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Pourquoi la Grande Barrière de corail pourrait mourir

L'Unesco menace d'inscrire le site naturel au patrimoine mondial en péril si l'Australie ne réagit pas rapidement. 

Article rédigé par Florian Delafoi
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Un cargo chinois en difficulté laisse échapper du pétrole près de la Grande Barrière de corail le 4 avril 2010.  (© HO NEW / REUTERS / X80001)

Il faut sauver la Grande Barrière de corail. Située au nord-est de la côte australienne, ce chef d’oeuvre de la nature est peuplé de milliers d’espèces de poissons, de mollusques et de coraux. Mais le plus grand récif corallien du monde est plus que jamais menacé de disparition. Inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco en 1981, le site a perdu la moitié de ses coraux en trente ans et sa dégradation s’accélère dangereusement.

Au point que l’institution onusienne a donné jusqu’au dimanche 1er février 2015 à l'Australie pour prendre des mesures décisives. A défaut, l'Unesco pourrait inscrire la Grande Barrière de corail sur la liste du patrimoine mondial en péril.

Francetv info présente les quatre dangers qui menacent durablement ce joyau naturel.

Parce que l'activité portuaire dégrade la qualité de l'eau 

Pour tenter d'éviter la sanction, l’Australie a annoncé une mesure forte, samedi 24 janvier : l'interdiction du déversement de déchets de dragage dans le parc marin où se trouve le site. Cette pratique est courante lors des opérations d'élargissement des chenaux, mouillages et marinas.

Et c'est peu dire que ces derniers sont sollicités : 10 000 navires ont traversé la Grande Barrière entre 2012 et 2013 selon l'autorité chargée de la gestion du site, la GBRMPA (PDF). Le nombre de passages devrait même augmenter de 250% en 20 ans. Un dynamisme qui s'explique par les richesses naturelles présentes sur ce territoire. L'Etat du Queensland exploite du charbon, du minerai de fer, du gaz naturel ou encore de l'uranium. Des ressources qui sont exportées en masse par la mer. Le dragage permet alors aux cargos géants d'atteindre sans difficulté les ports australiens. Sauf que cette profonde modification du paysage marin n'est pas sans conséquence. Les déchets déversés abîment la Grande Barrière de corail qui longe la côte sur 2 300 kilomètres.

Le ministre de l’Environnement australien, Greg Hunt, a demandé à ce que soient stoppés "une fois pour toutes" ces déversements de déchets. L’Autorité du parc de la Grande Barrière de corail est chargée d’élaborer des règles pour y mettre fin. Il y a urgence, car ces déchets rejetés dans l’eau asphyxient les algues et coraux du site. 

Parce que l'agriculture rejette des pesticides dans l'océan

L'activité portuaire liée au commerce des ressources naturelles n'est pas la seule coupable de la dégradation du récif de corail. L'agriculture locale a aussi une grande part de responsabilité. L'Etat du Queensland possède des hectares de culture dédiés à la production de banane, de canne à sucre, de papaye ou encore d'ananas. Conséquence : des concentrations importantes de pesticides sont détectées jusqu'à 60 kilomètres à l'intérieur de la barrière de corail, indique le WWF (lien en anglais).  

Une utilisation pointée du doigt par le dernier rapport du GBRMPA, l'institution australienne chargée de la protection du récif : "Le tiers nord de la Grande Barrière de corail n'a pas changé en trente ans. En revanche, sur les deux tiers sud, la déforestation côtière et l'usage intensif des pesticides par les agriculteurs ont considérablement dégradé la qualité de l'eau et endommagé les coraux." 

Signe encourageant : les rejets de pesticides dans l'océan Pacifique étaient en recul entre 2009 et juin 2013. Les autorités australiennes ont réalisé une étude qui signale que l'écoulement de pesticides a été réduit de 28% sur tout le récif. Les rejets de nitrates ont quant à eux diminué de 16%. 

Parce qu'une étoile de mer dévore le corail

Pour sauver la Grande Barrière de corail, l'Australie doit aussi se débarrasser d'une étoile de mer invasive. Aussi appelée acanthaster, cette espèce serait responsable à 42% de la destruction du récif corallien. 

 

L'étoile de mer invasive est aussi surnommée "couronne d'épines".  (NORBERT WU / MINDEN PICTURES)
En 2013, les autorités ont décidé de prendre une série de mesures pour limiter la propagation de l'étoile de mer surnommée "couronne d'épines". Celle-ci se nourrit des polypes du coreil. Une seule étoile de mer peut détruire jusquà 6 m2 de corail par an. Elle est considérée par les océanographes australiens de l'AIMS, un centre de recherche, comme l'ennemi numéro 1 de la Grande Barrière de corail.

La prolifération de cette étoile de mer redoutable est provoquée par des apports de nutriments venus du large au gré des courants ou bien de la pollution des eaux côtières, notamment par les engrais agricoles...

Parce que les phénomènes météorologiques menacent le récif

Le corail n'est pas seulement perturbé par les activités humaines. Les phénomènes climatiques extrêmes, caractéristiques de l'Australie, impactent aussi la Grande Barrière de corail. Les ouragans, les tempêtes et les vents violents sont responsables de 48% des dégâts qui touchent le site selon le centre de recherche de l'AIMS (lien en anglais) . 

L'océan Pacifique fait aussi face à un autre problème : l'augmentation de la température de l'eau liée au réchauffement climatique.  Comme l'explique le scientifique expert du corail Mark Eakindans un article de Mother Jones, l'eau chaude détruit l'algue symbiotique indispensable à la survie du corail. Privé des nutriments qu'il contient, celui-ci perd sa couleur vive et finit par devenir blanc, signe d'une fin de vie imminente.

Pour le gouvernement, c'est la nature qui est la principale fautive, et non l'activité économique en plein boom. "Les menaces les plus importantes qui pèsent sur la Grande Barrière (les événements climatiques extrêmes et les effets potentiels du changement climatique) ne peuvent pas être directement contrôlées mais des mesures importantes peuvent être prises pour maximiser la capacité de l’écosystème à résister à leurs effets", indique le gouvernement australien dans un rapport sorti en janvier 2014. Pourtant, l'activité humaine a un impact réel sur le réchauffement climatique et donc celui des océans.

Le gouvernement australien tranche pour le moment trop souvent en faveur de ses intérêts économiques plutôt que pour la protection de sa réputée Grande Barrière de corail. Mais le risque de sortir de la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco a commencé à faire bouger les lignes.

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