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Contre choc pétrolier : l’Arabie saoudite engagée dans un bras de fer incertain

A 37 dollars le baril de Brent, le prix du pétrole à atteint fin 2015 son plus bas niveau depuis la crise financière de 2008. Malgré un déficit budgétaire de 92 milliards de dollars cette année, l’Arabie saoudite refuse de baisser sa production pour tenter de faire remonter les prix. Le royaume, premier exportateur mondial de brut, est il encore en mesure de déterminer le prix du pétrole.
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié
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Réunion de l'OPEP le 04 décembre 2015. les journalistes se pressent autour du ministre saoudien du pétrole  (AFP/ Joe klamar)

 
Du jamais vu dans le royaume des Saoud, le prix de l’essence a doublé. La population va devoir payer loyers et eau, jusqu’ici largement subventionnés par l’Etat. La chute des cours du brut de 65% depuis 2014 a entraîné un déficit budgétaire record cette année. Le royaume ayant en réserve près de 700 milliards de dollars, il peut encore tenir quelques années. Il pourrait faire faillite en 2020  affirme  une étude récente du Fonds monétaire international.

L'Opep ne réduit pas sa production  
Plus étonnant, l’Arabie saoudite ne fait rien pour faire remonter les cours. Le 4 décembre 2015, Ryad a bataillé au sein de l’Opep pour ne plus fixer de plafond à la production, au grand désarroi du Venezuela, de l’Algérie, et du Nigeria, confrontés à de graves difficultés économique. Depuis cette réunion, le prix du brut a encore perdu plus de 10 dollars.
 
L’une des hypothèses avancée par les spécialistes du Proche Orient voudrait que l’Arabie saoudite agisse ainsi pour faire pression sur la Russie, allié de Damas et de Téhéran. Le géant russe du pétrole Rosneft affirmait en octobre dernier, que Riyad voulait couler l’économie russe. Avec un certain succès d’ailleurs, mais si l’objectif était d’empêcher Vladimir Poutine de s’engager au Proche Orient derrière son protégé Bachar al Assad, c’est plutôt raté.

Reconquérir le marché américain 
Une autre thèse plus crédible veut que l’Arabie saoudite s’est engagée dans un bras de force contre le pétrole de schiste américain. Le premier producteur et exportateur de pétrole au monde refuse de réduire sa production dans l’espoir de couler la concurrence nouvelle du schiste américain, beaucoup plus cher à extraire. La stratégie de Ryad n’est pas encore payante mais commence à mettre à rude épreuve les entreprises américaines du secteur. Neuf sociétés engagées dans le pétrole de Schiste dans la région de Dallas se sont déclarées en faillite ces dernières semaines. Le spécialiste Andrew John Hall, prédit une fin rapide des hydrocarbures de schiste, non rentables en dessous de 50 dollars le baril.
 

Pétrole de schiste en Californie (AFP/ Paul Edmonson/ Mint images)

Le bras de fer avec les Etats unis aurait pu être gagné dans un an ou deux ans, mais c’est sans compter, avec le retour de l’Iran attendu dans les mois à venir sur le marché. Cette perspective entretient la baisse du prix du pétrole et du gaz, d’autant que la croissance économique mondiale reste hésitante.
 
Déséquilibre de l'offre et de la demande
La nouvelle donne c’est que l’Arabie saoudite ne maîtrise plus le prix du pétrole. L’offre de pétrole est excédentaire depuis l’arrivée du pétrole de schiste américain. La baisse de régime de l’économie chinoise n’a fait qu’accentuer sa chute. Les pays producteurs de pétrole, incapables de s’entendre sur une baisse de la production tentent au mieux de préserver leur part de marché.
 « Plus encore que d’autres pays, l’Arabie saoudite est prête à cette période de prix bas » a annoncé Khalid al Falih, président de la compagnie pétrolière Saudi Aramco.
 
Mais à en croire une étude de l’Agence internationale de l’Energie ? Le baril de pétrole ne ferait pas de franche remontée avant 2020. En dessous de 60 dollars les compagnies pétrolières n’investissent plus dans de nouveaux forages, donc l’offre finira par être moins abondante. Le secteur pétrolier a réduit ses effectifs de 250 000 personnes en 2015 et ce n’est pas fini…

 Cop 21 : un défi pour l'OPEP
 Le coup de grâce est venu de l’accord négocié lors de la Cop 21 à Paris. Si l’objectif de maintenir le réchauffement climatique sous le seuil de 2° est tenue, La moitié des réserves de pétrole mondiale devront rester sous terre. C’est bien ce qui inquiète les grandes compagnies  pétrolières et les pays exportateurs comme l’Arabie saoudite.
 
 

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