Greenwashing : "Il faut sonner la fin de la récréation", affirme l’association Wild Legal qui a porté plainte contre TotalEnergies
"Il faut sonner la fin de la récréation", a lancé vendredi 27 janvier sur franceinfo Marine Calmet, juriste, spécialiste des droits de l’environnement, présidente de Wild Legal, une des trois associations à l’origine de la plainte contre Total pour "pratiques commerciales trompeuses". Elle dénonce le "décalage complet" entre la communication du groupe pétrolier qui se fait passer "pour une filiale d'avenir en matière d'énergies renouvelables et la réalité".
Cette enquête a été ouverte par le pôle économique et financier du parquet de Nanterre après une plainte au pénal, en octobre 2020, de Wild Legal, Sea Sheperd France et Darwin Climax Coalitions. "On est là pour rappeler tout simplement aussi qu'il faut faire preuve d'honnêteté vis-à-vis des consommateurs et des citoyens", dit Marine Calmet car si "notre climat s'effondre, c'est notre société qui va en pâtir".
franceinfo : Que reprochez-vous à TotalEnergies ?
Marine Calmet : Nous lui reprochons tout simplement le décalage complet entre sa communication avec ses envies de passer pour une filiale d'avenir en matière d'énergies renouvelables et la réalité, une production toujours accélérée d'énergies fossiles, de gaz et d'autres agrocarburants.
TotalEnergies dit investir dans les énergies renouvelables. Elle annonce une baisse de 23 % de ses émissions de gaz à effet de serre sur les six dernières années. Vous contestez ces chiffres ?
Nous ne les contestons pas. Nous les mettons en perspective avec les investissements massifs prévus dans les énergies fossiles.
Total, c'est 0,9 % des émissions globales de gaz à effet de serre. Cela représente environ deux tiers des émissions de la France. Forcément, il y a une responsabilité.
Marine Calmetà franceinfo
Il y a aussi des projets qui sont particulièrement symptomatiques d'une entreprise qui ne veut pas quitter ce secteur ultra polluant et climaticide : le projet EACOP notamment en Ouganda, représente des centaines de millions de tonnes de CO2 émis. C'est aussi un problème humain dénoncé par de nombreuses associations de déplacements de populations.
Où est la tromperie exactement ?
Aujourd'hui, il y a une sensibilité chez les consommateurs qui veulent et qui choisissent des produits en fonction de critères écologiques. Total le sait parfaitement et du coup, sa stratégie est de mettre en avant une politique vertueuse pour continuer à vendre des produits alors même que la réalité est tout autre.
Qu'attendez-vous de la justice ?
D'enquêter et de faire son travail, de sonner la fin de la récréation parce que beaucoup d'entreprises pratiquent ce genre de greenwashing. Total fait partie des plus emblématiques. C'est aussi un moment où il faut dire stop. D'ailleurs, les choses sont en train de changer avec la loi climat notamment. L'usage du terme neutralité carbone a été interdite, sauf pour l'industriel de démontrer la réalité des faits et de suivre ces impacts climatiques de manière très précise. Du coup, il y a vraiment une volonté de changer les pratiques dans le domaine de la communication industrielle.
Le gouvernement demande dans le même temps à TotalEnergies de fournir du gaz liquéfié qui est du gaz de schiste, pour qu'on puisse se chauffer l'hiver en pleine guerre en Ukraine...
On ne peut pas aujourd'hui se passer de considération pour le climat parce que c'est ce qui tient la machine ensemble. Si notre climat s'effondre, c'est notre société qui va en pâtir également. On ne peut pas faire l'impasse sur ces questions-là. On est là pour rappeler tout simplement aussi qu'il faut faire preuve d'honnêteté vis-à-vis des consommateurs et des citoyens. C'est une action citoyenne avant tout. Il y a les marches, il y a les pétitions, mais il y a aussi des recours en justice qui fonctionnent. C'est un signal fort qui dit stop au greenwashing.
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