Suisse : une votation pour «sauver l’or» du pays

Si le «oui» l’emporte, la BNS devra cesser les ventes d’or fin et détenir au moins 20% d’or dans son portefeuille. Elle disposera alors d'un délai de 5 ans pour augmenter sa part d'or actuellement de 7,5% et rapatrier les 30% de son stock actuel entreposé à l'étranger: 20% en Grande Bretagne et 10% au Canada. 

Le texte, déposé en mars 2013 et qui avait recueilli 106.700 signatures de soutien, exige que 300 des 1040 tonnes d’or suisse stockées à l’étranger soient rapatriées dans le pays. «Nous voulons que cela soit fixé dans la Constitution», avait déclaré à l'époque, Ulrich Schlüer, membre du comité d’initiative et ancien conseiller national UDC. 

«Brader» la fortune du peuple suisse
Comme lui, les partisans du texte fustigent la gestion des stocks d'or de la BNS, accusant l'institution d'émission monétaire d'avoir «bradé» la fortune du peuple suisse. Ils qualifient de «grave erreur» la vente, entre 2001 et 2006,  de 1300 tonnes d’or à un prix excessivement bas, puis la liquidation de 250 tonnes supplémentaires pour acheter des devises étrangères. Cet or, vendu «dans la précipitation» par la BNS, aurait aujourd’hui, selon eux, une valeur de 75 milliards de francs. 

Ils s'inquiètent également qu'une partie de l'or de la banque centrale helvétique soit en grande partie aux États-Unis. «Cette part de l'or suisse à l'étranger doit revenir en Suisse d'ici deux ans», avait également souligné Ulrich Schlüer, craignant que le surendettement des États-Unis ne fasse planer une menace sur l’or suisse placé auprès de la Réserve fédérale américaine. 

L'exemple Berlin inquiète l'UDC
La BNS a tenté de rassurer sur le fait que 70% de son or était conservé à Zurich. Mais la droite populiste s'alarme sur le cas de l’Allemagne, détentrice de la deuxième plus grande réserve d’or au monde (3386 tonnes) derrière les Etats-Unis. Berlin, qui a décidé de rapatrier ses réserves placées Outre-Atlantique, aurait des difficultés avec la Réserve fédérale américaine, qui les stocke depuis la guerre froide. 

Pour la Banque nationale et le Conseil fédéral, l’initiative entraverait la politique monétaire de la BNS, nuirait à la stabilité du franc suisse et compromettrait la distribution de bénéfices à la Confédération et aux cantons. Dans le camp du «non», on souligne que l'or a perdu depuis plus de 40 ans sa fonction de valeur de référence et que le placement est hasardeux: la chute du cours en 2013 a fait perdre 15 milliards de francs à la BNS.

La Suisse au 7e rang mondial
Actuellement, la BNS détient 1040 tonnes d’or, soit l'équivalent de 60 milliards de francs (7,5% de sa fortune). Cela place la Suisse au 7e rang mondial, derrière les Etats-Unis (8134 tonnes), ­l’Allemagne (3384), l’Italie (2452), la France (2435), la Russie (1078) et la Chine (1054). Toutefois, rapportées au nombre d'habitants, les partisans du «non» font valoir que les réserves d'or de la Suisse seraient les plus élevées, plaçant le pays à la 1ère place, avec 4,2 onces (130,6 grammes) par habitant, devant l’Allemagne (1,2 once), la France (1,2 once également) et enfin les Etats-Unis (0,8 once).

Pour répondre aux exigences de l’initiative qui veut que l’or représente 20% de ses avoirs, la BNS devrait donc procéder à l'achat de 2000 tonnes de métal jaune pour compléter son stock (soit quelque 80 milliards de francs au cours actuel). Elle devrait aussi rapatrier ses avoirs placés à l’étranger. 

Toutefois, les solutions de l’UDC pour sauvegarder les réserves d'or de la BNS ne convainquent pas encore la majorité des citoyens suisses. Selon un sondage SSR, publié le 24 octobre 2014, 44% des personnes interrogées se disent favorables et 17% indécises. Le vote est prévu le 30 novembre 2014.