Le vison d'Europe menacé de disparition : il ne reste que "deux foyers de population dynamiques" connus en France
En 50 ans, 68% des animaux sauvages dans le monde ont disparu, selon le rapport Planète Vivante du WWF. En France, trois espèces sont aujourd’hui menacées de disparition, dont le vison d’Europe.
Un nouveau signal d’alarme sur l’état de la biodiversité : entre 1970 et 2016, les populations de vertébrés, poissons, oiseaux, amphibiens et reptiles ont chuté de 68%, selon le dernier Rapport Planète Vivante du WWF. L’Amérique latine et les Caraïbes sont les secteurs les plus touchés, mais en France aussi, trois espèces sont aujourd’hui menacées de disparition : l’ours brun, une espèce de chauve-souris, et le vison d’Europe.
Cet animal ressemble à une belette au museau blanc et aux yeux ronds. L'air curieux, il vit exclusivement à proximité des marais, des rivières, des cours d’eaux. Espèce protégée depuis les années 1970, elle est aujourd'hui menacée de disparition en France. Il n'en reste qu'une poignée : moins de 250 d’après les chiffres de l’Office français de la biodiversité (OFB), et tous en Nouvelle-Aquitaine.
Pourquoi le vison d'Europe est-il menacé ?
Si ce petit animal est en cours d'extinction, c'est parce que son habitat disparaît, lui aussi. En Charente-Maritime, Ingrid Marchand nous montre un vaste champs de maïs planté sur une ancienne zone humide. Elle coordonne le programme européen, baptisé Life Vison, un programme de conservation pour la Ligue de Protection des Oiseaux. "Pour pouvoir mettre ces champs-là, on a dû drainer et assécher les milieux, explique-t-elle. Automatiquement, on a un impact sur les populations d'espèces qui vivent de ces zones humides qui est énorme." L’étalement des villes participe aussi à la disparition des zones humides. Autre danger : les voitures qui écrasent l'animal.
Depuis un siècle, on a eu une perte de 60% de nos zones humides.
Ingrid Marchandà franceinfo
Le vison est aussi la proie de son cousin, le vison d'Amérique. Ils sont importés, se retrouvent parfois dans la nature, et constituent une menace directe pour le vison d'Europe. "Il se fait manger par une compétition alimentaire, par le vison d'Amérique qui va utiliser la place, explique Pascal Fournier, directeur du Groupe de recherche et d’étude pour la gestion de l’environnement. Ces espèces, lorsqu'elles se croisent, vont se battre. Petit à petit, le vison d'Europe a une place un peu moins importante sur le territoire." En dix ans, le vison d’Europe a perdu la moitié de son territoire. Il est classé en danger critique en France depuis trois ans.
Un programme européen au secours de l'animal
Pour tenter de sauver l'espèce, le programme Life Vison est essentiellement financé par l’Europe, et coordonné par la Ligue de protection des oiseaux (LPO). "On est déjà sur les seuls secteurs où il reste du vison en France", raconte Romain Beaubert, chargé d’étude. "Il y a vraiment deux foyers de population dynamiques, avec de la reproduction, qui sont connus actuellement en France : l'un est en Charente, l'autre en Charente-Maritime. Forcément, on est obligé d'intervenir sur ces sites-là qui sont en plus relativement bien préservés au niveau de la qualité de l'habitat. Mais le démembrement de cette espèce est vraiment extrêmement compliqué".
Au final, la ligue a identifié 17 visons. Deux pouponnières ont été mises en place pour tenter une réintroduction, mais elle reste délicate : il n’y a eu que 18 naissances en deux ans.
Une inaction de la part des autorités
Pourquoi le déclin n’a-t-il pas été enrayé plus tôt ? L’État a lancé deux plans d’actions à partir des années 2000. Ils ont apporté des avancées, mais il y a eu un gros flottement il y a une dizaine d’années. "Je vais être malheureusement très clair : il y a un échec", déplore Christian Arthur, dirigeant de la Société française pour l'étude et la protection des mammifères (SFEPM). "Il y a d'autres espèces, je pense au gypaète barbu, je pense à l'ours, où à l'inverse, il y a eu une collusion de tout le monde pour faire quelque chose".
Selon lui, pour le vison d'Europe, il y a eu "une lacune de fonctionnement entre des experts scientifiques qui ont débattu sur l'origine du vison, des naturalistes qui pensaient que c'était un petit peu foutu, l'État qui pensait que l'on mettait trop d'argent pour sauver une espèce qui était peut-être condamnée. Si on avait eu la même vision aujourd'hui qu'en 1995, on aurait peut-être agi plus fort qu'on ne l'a fait."
L’an prochain, l’Office français de la biodiversité (OFB) doit lancer un nouveau plan sur un nouveau format, peut-être la dernière planche de salut pour le vison d’Europe.
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