: Vidéo Bilan carbone de TotalEnergies : "On demande à l'État de vérifier les annonces des grandes entreprises", déclare le directeur général de Greenpeace
"On demande à l'État de vérifier les annonces des grandes entreprises", déclare jeudi 3 novembre sur franceinfo Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France. L'ONG accuse TotalEnergies de "sous-estimer ses émissions de gaz à effet de serre" (GES). Dans un rapport que franceinfo a pu se procurer, Greenpeace dénonce des chiffres "fantaisistes" et explique avoir constaté un "écart abyssal" entre ses résultats et les déclarations officielles de la multinationale.
franceinfo : Greenpeace a refait les calculs à partir des données publiques de TotalÉnergies. Votre résultat est donc totalement différent de celui du groupe ?
Jean-François Julliard : Oui, il est totalement différent. C'est une estimation parce qu'on n'a pas tous les chiffres malheureusement et parce que Total manque de transparence. Mais on arrive à une estimation de 1 637 000 000 tonnes de CO2 émises par Total quand le groupe déclare effectivement autour de 455 millions de tonnes de CO2 par an. Pour donner un ordre de grandeur, Total déclare à peu près l'équivalent de l'ensemble des émissions d'un pays comme la France. Donc, c'est déjà très important. Mais on a reconstitué l'ensemble des chaînes de valeur de tous les produits exploités et commercialisés par Total : le pétrole principalement, mais aussi le gaz, la chimie, l'électricité. Et on arrive à un ordre de grandeur qui est presque quatre fois plus important que celui communiqué par Total.
Comment vous l’expliquez ? Est-ce que TotalEnergies utilise des failles dans la manière dont est calculé le bilan carbone aujourd'hui ?
C'est le sentiment qu'on a maintenant mais c’est à Total de répondre. L'hypothèse qu'on formule nous, c’est que Total ne déclare pas l'intégralité des volumes de pétrole et de gaz, produits et vendus par l'entreprise. Et ça permet à Total d'avoir des engagements plus faciles à tenir.
TotalEnergies conteste vos chiffres. La multinationale assure que vous comptez les mêmes choses deux fois. Vous rejetez ces accusations ?
Pour l’instant, ils n'ont pas apporté la moindre preuve de ça. On a été très scrupuleux. Encore une fois, c'est une estimation. On ne prétend pas donner la vérité exacte à la tonne de CO2 émise. Mais s'il y a eu un différentiel de 10 ou 15%, on n'en serait pas là. Le différentiel est presque quatre fois plus important dans les chiffres qu'on trouve. L’estimation à laquelle on aboutit est à peu près celle d'un groupe comme Shell. Mais Shell déclare de manière bien plus précise et détaillée l'ensemble de ses activités. Total agrège tout un tas de chiffres et c'est extrêmement compliqué de vérifier et personne ne fait ce travail de vérification. Total conteste la méthodologie qu’on a employé. Pourtant, on a utilisé la même méthode. On s'est basé sur un protocole qui n'est ni celui de Total, ni celui de Greenpeace.
Les entreprises font appel à des cabinets de conseil qui vérifient leur bilan carbone. I-Way pour TotalEnergies. Ce n'est pas suffisant ?
A partir du mandat que lui donne Total, il n'y a pas d'autorité indépendante pour vérifier les bilans carbone, pour Total ou d’autres groupes. On demande à l'État de vérifier les annonces des grandes entreprises sur leur bilan carbone et surtout la trajectoire. Aujourd'hui, ce qu'on demande, c'est que l'État contraigne les grandes entreprises à avoir une réduction claire et nette et rapide de leurs émissions de gaz à effet de serre. Sinon, l'accord de Paris, on peut en parler autant qu'on veut, on n'y arrivera pas.
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