: Vidéo Ukraine : "La Russie a raté la guerre mais est en train de gagner la bataille dans le Donbass", selon le Général Dominique Trinquand
Expert militaire et ancien chef de la mission militaire française auprès de l'ONU à New York, le général Dominique Trinquand estime que le conflit en Ukraine est une "guerre longue" dont on sort "difficilement".
"La Russie a raté la guerre mais elle est en train de gagner la bataille dans le Donbass", a expliqué le Général Dominique Trinquand, expert militaire et ancien chef de la mission militaire française auprès de l'ONU à New York, invité mardi 24 mai sur franceinfo. Trois mois après le début de la guerre en Ukraine, le 24 février dernier, Vladimir Poutine est parvenu à obtenir une "continuité territoriale entre la Crimée et le Donbass". "La progression continue, laborieusement, difficilement, lentement, mais elle continue", a poursuivi le spécialiste, évoquant une "guerre longue" dont on sort "difficilement".
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franceinfo : Après trois mois de guerre, qui a pris le dessus sur qui ?
Général Dominique Trinquand : La Russie a raté la guerre mais elle est en train de gagner la bataille dans le Donbass. Il y a trois mois, le président Poutine voulait renverser le gouvernement ukrainien, rapidement. Ça a échoué. Ensuite, il a lancé des offensives sur l'ensemble du front, à l'Est. Toutes ont échoué, sauf une, dans le sud.
"La percée entre la Crimée et le Donbass a réussi. Marioupol vient de tomber. Il y une continuité territoriale entre la Crimée et le Donbass. La mer d'Azov est devenue une mer russe."
Général Dominique Trinquandà franceinfo
Et la progression continue, laborieusement, difficilement, lentement, mais elle continue dans le Donbass. On a l'impression qu'on s'installe dans une guerre longue, dans laquelle – sur le court terme – la Russie va progresser dans cette région-là. Elle s'installe déjà, de façon défensive, sur toute la bande sud autour de la mer d'Azov, tout en préparant l'annexion de ces territoires à la Russie.
On parle de 15 000 soldats russes tués depuis le début de la guerre, soit autant que pendant les neuf années de guerre en Afghanistan. Comment expliquer que le bilan soit aussi lourd côté russe ?
Pour plusieurs raisons. D'abord, l'échec de la stratégie russe d'envoyer quatre axes d'attaque qui ont échoué. La très grande résistance de l'armée ukrainienne, bien sûr, et, enfin, la mauvaise organisation de l'armée russe qui a montré à de multiples moments ses défauts logistiques et tactiques, comme lors de l'échec du franchissement du Donetsk qui a été montré sur toutes les images. Tout ceci accumule les pertes humaines.
Est-ce que Vladimir Poutine a encore des réserves d'hommes et d'armements ?
Pas beaucoup d'hommes supplémentaires, non. Au total, on compte 96 bataillons dans le Donbass qui, en effectifs globaux, en font 60 à peu près parce qu'ils ne sont pas tous à 100%. Mais cette pression, et surtout l'utilisation massive de l'artillerie, font que les Russes continuent de progresser. Par ailleurs, les républiques sécessionnistes ont mobilisé complètement leurs troupes, alors qu'en Russie la mobilisation générale est plus difficile, même si l'ensemble des réservistes a été mobilisé.
Comment sort-on de cette guerre ?
Difficilement. Mais je voudrais rappeler que cette guerre qu'on voit, nous, depuis le 24 février, elle existe depuis 2014 dans l'est de l'Ukraine. On n'en parlait pas. La guerre continue et, à la différence d'avant, elle a pris une intensité différente. Elle va continuer, mais dans une région beaucoup plus large. Les positions vont s'installer. Les territoires vont continuer à être occupés. Odessa va certainement être étouffée par la mer.
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