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Allemagne: pas de minima sociaux pour les citoyens européens sans travail

Le gouvernement allemand a adopté le 12 octobre 2016 un projet de loi restreignant l’accès aux prestations sociales pour les citoyens de pays membres de l’Union européenne. Désormais, ceux qui vivent en Allemagne sans travailler, devront attendre cinq ans avant de pouvoir bénéficier du minimum social. Le correspondant de France 2 à Berlin, Amaury Guibert, fait le point pour Géopolis.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Dans un centre de formation à Cologne, en Allemagne, le 21 juin 2016. (OLIVER BERG / DPA)

Pourquoi l’Allemagne institue-t-elle une telle mesure?
C’est déjà un sacré revirement de la part de l’Allemagne, qui a toujours été très attachée au principe de libre-circulation dans l’Union européenne.

Le jugement rendu par un tribunal fédéral, fin 2015, a changé le point de vue du gouvernement. La plus haute juridiction en matière d’affaires sociales a statué qu’un ressortissant de l’Union européenne avait droit aux aides sociales au bout de six mois de résidence dans le pays, et ce même sans travailler. Les communes allemandes, qui paient les prestations sociales, ont tiré la sonnette d’alarme: elles ne voulaient pas que cela attire des citoyens de pays où le niveau de vie est bien inférieur. Le gouvernement a entendu ces inquiétudes, et proposé de modifier la loi.

Le principe, exposé par la ministre du Travail, est simple: celui qui vit en Allemagne, qui travaille et qui paie des cotisations, a droit à des prestations. Celui qui ne travaille pas devra se tourner vers son pays d’origine pour toucher des minimas sociaux. 
 
La mesure vise-t-elle tous les citoyens européens?
Sur le papier oui, le contraire ne serait de toute façon pas possible car cela serait totalement discriminatoire. Mais ce sont bien les ressortissants des pays d’Europe de l’Est qui sont visés, en particulier les Polonais, les Bulgares et les Roumains. 

L’Allemagne a accueilli près de 700.000 citoyens européens en 2015 (en fait 380.000, le reste étant reparti), et la grande majorité vient de ces pays où le niveau de vie est bien inférieur à ce qu’il est en Allemagne. Le gouvernement ne veut pas que l’Allemagne et son système social apparaissent trop attractifs. Angela Merkel, elle-même, l’avait rappelé au printemps dernier en déclarant que tout citoyen roumain est le bienvenu, mais que s’il veut percevoir des allocations qui ne reposent pas sur du travail, il faut qu’il retourne dans son pays.

Après, la mesure touchera aussi un Français ou un Belge. Mais ceux qui restent en Allemagne aussi longtemps (5 ans) sans travailler sont des exceptions.
 
Avec cette réforme, le gouvernement veut-il changer profondément sa politique migratoire?
Disons que cela est en cohérence avec ce que fait le gouvernement depuis des mois. L’intégration par le travail est la valeur centrale de cette politique. Et cela vaut que l’ont soit Européen ou extra-Européen : il faut travailler pour rester dans le pays, et avoir des droits.

Le principe donnant-donnant, ou droits-devoirs, a été rappelé dans la dernière grande loi d’intégration, pour les réfugiés extra-européens: un réfugié doit respecter certaines obligations (rechercher activement du travail, apprendre la langue) s’il veut conserver son titre de séjour. Pour les immigrés européens, il faut aussi respecter certaines règles, la première étant qu’il faut travailler pour avoir droit à des prestations sociales.

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