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Reportage Guerre en Ukraine : depuis le bombardement du port d’Izmaïl, des centaines de camions remplis de céréales se trouvent "bloqués" à l'entrée de la ville

L'Ukraine ne peut plus faire partir ses grains depuis les ports de la mer Noire et se rabat sur les ports du Danube, nouvelles cibles de Moscou.
Article rédigé par Hajera Mohammad - Fabien Gosset, Natalia Vlasenko
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Igor (à gauche), Youra (au centre) et leur collègue sont bloqués depuis plusieurs jours à l’entrée de la ville d’Izmaïl avec leur camion remplis de blé (juillet 2023). (HAJERA MOHAMMAD / RADIO FRANCE)

En Ukraine, la crise des céréales n'en finit pas. Depuis que les Russes se sont retirés de l’accord sur les exportations, impossible pour Kiev de faire partir ses grains depuis les ports de la mer Noire, alors le pays se rabat désormais sur le Danube. Mais là encore, les tensions sont importantes. L’armée russe a bombardé les ports de Reni, fin juillet, puis celui d’Izmaïl, début août. Des structures situées sur ce fleuve qui marque la frontière avec la Roumanie. À Izmaïl, dans le sud de l'Ukraine, l’activité tourne au ralenti désormais et des centaines de camions, remplis de céréales, sont bloqués à l’entrée de la ville. 

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"Tenez, goûtez ces graines de tournesol, elles sont un peu salées, mais vous préférez peut-être une poignée de blé !", ironise Igor. Il a 24 tonnes de blé dans son camion. Cela fait trois jours qu'il attend pour les décharger sur le port d'Izmaïl, garé au bord de la route. Ça commence à faire long. 

Les trois chauffeurs routiers ne savent toujours pas s’ils vont pouvoir décharger le blé sur le port d’Izmaïl qui tourne au ralenti depuis l’attaque des Russes (HAJERA MOHAMMAD)

"C'est mon anniversaire aujourd'hui, ma femme m'attend à la maison et moi, je suis bloqué ici". Alors le routier s'occupe comme il peut avec ses deux collègues assis sur des gros pneus, à l'ombre d'un arbre. "On fait de la mécanique. On passe du temps sur les réseaux sociaux, on fait des selfies, mais ça va. Vous voyez, on a des palmiers ici, on se croirait aux Maldives !"

Le Danube ne pourra pas absorber les tonnes de céréales, selon les routiers

Derrière les blagues et les sourires, il y a l'inquiétude. Celle de Yura qui se demande quand il va pouvoir repartir vers le port. "On attend que les bateaux arrivent. Aujourd'hui, on a rappelé notre responsable pour demander quand ? Il a répondu 'je ne sais pas"".

"Les politiques peuvent négocier pendant longtemps, mais pendant ce temps-là, c'est nous, les simples travailleurs, qui souffrons. On est traités comme des chiens".

Yura, routier

à franceinfo

De plus, chaque jour, passé sur place leur coûte cher. Le patron ne rembourse pas la nourriture achetée au magasin du coin. Mais Igor, lui, pense aussi à ceux qui attendent ses céréales. 
"On sait qu'il y a des gens qui ont faim. On essaie de rouler vite mais on se retrouve bloqués ici. Imaginez, il y a peut-être quelqu'un qui n'a plus de blé pour la baguette française".

Et même si l'activité reprend un jour normalement, ces routiers le savent, le Danube ne pourra jamais absorber toutes les tonnes de céréales qui partaient des autres ports sur la mer Noire. Pour eux, c'est juste impossible.

La ville Izmaïl (point rouge) dans le sud de l'Ukraine. (CAPTURE D'ECRAN GOOGLE MAPS)

Depuis le bombardement du port d’Izmaïl, des centaines de camions plein de céréales se trouvent "bloqués" à l'entrée de la ville - le reportage d'Hajera Mohammad

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