"Il va falloir obligatoirement alléger la dette de la Grèce", selon François Lenglet
L'éditorialiste de France 2 a répondu à vos questions sur la crise et ses éventuelles conséquences.
Alors que la Grèce devrait se retrouver en défaut de paiement vis-à-vis du Fonds monétaire international (FMI) dans la soirée du 30 juin, les négociations pour éviter la perspective d'une sortie du pays de la zone euro s'accélèrent. Dans ce contexte, l'éditorialiste de France 2 François Lenglet a répondu à vos questions sur la crise et ses éventuelles conséquences.
Sur l'origine de la crise
"Pour quelles raisons l'UE a-t-elle accepté l'entrée de la Grèce sans vérifier la fiabilité de cet Etat ?", demande @lessonless. "Pour des raisons politiques. Il ne semblait pas possible à l'époque d'exclure la Grèce, berceau de la démocratie. C'était bien sûr une erreur, dont la responsabilité est partagée par les Grecs et les Européens", répond François Lenglet.
Sur l'origine de la situation financière de la Grèce, l'éditorialiste rappelle que le pays "a été conduit à dépenser bien davantage qu'il ne le fallait et à détériorer sa compétitivité par le climat d'euphorie artificielle du début de la construction monétaire européenne, c'est-à-dire de 1999 à 2007. Dans cette période, l'optimisme déraisonnable des marchés financiers a conduit tous les pays d'Europe du Sud, France y compris, à oublier les règles de base de la gestion économique. Mais c'est la Grèce qui a connu les plus forts déséquilibres."
Sur le défaut de paiement mardi soir
"Si la Grèce ne paye pas sa dette ce soir que se passera-t-il ?", s'interroge un internaute. "Rien ce soir, car tout le monde est préparé à l'hypothèse d'un défaut au moins momentané", répond François Lenglet. "A ce jour, la véritable échéance, c'est le référendum de dimanche prochain sauf si, d'ici là, la Grèce et ses créanciers se mettaient d'accord sur un nouveau plan intégrant une réduction de dette et, du coup, plus crédible aux yeux des Grecs", précise l'éditorialiste.
Sur le référendum de dimanche
François Lenglet a-t-il des pronostics pour le référendum du 5 juillet ? "A cette heure, on ne peut même pas être sûr qu'il se tiendra, répond-il. S'il se tient, aura-t-il une participation suffisante ? C'est une autre incertitude, compte tenu des conditions d'organisation. Si même la participation est suffisante, tout dépend de la question qui sera finalement posée et des tractations entre Athènes et Bruxelles qui continueront probablement jusqu'à la dernière minute", indique le journaliste.
Et d'ajouter : "Il faut noter que dans l'esprit de Tsipras, si même les Grecs disent 'non' lors de ce référendum, la sortie de l'euro n'est pas automatique. Il souhaiterait alors utiliser le 'non' pour obtenir de meilleures conditions de la part de ses créanciers."
Sur les conséquences d'une sortie de la Grèce de la zone euro
"N'est-ce pas mieux pour les Grecs qu'ils quittent la zone euro et son austérité et qu'ils reconstruisent leur économie loin de tout ça ?" s'interroge un internaute. "C'est certainement une possibilité qui leur permettrait de dévaluer leur monnaie, ce dont ils ont besoin pour retrouver la croissance, répond François Lenglet. Mais l'autre option, qui à mon sens reste valide, c'est qu'ils restent dans la zone euro tout en ayant leur dette annulée et en bénéficiant d'un vrai programme de reconstruction économique, et non pas seulement, comme jusqu'ici, d'un programme de redressement des comptes."
Mais tout dépendra des éventuelles modalités de sortie de la Grèce, selon le journaliste. 'Une sortie négociée et coopérative permettrait probablement de rétablir la croissance en Grèce. Mais une sortie conflictuelle serait un désastre pour la Grèce au premier chef, et de façon indirecte aussi pour l'Europe car si ce pays basculait dans l'instabilité, il pourrait y avoir des conséquences géopolitiques très graves pour le continent : basculement des alliances militaires, immigration non contrôlée pour la France."
Sur la dette grecque
A la question "Si la dette grecque venait à être annulée, que peut-il se passer pour nous, contribuables français ?", François Lenglet rétorque : "Je dirais plutôt 'quand la dette sera annulée', car cela ne fait pas l'ombre d'un doute pour moi. Une partie de cette dette viendra mécaniquement augmenter la nôtre, pour quelques dizaines de milliards d'euros. Une autre partie sera probablement logée dans les livres de comptes de la Banque centrale européenne, avec bien d'autres dettes 'pourries' héritées de la crise." Et d'insister : "Il va falloir obligatoirement alléger la dette grecque car, dans tous les cas de figure, sortie ou pas de l'euro, elle ne sera jamais payée."
Sur le tourisme
"Une paralysie du pays est-elle à craindre bientôt ?" s'interroge un touriste inquiet. "En toute honnêteté, c'est possible, même si cela n'est pas, à l'heure actuelle, l'hypothèse la plus probable", indique l'éditorialiste. "Si le conflit s'envenime entre l'Europe et la Grèce et qu'une sortie brutale et non négociée de la zone euro se profile, il vaudra mieux ne pas être en vacances en Grèce, parce qu'on peut craindre à ce moment-là de violents mouvements sociaux et la paralysie de tout le système financier grec."
Sur l'analyse de DSK
Dominique Strauss-Kahn a publié une note sur la crise grecque, préconisant une suspension temporaire des paiements d'Athènes. "Il a tout à fait raison, répond François Lenglet. Ces dettes grecques ne seront jamais payées et il faut cesser de se réfugier dans le déni. La seule chose que je regrette, c'est qu'il ait fait exactement le contraire de ce qu'il dit aujourd'hui lorsqu'il a conçu et approuvé le premier plan de sauvetage de la Grèce alors qu'il était directeur général du FMI."
Retrouvez l'intégralité de ses réponses :
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