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"Tous les jeunes se connaissaient ici" : l'incrédulité des habitants de Ripoll, au cœur de l'enquête sur les attentats en Catalogne

Les habitants de Ripoll ont du mal à croire que des responsables présumés des attentats en Catalogne, jeudi, ont grandi dans leur ville.

Article rédigé par franceinfo - Jean-François Fernandez. Edité par Alexandra du Boucheron
Radio France
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Temps de lecture : 3 min
A Ripoll, en Catalogne, l'appartement de l'imam, soupçonné d'être lié aux attentats du 17 août 2017, est sous scellés. (JEAN-FRANCOIS FERNANDEZ / FRANCEINFO)

L'enquête sur les attentats de Barcelone et Cambrils se focalise autour de l'imam de Ripoll, dans la province de Gérone, en Catalogne. Abdelbaki Es Satty est soupçonné d'être le cerveau des attentats et il pourrait avoir péri dans l'explosion accidentelle de la maison d'Alcanar. L'appartement qu'il occupait à Ripoll a été perquisitionné et mis sous scellée, samedi 19 août, à Ripoll. Trois jeunes soupçonnés d'être liés aux attentats ont grandi à Ripoll.

Depuis, Ripoll est en état de siège. Cette petite ville de près de 11 000 habitants, au pied des Pyrénées, à une centaine de kilomètres au nord de Barcelone, était jusque-là connue pour son monastère du Moyen Âge. 

La ville de Ripoll est en état de siège : le reportage de Jean-François Fernandez

Les habitants de Ripoll ont du mal à croire que des responsables présumés des attentats en Catalogne, qui ont fait 14 mort et une centaine de blessés, jeudi, ont grandi dans leur ville. Selon les témoignages, ces jeunes y menaient une vie normale et l'un d'eux aurait même été impliqué dans le club de football local. La ville est petite et "tout le monde se connaît, tout le monde se voit", raconte Maria, une habitante de Ripoll.

"On ne les aurait jamais imaginés faire du mal à une mouche"

"J'en connais quelques-uns parce qu'on était voisin, poursuit la jeune femme. Et puis, il y en a qui ont le même âge que moi, on se connaît depuis le collège, on se côtoyait quand on était étudiant. Il y en a un qui travaillait dans une boîte de nuit et quand on sortait on se voyait. Tous les jeunes le connaissaient ici." L'un des voisins des jeunes confirme qu'"ils ont vécu ici" et qu'"ils ont fait leurs études ici, en primaire".

Mon épouse était enseignante et elle a été l'institutrice de l'un de ces jeunes.

Un habitant de Ripoll (Catalogne)

à franceinfo

Même incrédulité du côté de la famille de Younès Abouyaaqoub. Ce Marocain de 22 ans, qui vit à Ripoll, est le principal suspect de l'attaque de Barcelone. Sa photo est dans tous les médias. Il est soupçonné d'être le conducteur de la camionnette qui a tué 13 personnes sur les Ramblas et ses papiers ont servi à louer plusieurs des véhicules impliqués dans les attentats. "Ils sont très jeunes, ils vivaient une vie normale, ils travaillaient, ils avaient une voiture, ils partaient en vacances chaque année, raconte Fatima, l'une de ses cousines. On ne savait pas que ça allait arriver. On n'aurait jamais imaginé qu'ils puissent faire du mal à une mouche. Et encore moins cette barbarie."

Depuis samedi, les habitants de Ripoll ont pris l'habitude de voir les forces de l'ordre. À l'entrée de la commune, des voitures avec gyrophare barrent la route et les policiers fouillent systématiquement les coffres des voitures et contrôlent l'identité des conducteurs.

Une petite communauté musulmane

Si la ville n'est pas considérée comme un "Molenbeek espagnol", trois des quatre personnes interpellées dans le cadre de l'enquête des attentats y vivent ou y ont vécu. Certains habitants disent avoir remarqué une certaine radicalisation depuis quelques temps, notamment la présence plus prononcée du voile chez des femmes.

La communauté marocaine de Ripoll est plutôt bien intégrée mais la situation pourrait changer et cela inquiète Juan, un riverain : "Je pense qu'il va y avoir un problème. Ici, il y a beaucoup d'interaction entre les gens, certains travaillent avec untel ou untel. Ils ont des relations de proximité mais je crains qu'il y ait une période -j'espère que ce ne sera pas très long- où il y aura de la méfiance. Mais, bon, j'espère que cela se tassera assez rapidement."

A Ripoll, il y a une communauté musulmane, certes très peu nombreuse mais, à terme, le lien de confiance risque de se dégrader entre la communauté musulmane et le reste de la population.

Juan, habitant de Ripoll (Catalogne)

à franceinfo

Ici, comme partout en Espagne, le mot d'ordre depuis jeudi est "No tenemos miedo" ("nous n'avons pas peur"). Assis sur un banc, José observe les allées et venues des journalistes. "Je n'ai pas peur pour moi. En revanche, j'ai des petits fils et des petites-filles, et c'est pour eux que j'ai peur, dit-il. J'ai peur parce que j'ai une famille. J'espère vraiment qu'on va régler ce problème parce qu'on ne peut pas continuer comme cela."

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