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Japon: le calvaire des élèves homosexuels et transgenres à l'école

L’ONG Human Rights Watch dénonce dans un rapport la généralisation des brimades à l'encontre des minorités sexuelles dans les écoles japonaises. Et alerte sur le fait qu'elles encouragent le harcèlement conduisant certains élèves LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres) à sombrer dans un mal-être et la dépression. Sans parler des idées négatives véhiculées par les enseignants.
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Les enseignants sont souvent, selon Human Rights Watch (HRW), un élément déterminant dans le discours de haine diffusé contre les minorités sexuelles à l'école. (NORIAKI SASAKI / YOMIURI / THE YOMIURI SHIMBUN)

«Dégoûtant», «homo» ou «ces créatures n'auraient jamais dû naître!»: ces brimades anti-LGBT ont été lancées dans une classe ou une cour d'école au Japon. Des dizaines d'élèves et de jeunes adultes sont sortis du silence, racontant être constamment pris pour cible par d'autres élèves qui les jugent différents. Avec eux, Human Rights Watch a mené des entretiens approfondis dans 14 préfectures de l'archipel découvrant qu'aller à l'école était pour ces enfants synonyme de «calvaire».

«L'absence d'information associée aux commentaires haineux généralisés, tant parmi les élèves que les professeurs, font que ces enfants ressentent honte et dégoût», indique le rapport de 84 pages intitulé: The nail that sticks out gets hammered down: LGBT Bullying and exclusion in japanese schools (Le clou qui dépasse sera enfoncé: brimades et l'exclusion anti-LGBT dans les écoles japonaises).

Les élèves LGBT vulnérables à l'école
De manière générale, le harcèlement est très répandu dans les écoles mais les politiques qui pourraient juguler ce phénomène ne sont pas appliquées. Dans l'enquête, publiée le 5 mai 2016, l'ONG reproche au gouvernement nippon de ne pas assez protéger les jeunes des minorités sexuelles. 

Sachi N., une lesbienne de 20 ans, raconte avoir appris en classe que les relations homosexuelles étaient «une chose très bizarre» et la cause principale du sida. «Maintenant, je suis lesbienne et je le sais mais j'ai toujours une vision négative de l'homosexualité. Je pense toujours que c'est de ma faute et que je peux m'améliorer.»

Former les enseignants sur le genre et la sexualité
L'un des auteurs de l'étude, Kyle Knight, considère qu'il est crucial de travailler avec les enseignants et d'introduire dans les programmes scolaires les questions relatives aux minorités sexuelles. «Le plus important pour combattre cela est de fournir aux enseignants les informations appropriées afin que les sujets concernant les personnes LGBT soient inclus dans les cursus», a-t-il déclaré à la presse, le 5 mai 2016, à Tokyo.

L'archipel est en retard par rapport aux Etats-Unis et d'autres pays occidentaux dans le domaine des droits des homosexuels. Les politiques en vigueur et le programme scolaire national ne tiennent pas compte de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre des élèves. Un dispositif de prévention des brimades doit être révisé en 2016. «Le gouvernement japonais a manifesté des gestes de soutien envers les élèves LGBT au cours des dernières années, mais les politiques nationales anti-brimades gardent le silence sur l'orientaiton sexuelle et l'identité de genre», constate Kanae Doi, directrice du bureau de HWR à Tokyo.
 

Le Japon a fait ses dernières années un effort en matière de tolérance vis-à-vis des jeunes LGBT. A Shibuya, l'un des 23 arrondissements de Tokyo et connu pour être l'un des hauts lieux de la jeunesse branchée, a commencé à délivrer un certificat d'union pour les couples de même sexe. Il leur donne certains droits équivalents aux couples hétérosexuels: accès au logement, visite du conjoint à l'hôpital, reconnaissance et visibilité. 


Malgré une certaine tolérance vis-à-vis des hommosexuels japonais, ces derniers n'ont quasiment aucun droit. Ils peuvent subir des pressions pouvant les mener jusqu'au suicide ou, moins grave, les convaincre de renoncer à faire leur comming out, par peur de causer du tort à leur famille.

Le ministère de l'Education a publié récemment un «guide à l’intention des enseignants à propos de la réaction prudente à adopter à l’égard des élèves en lien avec le trouble d’identité de genre ainsi que l’orientation sexuelle et l’identité de genre», indique HRW dans son rapport. Une démarche qualifiée d'«encouragante» par l'ONG qui attend des mesures d'urgences pour que cessent les brimades à l'école.

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