Vœux d'Emmanuel Macron : "déterminé", "indécent", "cynique", tour d'horizon des réactions politiques

Emmanuel Macron a adressé ses vœux aux Français pour 2024 dans une allocution diffusée dimanche à 20 heures. Les réactions politiques de tous bords se multiplient.
Article rédigé par franceinfo
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Capture d'écran des voeux d'Emmanuel Macron, le 31 décembre 2023. (SEBASTIEN BOZON / AFP)

Le président de la République a présenté, dimanche 31 décembre, ses vœux aux Français pour l'année 2024. Une "année de la détermination, de l'efficacité et des résultats" a-t-il promis dans un discours de 13 minutes prononcé depuis les jardins de l'Elysée. Il a été question d'Europe, de Jeux Olympiques, de réforme des retraites ou encore de "réarmement économique." À peine l'allocution d'Emmanuel Macron terminée, les réactions se sont enchaînées, notamment sur les réseaux sociaux.

"Ces vœux sont symptomatiques de la façon dont Emmanuel Macron aborde la politique, c'est-à-dire une absence de lucidité totale sur la réalité du pays", estime Alexis Corbière, député LFI de Seine-Saint-Denis invité sur franceinfo après l'allocution du président de la République. Pour Alexis Corbière, l'année 2023 a été une "année de brutalisation sociale, démocratique et même sur les questions écologiques".

"Mensonges", "creux", "impuissance"

Emmanuel Macron s'est "noyé dans ses mensonges" en "inventant un pays sans chômage, crise du pouvoir d'achat et violence endémique", réagit Jean-Philippe Tanguy, député RN de la Somme, invité sur franceinfo. "Je ne dis pas qu'il ne faut pas avoir une vision enthousiaste de l'avenir" poursuit-il, "mais être autant déconnecté et hors-sol c'est très préoccupant". Le député de la Somme craint que ces vœux "confirment" que le chef de l'Etat “ne fera rien pour les difficultés de pouvoir d'achat et de salaires” auxquels sont confrontés les Français. En évoquant un "choix décisif" entre "continuer l’Europe ou la bloquer" lors de ses vœux, Emmanuel Macron est "sorti de son rôle de président" affirme Jean-Philippe Tanguy. Il accuse le chef de l’Etat d’avoir utilisé "les moyens matériels de l'Elysée et un moment de rassemblement de la nation" pour faire de la "politique politicienne".

"Il nous a habitués à un marketing politique, mais celui-ci sonne de plus en plus creux", estime le député LR Fabien Di Filippo, sur franceinfo. Selon le député de Moselle, le président a affiché "un optimisme béat" en contradiction avec "la situation réelle du pays". "Nous ne pouvons pas être satisfaits d'un discours qui passe à côté des vrais enjeux", selon lui. "Il y a une volonté de masquer une forme d'impuissance et de responsabilité dans la situation actuelle", a-t-il terminé. 

"Bel hommage", "déterminé", "constant"

Le député Renaissance de l'Hérault, Patrick Vignal salue sur franceinfo un "discours qui correspondait à l'année 2023." "J'ai trouvé un président qui fixait un cap déterminé", a-t-il ajouté. "On ne peut pas reprocher au président d'être quelqu'un de déterminé", avant de conclure : "J'ai aimé le discours du président, j'attends maintenant une concrétisation."

La ministre de la Culture, Rima Abdul Malak souligne sur X "un bel hommage (...) aux artisans, compagnons et entrepreneurs qui œuvrent sur le magnifique chantier de Notre-Dame de Paris. Oui, c'est une véritable fierté française."

Soutien également du ministre de l'Education nationale : "Emmanuel Macron déterminé et constant", souligne Gabriel Attal.

Emmanuel Macron a été "dans son rôle de président de la République", salue lundi 1er janvier sur franceinfo Benjamin Haddad, député Renaissance de Paris. Benjamin Haddad a vu dans cette allocution télévisée l'image d'un chef de l'État "fidèle à lui-même", "c'est-à-dire déterminé, combatif et traçant le bilan de [son] action jusqu'ici".

Benjamin Haddad évoque notamment le bilan économique du gouvernement avec "le chômage le plus faible en 40 ans, la réindustrialisation du pays". Il mentionne également le "réarmement du régalien, avec des augmentations historiques des budgets dans la défense, la sécurité ou encore la justice"

Le député Renaissance se montre par ailleurs satisfait d'avoir entendu un président "traçant des perspectives pour les prochaines années". "Continuer à agir pour aller vers le plein emploi et réformer notre pays ; continuer à investir dans les technologies d'avenir, dans la transition écologique, continuer à assurer l'autorité du pays, notamment un investissement important dans l'éducation", liste Benjamin Haddad.

"Malédictions", "autosatisfaction", "grandiloquence"

"Le président vit manifestement dans une autre dimension", estime sur X le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, après les vœux d'Emmanuel Macron. "Prétendre bâtir une France 'plus juste' en imposant la réforme des retraites et en restant les ballants face à l'inflation...", ajoute-t-il.

"On comptait sur des vœux, on reçoit des malédictions", dénonce Jean-Luc Mélenchon. "Il dit : plus et plus vite ! Nos vœux : pas ça ! Une autre France est possible", ajoute l'ancien candidat insoumis à l'élection présidentielle.

Pour Thomas Portes, député LFI de Seine-Saint-Denis, Emmanuel Macron "continue son mépris en se félicitant de l’adoption de la réforme des retraites. Une réforme adoptée contre l’avis des Français". Le membre de la commission des lois dénonce aussi le "cynisme" du président de la République qui "évoque la difficulté de se loger."

Mathilde Panot dénonce "un numéro d’autosatisfaction d’une indécence inédite."  Le président, dit-elle, "se réjouit d’avoir cassé nos droits à la retraite, au chômage, d’une loi immigration qui reprend le programme de Le Pen et d’avoir appauvri toujours plus le peuple de France." Avant de conclure : "Maudit soit le monde de Macron, un autre naîtra."

"Vœux délibérément trompeurs du Président de la République", estime à son tour Eric Ciotti, président des Républicains. "Après avoir pris du retard à peu près sur tout depuis 2017, il fallait oser dire que l’on aurait dix ans d’avance en 2027 !", termine-t-il.

Echo similaire de Marine Le Pen qui poste sur X : "À l’image d’un drapeau français perdu dans un décor sans âme, E. Macron se noie dans ses mensonges, inventant un pays sans crise du pouvoir d’achat ou sans violence. Il ne voit et n’entend rien des difficultés des Français. Conclusion : il ne fera rien. Vivement le 9 juin !"

Il y a "beaucoup de désinvolture", fustige lundi 1er janvier sur franceinfo Sébastien Chenu, vice-président du Rassemblement national et ce, "que ce soit sur la forme ou sur le fond". Il déplore tout d'abord une "mise en scène désinvolte", notamment par la présence d'une "foultitude de drapeaux dans lesquels flottait vaguement le drapeau français". "Lorsqu'on est président de la République, la France n'est pas un pays parmi d'autres, n'est pas un drapeau parmi d'autres", insiste Sébastien Chenu.

Sur le fond, Sébastien Chenu dénonce une "désinvolture vis-à-vis des problématiques auxquelles sont confrontés les Français", et de citer "le chômage, l'insécurité, l'inflation, la productivité".

Des sujets ont été "minimisés", "éludés" ou "survolés"

Le vice-président du Rassemblement national s'insurge aussi sur l'absence de certains sujets : "Pas un mot sur les agents des services publics qui bossent depuis hier et aujourd'hui, jour férié, pas un mot sur Dominique Bernard", ce professeur tué à Arras en octobre dernier. D'autre part, Emmanuel Macron se "perd dans les mots", "dans un blabla". "Quand il nous parle de détermination, d'efficacité, de résultats", énumère Sébastien Chenu, "il ne nous dit pas comment", "il ne nous dit pas vers quels objectifs il nous emmène".

"13 minutes où la grandiloquence du verbe cherche à masquer l'absence de perspectives", dénonce de son côté le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure. "L'autorité a remplacé la justice, le verbe 'agir' ne sert qu'à éroder les droits des Français, tandis que le réarmement n'est qu'un boniment quand nos services publics sont abandonnés", écrit-il. "Changeons !"

Emmanuel Macron "est presque dans un déni de la réalité", dénonce lundi 1er janvier au micro de France Inter la députée écologiste de Paris, Sandrine Rousseau, après les vœux d'Emmanuel Macron aux Français. Elle assure que le président de la République "ne comprend pas la France, les crises et les fractures françaises".

"Il n'entend pas que c'est lui qui divise la France de loi en loi"

Sandrine Rousseau, députée écologiste

à France Inter

Pour Sandrine Rousseau, l'allocution télévisée du chef de l'État était faite de "mots assez creux et d'annonces déjà faites". "Il annonce par exemple la sortie du charbon en 2027, alors qu'il l'avait déjà fait lors de son premier quinquennat, et ça n'avait pas été réalisé", déplore l'élue écologiste. 

Dans ses vœux, Emmanuel Macron a notamment promis que "2024 sera un millésime français". Des mots que critique Sandrine Rousseau, affirmant que "ça ne veut rien dire". "On a l'impression de quelqu'un qui dirige presque un CA d'entreprise, mais pas un pays", fustige-t-elle.

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