En Grèce, le littoral et l'environnement pâtissent de la crise
Dernier exemple de cette mise entre parenthèse de l’environnement, le gouvernement grec a fait voter une loi intitulée «Simplification des procédures pour améliorer l'esprit d'entreprise du secteur touristique, restructuration de l'organisation grecque du tourisme et autres dispositions ». Avec ce texte, l’Etat entend faciliter les investissements lourds. En Grèce, le tourisme, qui semble connaître une excellente saison 2013, pèse au moins 17% du PIB (ce qui en temps de crise est loin d’être négligeable). Une décision importante dans un pays où le tourisme est surtout affaire d’investisseurs individuels, gestionnaires de petits hôtels ou de chambres (appartements) à louer.
Le vote de cette nouvelle loi s'inscrit dans une contexte peu brillant. Le WWF (Fonds mondial pour la Nature) grec parle d’ailleurs, en analysant la période juin 2012-juin 2013, de «retour en arrière cataclysmique dans la législation environnementale». Le rapport du WWF estime que «la crise économique est utilisé comme une excuse pour l'affaiblissement de la législation et la politique environnementale». Le constat est rude dans un pays qui n'avait jamais mis le développement durable au rang de ses priorités...
«le droit de l'environnement reste inappliqué»
Ces modifications «sans précédent compromettent sérieusement les perspectives pour une une économie véritablement durable», affirme Théodote Nantsou, responsable de la politique du WWF Grèce. «En ces temps difficiles, plus que jamais, le droit de l'environnement reste inappliqué », ajoute-t-il.
Dans son rapport, l’organisation écologique pointe notamment les réductions budgétaires qui pèsent sur l’application des lois. Le gouvernement a ainsi décidé «la réduction de 2,5% des sommes destinées annuellement à l'environnement».
«La surveillance de nos trésors naturels est largement affaiblie», note George Chassiotis, coordonnateur juridique du WWF Grèce. Selon le journal grec Eleftherotypia, le budget de la sécurité civile a été réduit de 25 % en 2013 par rapport à 2012. Dans un pays où éclatent chaque été des dizaines d'incendies, cette décision fait peser un lourd risque sur l'environnement.
L’organisation écologiste pointe la responsabilité des bailleurs de fonds de la Grèce, la troïka (banque centrale européenne, commission européenne et FMI) dans l’appauvrissement des mesures de défense de l’environnement. «La pression constante sur le gouvernement pour une augmentation des recettes perçues par la légalisation des constructions illégales, même dans les parcs nationaux, résultent directement des politiques convenues dans le cadre du programme d'ajustement économique de la Grèce », précise le rapport du WWF. Plusieurs parcs nationaux sont sérieusement menacés de dommages irréversibles en raison de l'incapacité des autorités à contrer les menaces croissantes, ajoute l’organisation.
Pour le WWF, la loi récemment votée sur les investissements touristiques pourrait viser « à promouvoir la construction massive dans les zones écologiquement sensibles, principalement des îlots, dont beaucoup sont protégés par la législation nationale et européenne». Dans un pays où la loi a toujours eu quelque mal à s’appliquer…le nouveau texte prévoit la légalisation des constructions illégales.
Le WWF donne des exemples des zones qui sont menacées par la politique de l’Etat grec. Il cite le Parc national marin de Zakynthos (Zante en français) , un habitat d'importance mondiale pour la tortue marine Caretta caretta, qui pondent sur l’île. « Ces plages de nidification et la zone marine ne sont pas protégées, car elles ne sont pas surveillées » . L’organisation pointe aussi les risques qui pèsent sur le parc marin national des Sporades, l'habitat le plus important au monde pour le phoque moine de Méditerranée.
Selon les données présentées dans l'étude, la crise économique est utilisé comme une excuse pour l'affaiblissement de la législation et de la politique environnementales.
Le Monde notait dans un article récent que « de nombreux projets hôteliers sur les plages de la péninsule de Halkidiki, dans le nord-est de la Grèce, ont ainsi été rendus possibles, au mépris total de l'environnement. De grands vaisseaux bétonnés avec accès immédiat et privatif aux plus belles plages de la région, particulièrement pensés pour une clientèle russe, chaque année plus importante ».
Entre investissements à risque pour l’environnement, négligences dans le respect des lois, économies sur la surveillance et la protection des zones protégées, le gouvernement n'entend pas rester inactif. Il a pris une mesure phare en décidant de doubler les amendes pour... camping sauvage.
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