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Gazoducs Nord Stream 1 et 2 : quel est l'impact des fuites de méthane sur le climat ?

Hors service à cause de la guerre en Ukraine, les gazoducs Nord Stream reliant la Russie à l'Allemagne sous la mer Baltique ont été tous deux touchés par des fuites spectaculaires précédées d'explosions sous-marines. Un événement aux conséquences environnementales préoccupantes.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
La fuite de gaz constatée sur le gazoduc Nord Stream 2, le 27 septembre 2022 à Dueodde (Danemark). (DANISH DEFENCE / AFP)

Il y a du gaz dans l'eau de la mer Baltique. Des fuites spectaculaires, précédées d'explosions sous-marines, ont été signalées, lundi 26 et mardi 27 septembre, sur les gazoducs Nord Stream reliant la Russie à l'Allemagne. Les trois grandes fuites, au large de l'île danoise de Bornholm, entre le sud de la Suède et la Pologne, sont visibles à la surface avec des bouillonnements allant de 200 mètres à un kilomètre de diamètre.

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Les conséquences de cet évènement ne sont pas seulement géopolitiques, elles sont aussi environnementales. Le gaz qui s'échappe contient du méthane, un puissant gaz à effet de serre (GES), le deuxième émis par les activités humaines à l'origine du réchauffement climatique. Selon le dernier rapport du Giec*, un tiers du réchauffement déjà constaté est dû au méthane et les émissions continuent de grimper, avec des niveaux records enregistrés en 2021.

Un pouvoir réchauffant bien supérieur à celui du CO2

"Même s'il est émis en bien moindre quantité que le CO2, son pouvoir de réchauffement est bien plus fort. Sur 100 ans, un kilo de méthane a le même pouvoir réchauffant que 28 kilos de CO2", contextualise pour franceinfo Marielle Saunois, chercheuse au Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE). A court terme, sur une échelle de 20 ans, cet effet réchauffant est même 80 fois plus important que celui du CO2. Mais "il est plus raisonnable d'utiliser le facteur 28 quand on parle de l'impact sur le climat. C'est celui qu'on utilise en tant que scientifique", tempère Philippe Bousquet, chercheur au LSCE.

Hors situation accidentelle, le spécialiste explique que le méthane émis naturellement dans le fond des océans s'oxyde et se transforme en CO2 avant d'arriver à la surface. Dans ce cas précis, les bulles observées sur les photos de la marine danoise démontrent qu'une grande partie du gaz se retrouve dans l'atmosphère. Lorsqu'ils ont été percés, les gazoducs étaient à l'arrêt. Mais ils contenaient néanmoins du gaz à ce moment-là. Seule la société Gazprom, qui n'a pas donné de chiffres, connaît la quantité précise de gaz présent dans ces gazoducs. Sur la base de communiqués anciens du géant gazier russe, une ONG allemande estime cette quantité à 356 247 tonnes.

"D'un point de vue climatique, ce n'est pas nul, mais pas majeur"

Sur Twitter, le climatologue Zeke Hausfather, qui a participé aux travaux du Giec, évalue à 6,4 millions de tonnes équivalent CO2 les émissions potentielles des deux pipelines. Ce qui correspond, selon lui, "aux émissions annuelles de 1,4 million de voitures, bien qu'il ne s'agisse que d'environ 0,2% des émissions annuelles de méthane provenant des combustibles fossiles".

"D'un point de vue climatique, ce n'est pas nul, mais ce n'est pas majeur", poursuit Philippe Bousquet. Le scientifique rappelle que les émissions annuelles de méthane pèsent environ 600 millions de tonnes, soit bien plus que l'estimation à 0,36 million de tonnes de l'ONG allemande. Environ 60% de ces émissions sont d'origine humaine. Derrière ce chiffre, on trouve l'agriculture (élevage bovin, rizières), le secteur de l'énergie et les déchets. Le secteur de l'énergie (pétrole, charbon, gaz) émet notamment du méthane lors d'opérations de maintenance ou de… fuites accidentelles. "Des fuites de méthane importantes, il y en a tous les jours", rappelle Marielle Saunois.

* Ce lien renvoie vers un article en anglais.

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