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Le sultanat d’Oman, entre répression et succession

En février et mars 2011, l’émirat d’Oman a été secoué par un mouvement de protestation qui a pris la forme de manifestations dans les grandes villes du pays ou de revendications sur les réseaux sociaux. Trois ans et demi plus tard, de jeunes militants ou blogueurs continuent à être poursuivis pour insulte à l’encontre du sultan Qabous, sur le trône depuis 42 ans.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Le sultan d'Oman, Qabous Bin Saïd, lors d'un défilé militaire le 29 novembre 2010. (AFP - Mohammed Mahjoub)

L'organisation Reporters sans frontières (RSF) s'est félicitée le 18 août 2014 de la libération à Oman de deux blogueurs, Mouawiyah Al-Rawahi et Noah Al-Saadi, après près d'un mois de détention «arbitraire» pour avoir critiqué le régime. Les autorités omanaises devraient «mettre un terme à ces pratiques qui ne visent qu'à restreindre la liberté d'expression et d'information» dans le sultanat, a estimé l’organisation dans un communiqué,
 
Mouawiyah Al-Rawahi, 31 ans, avait été arrêté le 12 juillet au lendemain de la publication d'un article sur son blog dans lequel il critiquait les pratiques répressives des autorités omanaises. Il avait déjà été arrêté deux ans plus tôt pour une publication et des tweets critiques à l'égard du sultan Qabous, selon le communiqué. Arrêté le même jour que Mouawiyah Al-Rawahi, Noah Al-Saadi, 32 ans, a, quant à lui, été libéré sans qu'aucune charge n'ait été retenue contre lui. Connu pour être un défenseur actif des droits de l'homme, il avait déjà été arrêté en septembre 2013 en raison de son militantisme, précise RSF.

D’autres jeunes militants ou blogueurs sont poursuivis pour diffamation ou insulte sur les réseaux sociaux à l'encontre du sultan Qabous. Certains ont été condamnés ou sont jugés pour participation à des manifestations réclamant des réformes politiques.
 
Dans la foulée du «Printemps arabe», Oman avait été secoué en 2011 par un mouvement de protestation qui a pris la forme de manifestations dans les grandes villes du pays ou de revendications sur les réseaux sociaux. Ce mouvement «est demeuré relativement pacifique et d’ampleur moyenne, mais des échauffourées dans le nord du pays ont toutefois provoqué la mort de deux manifestants», explique la fiche de présentation d’Oman sur le site du Quai d’Orsay.

Les protestaires demandaient surtout des hausses de salaires et des créations d’emplois. Mais dans certains cas, elles ont pris un tour plus politique : «critique de la corruption, exigence d’une plus grande transparence ou d’un élargissement des compétences du Conseil consultatif élu», constate le site du Quai.

La mosquée du sultan Qabous à Mascate, capitalke du sultanat d'Oman (8 août 2007) (AFP- Hemis.fr - Maisant Ludovic)

Depuis, le sultan a renvoyé les ministres les plus corrompus et élargi les pouvoirs du Conseil consultatif, il a réformé l’organisation administrative du territoire. Il a aussi augmenté les prestations sociales et créé 50.000 postes dans l’administration.

Cela n’a pas suffi. La contestation s’est notamment poursuivi sur les réseaux sociaux. Ce qui «a conduit les autorités omanaises à prendre, à l’automne 2012, des mesures particulièrement sévères à l’encontre d’activistes qui s’étaient rendus coupables de ‘‘cybercriminalité’’, ‘‘attroupement illégal’’ et ‘‘crime de lèse-majesté’’»: poursuites, amendes, détentions, notamment, à l’encontre de personnes utilisant les réseaux sociaux comme Facebook... Personnes notamment visées : des militants, des écrivains, des avocats…
 
«De sévères restrictions continuent de peser sur la liberté d'expression et de réunion», remarquait Amnesty International (AI) en juillet 2012. En mai 2014, selon l’organisation de défense des droits de l’homme, quatre hommes «détenus au secret», risquaient «de subir des actes de torture ou d’autres mauvais traitements». Les raisons des arrestations n’ont jamais été clairement précisées. Le 20 août 2014, le militant Sultan al Saadui, arrêté trois semaines plus tôt, a été remis en liberté sans inculpation. «Durant sa détention, il a été maltraité», rapporte AI.
 
Visiblement, le pouvoir hésite sur la conduite à tenir face à ceux qui le critiquent. En mars 2013, le sultan Qabous avait décidé d’accorder son pardon à tous ceux qui, l’année précédente, avaient été reconnus coupables d’outrage à son égard, de «crimes informatiques» et de participation à des manifestations non autorisées. Les personnes emprisonnées avaient alors été relâchées.
 
Agé de 73 ans, le sultan Qabous dirige le pays depuis près de 44 ans. Son cabinet a indiqué le 18 août qu’il se trouve depuis plus d’un mois en Allemagne où il poursuit des «examens médicaux». Le cabinet ne précise pas la nature des examens, ni la durée du programme médical qu'il doit suivre. L’AFP rapporte que des informations non confirmées circulent selon lesquelles le souverain omanais souffrirait d'un cancer du colon. Pour l’instant, ce dernier, qui  n’a ni enfants ni frères, n’a désigné aucun successeur, qui doit être obligatoirement un membre mâle de la dynastie des Bin Saïd. Un élément facteur d’instabilité dans une région elle-même connue pour son instabilité…

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