L'accident nucléaire survenu samedi dans une centrale japonaise relance le débat sur le nucléaire en Europe
En France, les organisations hostiles au nucléaire ont exprimé leur vive inquiétude, notamment sur la sécurité des centrales, rappelant comme "Sortir du Nucléaire" que les "tremblements de terre n'arrivent pas qu'en Asie du Sud-Est".
En Italie et en Allemagne, l'opposition et les écologistes ont réclamé avec force l'abandon du nucléaire.
En France, "le mythe de la sécurité nucléaire en question"
En France, l'accident au Japon a ravivé l'inquiétude des anti-nucléaires."Ce séisme dévastateur montre que le nucléaire est un colosse aux pieds d'argile", estime ainsi le Réseau "Sortir du nucléaire". "Continuer le nucléaire avec ce que l'on sait, ça relève clairement de l'inconscience!", s'énerve Jean-Marie Brom, ingénieur atomique, membre du Réseau Sortir du Nucléaire.
"Nous avions révélé en juillet 2007 que les centrales nucléaires françaises n'étaient pas aux normes sismiques et qu'EDF avait falsifié les données sismiques de ses centrales nucléaires pour ne pas supporter des travaux de mise aux normes trop onéreux", ajoute "Sortir du nucléaire" pour qui "cette situation perdure aujourd'hui".
Pour l'organisation, commentant avec la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, et le ministre de l'Industrie, Eric Besson, "la machine à étouffer l"information se met en marche".
De même "l'Observatoire" du nucléaire estime que cette réunion visait "avant tout à protéger les intérêts de l'industrie nucléaire française", ainsi qu'à "rassurer la population et à lui demander de faire confiance au nucléaire français".
Pour "Les amis de la Terre", qui parlent de "la malédiction de l'atome", "65 ans après Hiroshima et Nagasaki, un nouveau Tchernobyl menace aujourd'hui le Japon". "Combien de temps encore nos dirigeants resteront-ils sourds à toute raison, et prêts à sacrifier des populations entières au bénéfice de quelques lobbies industriels?", demande l'organisation.
Pour Greenpeace, qui estime que "le mythe de la sûreté nucléaire est en question", "vingt-cinq ans après la catastrophe de Tchernobyl, dont on nous a expliqué qu'elle était liée aux insuffisantes normes de sûreté des centrales soviétiques, on se rend compte que, dans un pays réputé très sûr comme le Japon, la catastrophe arrive quand même."
Selon Greenpeace, "cela devrait inciter tous les pays nucléarisés à revoir leur position, notamment le Japon, où plus de vingt projets de réacteurs sont envisagés".
De leur côté, les écologistes d'Alsace ont rappelé samedi que la centrale nucléaire de Fessenheim, dont l'autorisation de poursuivre ou non sa production est attendue en avril, est située dans une zone sismique. Fessenheim, entrée en service en 1977 et qui a produit 11,7 milliards de kWh l'an dernier, cristallise la colère des militants écologistes, qui dénoncent les risques sismiques et d'inondation ainsi que de multiples incidents.
Outre-Rhin, une chaîne humaine contre le nucléaire
En Allemagne, l'opposition et des associations écologistes allemandes ont réclamé samedi l'abandon de l'énergie nucléaire.
Des dizaines de milliers de personnes ont formé une chaîne humaine dans le sud-ouest du pays entre la centrale nucléaire de Neckarwestheim (l'une des plus vieilles du pays) et Stuttgart. Ils étaient 60.000 selon le collectif d'associations écologistes ayant appelé au rassemblement, qui demande la fermeture des centrales allemandes.
"Les risques de l'énergie nucléaire sont totalement indéfendables et nous devons abandonner (cette énergie) aussi vite que possible", a dit le chef du parti social-démocrate SPD, Sigmar Gabriel, au site internet Spiegel Online.
Le co-président des Verts, Cem Özdemir, a réclamé un "sommet de l'atome" à la chancellerie, en priorité pour discuter du sort des "sept plus vieilles centrales" d'Allemagne, dans le journal Welt am Sonntag à paraître dimanche.
Samedi soir, la chancelière Angela Merkel a tenté de rassurer ses concitoyens sur le nucléaire, affirmant que les 17 centrales allemandes "sont sûres". Elle a annoncé des discussions sur le thème de la sécurité du nucléaire avec les Etats régionaux (les Länder), disant comprendre "ceux qui chez nous s'inquiètent".
En Italie, opposition et écolos appellent à dire "non au nucléaire"
En Italie, plusieurs dirigeants de l'opposition de gauche et l'organisation écologiste Legambiente ont demandé au gouvernement de faire marche arrière sur le retour à l'énergie nucléaire décidé en 2008 par le gouvernement Berlusconi et censé se concrétiser en 2020.
Ils ont aussi appelé les Italiens à dire "non" au nucléaire lors d'un prochain référendum devant se tenir avant l'été.
L'accident nucléaire à Fukushima (nord-est du Japon) "a blessé à mort la légende de la sécurité" du nucléaire, a estimé Nichi Vendola, chef du parti Gauche, Ecologie et Liberté (SEL). M. Vendola, étoile montante de la gauche, a souligné que "le centre-droit et le riche lobby pro-nucléaire citent en permanence le Japon comme exemple de sécurité absolue des centrales nucléaires en cas de risque sismique".
En Grande-Bretagne, enquête sur la sécurité nucléaire demandée
Le ministre de l'Energie britannique Chris Huhne a demandé dimanche au "régulateur" britannique "d'examiner avec attention l'expérience japonaise, afin d'en tirer toutes les leçons nécessaires, à la fois pour nos réacteurs existants et pour tout nouveau programme nucléaire".
Le ministre, qui appartient à la composante libérale démocrate -opposée au nucléaire- de la coalition dirigée par les conservateurs, a assuré que "la sécurité est notre priorité numéro un".
Le gouvernement britannique a relancé son programme de construction de centrales nucléaires et a retenu en octobre dernier huit nouveaux sites, tous à proximité de centrales existantes.
L'Autriche veut éprouver la fiabilité des centrales européennes
Le ministre autrichien de l'Environnement veut proposer à ses homologues européens de tester la résistance des centrales nucléaires européennes aux risques sismiques à la suite des accidents au Japon.
Nikolaus Berlakovich veut connaître la capacité des centrales à "résister aux tremblements de terre" et déterminer "quelles sont leurs garanties en terme de confinement et de refroidissement", a-t-il dit à la radio autrichienne. Selon lui, les accidents survenus dans les centrale japonaises endommagées par le séisme de vendredi doivent conduire à un débat sur la viabilité de l'énergie nucléaire.
Ce pays, dont les écologistes réclament régulièrement la fermeture des centrales proches en Slovénie et Slovaquie, est fortement opposé à l'énergie nucléaire.
Lire aussi:
>>
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.