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Crimes de guerre en Ukraine : quel rôle joue la France dans l'enquête de la Cour pénale internationale ?

Les investigations lancées par la CPI se poursuivent sur le terrain avec l'appui de l'Europe et en particulier des autorités françaises. Paris a envoyé en Ukraine des médecins légistes et des gendarmes, et renforcé son aide financière.

Article rédigé par Claude Guibal
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
 Karim Khan, le procureur de la Cour pénale internationale, visite une fausse commune à Boutcha (Ukraine), le 13 avril 2022. (FADEL SENNA / AFP)

Le massacre de Boutcha a agi comme un déclencheur. Après la découverte de plusieurs centaines de cadavres début avril dans cette ville de la banlieue de Kiev, 43 pays dont la France, ont saisi directement la Cour Pénale internationale, mettant en œuvre une gigantesque opération de coopération judiciaire. Le procureur de la CPI, avait déjà annoncé, un mois plus tôt l'ouverture d'une enquête sur d'éventuels crimes de guerre en Ukraine.

La mobilisation des États a joué le rôle d'accélérateur, explique François Alabrune est directeur des affaires juridiques au ministère des affaires étrangères : "Cela a permis au procureur de démarrer immédiatement l'enquête, le lendemain de notre saisine."

"Cela permet de recueillir de façon très rapide des preuves matérielles, des témoignages avant qu'ils ne disparaissent."

François Alabrune

à franceinfo

Sur le terrain, en Ukraine, l'équipe française est déjà là, deux médecins légistes et une quinzaine de gendarmes au service de la justice internationale. Paris a battu le rappel des membres de l’Union européenne, au travers du dispositif Eurojust. Celui-ci permet l’échange, la mutualisation et la centralisation de données directement entre les juridictions. Eurojust est piloté par une équipe commune d’enquête qui fait remonter ces informations à la CPI.

Un soutien financier et technologique

L’effort est également financier. La France a rajouté 500 000 euros aux 13 millions qu’elle donne déjà à la CPI pour répondre à l’appel à contribution lancé par le procureur Karim Khan à la Haye. Jamais l'institution n’avait été chargée d'une enquête d'une telle ampleur, explique Luis Vassy ambassadeur de France aux Pays Bas : "Une partie de ces fonds, du point de vue du procureur, doit aller à la modernisation d'un certain nombre d'outils de gestion des données. Des méthodologies pour à la fois faire remonter les témoignages, les analyser, et puis les conserver. Ensuite, vous aurez en effet des questions d'analyse d'images sur laquelle utilisation de l'intelligence artificielle peut être utile. Vue l'étendue des crimes qui sont commis et le nombre de témoignages à recueillir, cela va être un élément important."

Des éléments essentiels afin que le procureur puisse lancer des procédures sans failles. Car la Cour pénale internationale ne juge pas des États mais des personnes et son objectif n’est pas juste de prouver que des crimes de guerre ont effectivement été commis, mais d'établir des chaînes de responsabilité individuelle : "Savoir que vous pourrez un jour rendre des comptes des crimes internationaux les plus graves que vous pourriez avoir commis doit avoir un effet dissuasif sur celui qui commet ces crimes ou les ordonne." La certitude qu’il n’y aura pas d’impunité. Un outil majeur pour tenter de freiner les guerres.

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