"C'est difficile de prouver son homosexualité" : comment Moussa, un militant gay, risque d'être expulsé en Guinée où il encourt la prison
L'homme de 28 ans est en garde à vue à l'aéroport Saint-Exupéry de Lyon pour avoir refusé d'embarquer dans l'avion qui devait le ramener vers la Guinée, ce jeudi.
Son expulsion vers son pays d'origine pourrait le conduire en prison. Moussa, un Guinéen homosexuel sans-papiers de 28 ans, aurait dû être renvoyé dans son pays d'origine, jeudi 3 mai au matin, depuis l'aéroport de Lyon-Saint-Exupéry (Rhône). Un pays où, en raison de son orientation sexuelle, le jeune homme risque "une peine d'emprisonnement de six mois à trois ans", selon l'article 274 du Code pénal guinéen.
A la suite de son refus d'embarquer, Moussa a été placé en garde à vue au commissariat de l'aéroport et ne sera "pas expulsé" dans l'immédiat a appris franceinfo auprès de la préfecture du Rhône. Dans la soirée de jeudi, sa garde à vue est prolongée et il sera présenté demain en comparution immédiate au tribunal de Lyon pour refus d'embarquement, indique une source judiciaire à franceinfo. Moussa risque une peine allant jusqu'à trois ans de prison et une interdiction de territoire français de dix ans, selon le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Demande d'asile rejetée en 2016 puis 2017
Arrivé en France en juin 2015 avec un visa court séjour (qui permet de rester dans un pays de l'espace Schengen durant trois mois), Moussa a été placé en centre de rétention fin mars. Sa demande d'asile, déposée en novembre 2015 à l'expiration de son visa, a en effet été rejetée en juin 2016, puis en février 2017 en appel, indique à franceinfo la préfecture du Gard. Selon une source proche du dossier, le militant aurait en effet "menti sur plusieurs points".
Christian Andreo, de l'association de lutte contre le sida Aides, auprès de laquelle Moussa militait "depuis plusieurs mois", assure à franceinfo que la préfecture "ne croit pas que Moussa soit homosexuel" car il avait "une compagne" en Guinée, ce qu'il "n'a pas déclaré dans sa demande d'asile". Pourtant, un collectif qui défend Moussa explique que ce dernier a quitté la Guinée après que son ancien compagnon a été brûlé sous ses yeux en raison de son homosexualité, relate Midi Libre. "C'est difficile de prouver son homosexualité, note Christian Andreo. Mais quel est son intérêt à mentir, compte tenu des risques qu'il prend en se déclarant homosexuel ? En Guinée, l'affaire fait les gros titres."
"Réexamen de sa demande d'asile"
Sur les réseaux sociaux, de nombreuses associations appellent jeudi à venir manifester à l'aéroport de Lyon afin d'"empêcher l'embarquement de Moussa". Contactée par franceinfo, une militante du collectif féministe, queer et antiraciste Des Raciné·e·s indique que "plusieurs dizaines de militants" étaient réunis en milieu d'après-midi devant le terminal A-1 de l'aéroport. Munis de pancartes "Moussa expulsé, Moussa assassiné" ou "Sauvez Moussa", ils ont tenté de sensibiliser les passagers qui étaient présents au cas du Guinéen.
BESOIN DE MONDE À L’AÉROPORT SAINT EXUPERY À LYON DEVANT LE TERMINAL A1 !!! #RT au maximum, faites passez le message pour empêcher l'embarquement de #Moussa sur le vol AT-721 à 17 h 45 direction #Casablanca https://t.co/0IGajQUYIE
— Collectif Des Raciné·e·s (@Desracine_e_s) 3 mai 2018
Du monde à Lyon Saint-Exupéry qui se mobilise pour #Moussa #LIBEREZMOUSSA pic.twitter.com/bZ1cYRC3bb
— Norden Gail (@Nordengail) 3 mai 2018
L'association Aides demande de son côté dans un communiqué "l’arrêt immédiat de cette procédure d’expulsion, la libération de Moussa et le réexamen de sa demande d’asile".
-COMMUNIQUÉ-
— Association AIDES (@assoAIDES) 30 avril 2018
AIDES exige la LIBÉRATION de Moussa et le réexamen de sa demande d'asile. AIDES demande la protection de l'Etat pour toute personne gay, bi, lesbienne ou trans arrivant de pays notoirement homophobes et dangereux.
Cette politique indigne doit cesser.#LIBEREZMOUSSA pic.twitter.com/XM7QX3LWSn
Le jeune homme avait déjà fait l'objet d'une tentative d'expulsion dans la nuit du samedi 28 au dimanche 29 avril, depuis Nîmes. Mais un "refus d'embarquement de la part du commandant", avait empêché son expulsion, indique la préfecture du Gard. Ce refus et la mobilisation de soutien à Nîmes, qui a conduit la préfecture du Gard à exfiltrer le Guinéen à Lyon dans la nuit du mercredi 2 au jeudi 3 mai. Une mesure courante, selon la préfecture du Rhône.
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