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Iran, Russie : la messagerie Telegram devient "embarrassante pour les pays plus ou moins totalitaires"

"Certaines autorités souhaiteraient mettre la main dans son code secret", a expliqué sur franceinfo au sujet de Telegram Damien Bancal, journaliste spécialiste en cybersécurité et cybercriminalité.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Illustration de la messagerie Telegram installée sur un Iphone, à Kaarst (Allemagne), le 8 novembre 2017. (MAXPPP)

Lundi, la justice iranienne a ordonné le blocage de Telegram, le réseau de messagerie le plus populaire d'Iran. La République islamique lui reproche d'héberger des groupes d'oppositions armés ou violents. Damien Bancal, journaliste spécialiste en cybersécurité, ne voit pas pourquoi interdire un outil utilisé par "des gens comme vous et moi" parce qu'une "minorité pourrait s'en servir à de mauvaises fins". Selon lui, avec Telegram, "on a encore cette petite part de liberté qui nous permet de nous protéger".

franceinfo : Est-ce que Telegram devient trop embarrassante ?

Damien Bancal : Il faut être honnête, c'est un outil particulièrement bien fait. Il permet de chiffrer les informations. Il permet de créer des groupes privés, totalement illisibles et invisibles au regard des personnes qui souhaiteraient voir ce qui s'y passe. Il est clair que cela devient embarrassant pour les pays plus ou moins totalitaires, comme la Russie ou l'Iran. On voit aussi certaines autorités qui souhaiteraient mettre la main dans son code secret.

La question est aussi celle du bon usage de Telegram. Où met-on le curseur ?

Je connais des pirates informatiques qui utilisent cet outil. Mais je connais aussi beaucoup d'hommes politiques, des députés, qui l'utilisent. Je côtoie des gens, comme vous et moi, qui l'utilisent parce que c'est sécurisé, c'est confortable. On ne va pas interdire la voiture parce que des gens font des braquages avec. 

En France, Telegram s'est toujours refusée à collaborer avec les enquêteurs, notamment en matière de terrorisme.

Le très controversé fondateur de Telegram [le Russe Pavel Dourov] refuse de donner un coup de main. Il refuse, comme en Russie, de fournir les clés qui permettent de déchiffrer. Je ne vous cache pas que moi, cela me fait tendre l'oreille. Cela veut dire qu'il y a une possibilité de le faire, c'est intéressant. D'un côté on a les autorités qui veulent clairement surveiller des entités, qu'elles soient terroristes ou autres. Et de l'autre il y a les utilisateurs qui ont envie de ne pas être lus, entendus ou surveillés par des gens qui auraient de mauvaises intentions. La sécurité, le chiffrement des informations et la possibilité de créer des groupes secrets, c'est le fond de commerce de Pavel Dourov.

C'est la fatalité, on ne pourra pas anticiper certains attentats, ou complots terroristes qui sont fomentés à partir de Telegram ?

Peu importe que ce soit via Telegram ou d'autres moyens. On n'est pas dans des dictatures où les autorités sont capables de regarder au-dessus de notre épaule nos moindres faits et gestes. On y vient, soyons très clairs. Mais quand on voit qu'on a tapé sur Facebook parce qu'il est capable de tout savoir de nous, on se dit qu'avec des outils comme Telegram on a encore cette petite part de liberté qui nous permet de nous protéger, que ce soit dans le travail ou dans la vie de tous les jours.

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