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Malgré l'hébergement promis, les migrants sont de retour dans le quartier de La Chapelle

Après l'évacuation d'un campement mardi, une centaine d'Ethiopiens, d'Erythréens ou de Soudanais se retrouvent livrés à eux-mêmes dans les rues du 18e arrondissement de Paris.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Des migrants font la queue pour recevoir de la nourriture proposée par des associations devant l'église Saint-Bernard, à Paris, le 4 juin 2015. ( BENOIT TESSIER / REUTERS )

Retour à la case départ. Malgré l'évacuation, mardi, du campement de la station de métro La Chapelle, à Paris, et les promesses d'hébergement, une centaine de migrants se retrouvent à nouveau à la rue. Mercredi soir, ces migrants, vraisemblablement guidés par des militants du quartier, ont trouvé refuge dans des locaux associatifs situés face à l'église Saint-Bernard (18e arrondissement), célèbre depuis que des sans-papiers en avaient été expulsés manu militari en 1996.

Arrivés en nombre alors qu'une réunion se tenait dans les locaux, les migrants se sont installés dans une grande salle au 1er étage. Un militant reconnaît que les visiteurs ont mis les personnes présentes dans les locaux "devant le fait accompli", mais que "tout s'est bien passé". Faute de places, une dizaine de personnes n'ont pas pu entrer. A 7h30 jeudi matin, tous ont quitté les lieux, comme ils s'y étaient engagés, après avoir nettoyé les locaux.

"On reste comme ça, dehors"

Ethiopiens, Erythréens ou encore Soudanais du Darfour, ils se retrouvent livrés à eux-mêmes. Quelques-uns passent le temps, assis sur le parvis de l'église ou sur les bancs du square situé en face, en attendant la distribution du casse-croûte de midi par des associations. Trois rues plus loin, d'autres frappent dans un vieux ballon de foot sur un morceau de terrain vague, juste devant le campement évacué mardi, désormais grillagé et bâché. "Il n'y a pas de solution pour nous. Alors on reste comme ça, dehors", affirme l'un d'eux, dans un français hésitant. Il est arrivé à Paris il y a huit mois.

"L'Etat n'a pas tenu sa promesse de trouver une solution d'hébergement à tout le monde", dénonce un militant "indépendant" qui ne souhaite pas donner son nom. Mardi, après l'évacuation, la préfecture de police assurait en effet que des "propositions d'hébergement individualisées" avaient été faites à "toutes les personnes recensées" sur le campement. Pour certaines d'entre elles, la procédure a manifestement connu des ratés.

"Des situations complexes à démêler"

Un Erythréen raconte que l'autocar dans lequel il a été invité à monter mardi n'a pas rejoint de centre d'hébergement, comme on le lui avait promis. Tous les passagers auraient été déposés dans un centre de l'Armée du salut dans le 19e arrondissement où, selon ses dires, ils n'auraient reçu aucune information quant à leur sort. Ce n'est qu'en fin de journée qu'ils ont été acheminés dans un centre d'accueil pour sans-abri à Nanterre (Hauts-de-Seine).

Sur la centaine de migrants ayant trouvé refuge face à l'église Saint-Bernard, tous n'étaient cependant pas des occupants du campement de La Chapelle. Certains sont arrivés à Paris il y a moins d'une semaine, d'autres viennent de l'autre grand campement de migrants installé à Paris, près de la gare d'Austerlitz. Difficile donc de savoir à quel point les autorités ont failli à leurs engagements. "Il y a une multitude de cas et les situations sont complexes à démêler", indique, prudent, Gérald Briant (PCF), adjoint au maire du 18e arrondissement en charge de l'exclusion.

Les Verts parisiens interpellent Hidalgo et l'Etat

Mais pour les associations de soutien aux migrants, là n'est pas la question. "Rien n'est réglé. Les personnes hébergées qui ne relèvent pas du droit d'asile vont de toute façon se retrouver à la rue dans quelques jours", déplore Sylvie Lhoste, présidente d'Entraides citoyennes. "Ils sont hébergés aux quatre coins de l'Ile-de-France, sans aucun suivi. Ils ne savent pas où ils atterrissent, ils ne connaissent même pas le nom de la ville où on les a amenés", dénonce-t-elle encore.

Pour le conseiller de Paris Pascal Julien (Europe Ecologie-Les Verts), élu du 18e arrondissement, l'évacuation du campement, mardi, n'a fait qu'"éparpiller la misère", rendant la survie et les démarches encore plus compliquées pour les migrants, qui ne peuvent plus s'entraider. "Ils se retrouvent dans des hôtels situés dans des lieux isolés, à vingt minutes du premier commerce, à trente minutes du premier train, sans argent et sans nourriture. Comment peuvent-ils s'en satisfaire ?" interroge l'élu. Dans un courrier qui doit être adressé ce jeudi à Anne Hidalgo et au préfet de police, le groupe des Verts au Conseil de Paris demande que soient ouverts un ou plusieurs lieux permettant un accueil convenable. En attendant, les migrants de Saint-Bernard ne savent toujours pas où ils dormiront ce soir.

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