l’intérieur de villes israéliennes, c’est une étape supplémentaire dans le cycle de violence ?

Il y a un mouvement citoyen palestinien qui a traversé la ligne verte. On n'a pas vu cela depuis des décennies. C'est le changement le plus important qui a été introduit dans ces nouvelles violences. Il y a deux jours seulement, le 18 mai, depuis Haïfa, ville mixte à l'intérieur d'Israël, les Palestiniens ont annoncé une grève générale. Et puis, elle s'est étendue sur tout le territoire, entre le fleuve et la mer. Les Palestiniens sentent cela comme la vraie victoire, plutôt que le cessez-feu à Gaza.

Tout a commencé avec les expulsions de Palestiniens à Sheikh Jarrah dans un quartier de Jérusalem-Est. Pensez-vous que l'incendie est éteint à Jérusalem ?

Non, pas du tout. Le timing n'a rien à voir avec des décisions politiques. C'est juste que les rendez-vous judiciaires se passaient au même moment que le ramadan. Coïncidence, la célébration, selon le calendrier hébraïque, de l'occupation de Jérusalem-Est qui pour les Israéliens religieux est une occasion annuelle importante, se passait au même moment. Tout est arrivé au même moment pour faire exploser les choses. Mais sous la pression, le procureur israélien a demandé de décaler l'appel par rapport à l’éviction de ces quinze familles samedi. Mais cela va recommencer. Ce n'est pas un cas unique. À Jérusalem, il y a des centaines de familles menacées d'éviction, de révocation de leur droit de résidence, de démolition de leurs propriétés. Cela se passe de façon systématique. Jérusalem-Est est un baril de poudre qui est prêt à exploser à tout moment.

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