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Emmanuel Macron à Aix-la-Chapelle : "Aujourd'hui, le président est un peu seul pour faire avancer le projet européen"

"En Europe, Emmanuel Macron n'a pas de partenaire pour faire avancer le projet européen", a réagi jeudi sur franceinfo Guillaume Klossa, fondateur du collectif EuropaNova, après le plaidoyer du président de la République à Aix-la-Chapelle en Allemagne.

Article rédigé par franceinfo
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Le président Emmanuel Macron et son épouse Brigitte Macron, accompagnés de la chancelière allemande Angela Merkel lors de la cérémonie du prix Charlemagne, le 10 mai 2018 à Aix-la-Chapelle en Allemagne. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Après avoir reçu le Prix Charlemagne à Aix-la-Chapelle en Allemagne le 10 mai 2018, Emmanuel Macron a livré un plaidoyer en faveur de l'Union européenne et détaillé les quatre principes de sa vision : souveraineté, unité, ne pas avoir peur et agir maintenant. "La difficulté aujourd'hui, c'est que le président est un peu seul", a commenté sur franceinfo Guillaume Klossa, le fondateur du collectif EuropaNova, conseillant "de mieux s'appuyer et sur les populations et sur les leaders d'opinion". Selon Guillaume Klossa, "si l'Europe ne s'affirme pas maintenant, on va perdre pied".

franceinfo : Est-ce possible d'aller au-delà des mots, à présent ?

Guillaume Klossa : Je crois que l'action n'est possible que si l'ensemble des acteurs sont mobilisés. Cela veut dire non seulement les chefs d'État et le gouvernement, les institutions européennes, les leaders d'opinion, les citoyens mais aussi les peuples. C'est une condition de l'engagement majeur. Emmanuel Macron a rappelé que Denis de Rougemont, avait appelé, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, à une Charte des droits et des valeurs européennes, et c'est quelques années plus tard en 1951 en fait qu'il y a eu la Convention européenne des droits de l'homme qui définit cette charte des valeurs. C'est allé très vite. Si on regarde le lendemain de la guerre, et avant même la création de la CECA (Communauté européenne du charbon et de l'acier), le Cern, qui était le centre de recherche nucléaire européen, l'Union européenne de radio-télévision, l'Eurovision, plein de projets européens sont nés, portés par les populations, par les leaders d'opinion. Je pense que le président de la République, s'il veut agir, doit être en mesure de mieux s'appuyer et sur les populations et sur les leaders d'opinion. La stratégie qu'il a eue jusqu'à maintenant, c'était essentiellement de s'appuyer sur les chefs d'État et de gouvernement et une unité, une alliance, entre lui-même et la chancelière.

Emmanuel Macron veut que la position des défenseurs de l'Europe soit plus claire. Est-il trop seul dans cette position ?

Il ne peut pas y avoir qu'un défenseur de l'Europe en Europe. Si le seul défenseur de l'Europe aujourd'hui c'est Emmanuel Macron, en Europe il n'a pas de partenaire pour faire avancer le projet européen. C'est ça la grande difficulté parce que l'Europe a toujours avancé, non seulement parce qu'il y avait le couple franco-allemand, mais parce qu'autour du couple franco-allemand, il y avait d'autres pays, l'Espagne, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, même à certaines époques la Pologne, qui voulaient avancer. (…) Et la difficulté aujourd'hui, c'est que le président est un peu seul. Alors très bien si la chancelière annonce une nouvelle dynamique franco-allemande avec des axes de convergence, mais il faut plus que ça. Et puis, il y a le dernier élément qui est extrêmement important, c'est la mobilisation des acteurs de terrain et des citoyens. C'est comme ça que l'Europe est née au lendemain de la guerre, on l'oublie mais il y avait des centaines de milliers de personnes qui étaient sur le terrain, mobilisées sur des projets concrets, et ça, ça manque aussi.

Emmanuel Macron doit-il attendre que sa politique ait des résultats en France, avant de s'engager dans la défense de l'Europe ?

Les résultats, ça met toujours quelques années à arriver, on l'a vu pour Gerhard Schröder, pour Tony Blair, ça a mis 3-4 ans. Les Français ne sont pas prêts à attendre 3 à 4 ans que les choses se passent et de voir que l'Europe ne bouge pas. Par ailleurs, on est dans une situation de crise internationale, et si l'Europe ne s'affirme pas maintenant, on va perdre pied. Le sujet, c'est quand même d'agir face à une transformation du monde qui est extrêmement rapide, et c'est vrai dans le numérique, dans le domaine énergétique, dans le domaine commercial, où on voit que les États-Unis comme la Chine sont en train de se refermer. Donc sans puissance européenne, il n'y a pas d'action.

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