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Paris, la ville la plus chère du monde ? On vous décrypte l'étude de "The Economist"

La capitale française est au sommet du podium des villes les plus chères du Globe, avec Singapour et Hong Kong, selon le cabinet de conseil britannique The Economist Intelligence Unit (EIU). Une première depuis trente ans.

Article rédigé par Aliénor Vinçotte
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Vue aerienne de Paris, en 2010. (PIERRE NEVEUX / RADIO FRANCE)

Un nouveau titre pour Paris. La capitale française est classée ex aequo avec Singapour et Hong Kong en tête des métropoles les plus chères du monde, dans une enquête publiée mardi 19 mars par le journal britannique The Economist (article en anglais)C'est "la première fois en trente ans d'enquêtes que trois métropoles partagent le titre de ville la plus chère du monde", écrivent les auteurs de l'étude. 

Mais comment est réalisée la comparaison ? Que dit-elle réellement sur les villes comparées ? Et les résultats sont-ils fiables ou faut-il les nuancer ? Franceinfo vous explique en trois points ce qu'il faut retenir de cette publication.

Comment est réalisé ce classement ? 

Le classement est élaboré par The Economist Intelligence Unit, un cabinet de conseil appartenant au même groupe que l'hebdomadaire britannique The Economist

Pour comparer les villes entre elles, ce cabinet a mis au point l'indice WCOL, pour Worldwide cost of living (coût de la vie mondial, en français). Il permet de mesurer les prix de 160 produits et services dans 133 villes situées dans 93 pays. Sont pris en compte les tarifs de l'alimentation, de l'habillement, des services à la personne, des loyers, des transports et des loisirs. Les prix sont convertis en dollars, au taux de change en vigueur au moment du relevé, et sont pondérés de la même manière pour tous les pays.

A la base, cet indice s'adresse aux entreprises qui envoient leurs salariés à l'étranger, afin de mesurer le coût que représente leur expatriation et pouvoir, le cas échéant, le compenser par une prime ou des avantages. L'étude est réalisée deux fois par an, en mars et en septembre, indique le site internet du WCOL

Au niveau méthodologique, le WCOL se base toujours sur la ville de New York comme indice de référence, avec un score fixe de 100. Ainsi, si le score d'une ville est de 120, cela indique que les prix y sont 20% plus élevés qu'à New York. Un outil (en accès payant) permet aussi de comparer plusieurs villes entre elles. 

Qu'indique le classement 2019 ? 

Le classement publié mardi par The Economist indique donc que Paris prend la tête du classement, à égalité avec Singapour et Hong Kong. Toutes trois ont un indice de 107. Les prix y sont donc 7% plus chers qu'à New York. Selon les auteurs de l'étude, il s'agit d'une "exception" par rapport aux autres villes de la zone euro. Après ce trio de tête, on trouve Zurich (106), Genève et Osaka (101), Séoul, Copenhague et New York (100). 

La capitale française, qui fait partie du top 10 depuis 2003, est néanmoins plus attractive que d'autres concernant "les transports, l'alcool et le tabac", note l'étude. Ainsi, le prix moyen d'une bouteille de 33 cl de bière est de 2,10 dollars dans la capitale française, contre 2,37 à Singapour, 3,25 à Zurich ou 3,33 à New York. En revanche, le prix moyen d'une coupe de cheveux pour une femme relevé par l'étude, est de 104 euros (contre 82 euros il y a dix ans), alors qu'il est de 65 euros à Zurich (Suisse) et de 47 euros à Osaka (Japon). "Ce prix comprend la coupe de cheveux, le brushing et la coiffure dans un salon de qualité, et ça inclut aussi d'éventuels conseils à la cliente", détaille auprès du Parisien Roxana Slavcheva, auteure de l'étude. 

En bas du classement, Caracas, avec un indice de 15, et Damas, avec un indice de 25, sont les villes les moins chères parmi les 133 testées. Les auteurs de l'étude expliquent que l'instabilité politique et économique du Venezuela et de la Syrie ont eu un fort impact ces dernières années sur leur capitale. Ces deux pays souffrent, en outre, d'un taux de change très défavorable. 

Du côté des mouvements, on peut noter la forte baisse d'Ankara (Turquie) et de Buenos Aires, qui perdent chacune 48 places et se classent dorénavant 120e et 125e, ou des villes brésiliennes Sao Paulo et Rio de Janeiro, qui baissent de 30 et 26 places, pour s'installer aux 107e et 108e rangs du classement. Des baisses qui sont principalement dues à l'affaiblissement des monnaies des pays concernés. 

Ce classement est-il fiable ? En existe-t-il d'autres ?

"Construire un indice consiste à faire des choix d'indicateurs, à les pondérer... rappelle auprès de franceinfo Patrick Duchen, directeur d'études et de recherches au Crédoc. Deux indices différents donneront souvent des résultats différents." Pour le chercheur, ce qui important à retenir, c'est qu'une mesure, "aussi imparfaite soit-elle", peut traduire dans la durée des évolutions. Paris "est remonté dans le classement, c'est cela qu'il faut noter et en analyser les causes, c'est-à-dire une progression plus rapide des prix immobiliers et des loisirs par rapport aux revenus", explique-t-il.

Concernant l'indice WCOL, l'économiste estime que "l'indice semble bien construit et assez complet", mais il souligne également que si les rubriques santé et éducation sont bien évoquées, "les aspects liés au coût de ces deux postes ne sont pas comptabilisés". "Ce qui est un manque car, selon les pays, c'est très différent – notamment en France où ils sont particulièrement bas", rappelle l'économiste. 

Par ailleurs, rappelle Le Parisien, ce classement s'adresse principalement à des cadres supérieurs. Il est basé sur des produits et services consommés par ceux-ci, souvent de haut de gamme. L'indice ne reflète donc pas forcément le coût de la vie pour d'autres catégories de population. La coupe de cheveux à 104 euros retenue pour Paris n'est pas forcément représentative des tarifs pratiqués dans tous les salons de coiffure de la capitale. 

Enfin, d'autres organismes publient régulièrement leur propre classement sur le coût de la vie, avec d'autres indicateurs. C'est le cas, par exemple, du cabinet Mercer, pour qui la capitale française n'atteint même pas le top 10. Dans le palmarès 2018, qui porte sur 375 villes, Paris se classait 34e, en hausse de 28 places sur un an. Principale explication de cette progression : le taux de change de l'euro face au dollar. 

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