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«Sabordage – Comment la France détruit sa puissance», par Christian Harbulot

On serait tenté de dire qu’il attaque sabre au clair ! Son but vise à restaurer rien moins que la notion de «puissance», dit-il. La charge de Christian Harbulot prend la forme d’un essai intitulé «Sabordage». En ces temps de débats sur la place de la France dans le monde, l'auteur confie à Géopolis les raisons qui l’ont poussé à écrire ce livre.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Christian Harbulot, directeur de l'Ecole de guerre économique de Paris, créée en 1997 (janvier 2011). (AFP PHOTO / MIGUEL MEDINA)

Il y décrit par le menu comment la France s’ingénie selon lui, depuis si longtemps, à détruire «sa» propre puissance. Il connaît le sujet. Dans les années 90, il a fondé l’Ecole de guerre économique et rédigé de nombreux ouvrages où le passage à l’offensive est plus que préconisé aux services secrets comme à ceux qui les dirigent.

Que va devenir la France?, s’interroge Christian Harbulot à la première ligne de son essai. Et de constater, comme d’autres, la régression de notre pays largement entamée à ses yeux, depuis le milieu du XXe siècle. Une spirale qui oblige maintenant «la France à réinventer sa puissance pour préserver l’avenir de son peuple et éviter de se saborder». Bref, cet essai dense, est aussi en forme de coup de gueule.


Historiquement, et si l’on ne prend en compte que la période contemporaine, le général de Gaulle fut l’un des rares à être conscient du déficit de puissance de la France, affirme Christian Harbulot, selon qui «il tenta d’y remédier en réactivant l’idée d’indépendance nationale, par l’armement nucléaire ou le retrait de l’OTAN… mais aussi dans le domaine économique avec la création du groupe pétrolier Elf, par exemple.» Cette période, précise l’auteur du livre, tranche avec l’habituelle ambivalence de l’approche de l’exercice du pouvoir : est-ce que le puissant agit pour la satisfaction d’une ambition personnelle ou pour la place du pays dans le concert des nations?

La confusion française entre ces deux objectifs expliquerait le véritable tabou qui traverse ainsi notre pensée politique. La puissance serait ainsi par définition frappée de suspicion, puisqu’elle relèverait quasi exclusivement d’un désir de volonté de puissance certes, mais «toute personnelle». Il suffit de voir la référence permanente que nous faisons à Machiavel, assène l’auteur de l’essai. Ce «mal de puissance» ne daterait donc pas d’aujourd’hui.
 


Alors comment répondre au réflexe du repli sur soi si souvent dénoncé y compris dans l’actualité la plus récente? Pour l’auteur de Sabordage, il est urgent de retrouver une autonomie de pensée. L’intérêt restauré de l’idée de puissance supposerait de raisonner maintenant à l’échelle européenne, en étant bien décidé à faire face aux Etats-Unis.
 


Et de fait, le suzerain serait en position désormais affaiblie face à de nouvelles puissances telles que la Chine par exemple. Mais, précise Christian Harbulot, ce constat est réel pour le monde de l’industrie, le monde matériel. Pour ce qui est du monde virtuel, les USA sont en position plus que dominante. Pendant le second mandat de Bill Clinton, les autorités américaines ont clairement affirmé leur volonté d’être le pays leader du marché privé de l’information, précise l’auteur. L’avance prise en matière technologique est considérable et des enjeux sociétaux tels que la propriété intellectuelle ou la liberté d’expression sont au plus haut point à préserver, ajoute-t-il.

Pour la première fois, conclut Christian Harbulot, on va voir en terme de puissance si le triomphe dans un monde (le numérique) peut compenser l’affaiblissement dans un autre (le matériel). Voilà qui pourrait servir au pays qui est le nôtre affirme l’essayiste qui souhaite aussi donner des pistes d’avenir, car «nous allons devoir nous battre sur plusieurs fronts en redéfinissant le périmètre de la souveraineté française».

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