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Kirghizstan: l'indépendance énergétique passe désormais par la Chine

Les investissements chinois au Kirghizstan gagnent encore du terrain face à la Russie. La construction d’une ligne à haute tension, longue de 450 kilomètres, financée par Pékin, va permettre à cette ex-République soviétique d’Asie centrale de faire un pas de plus vers son indépendance énergétique.
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La Chine s'intéresse de plus en plus à l'Asie centrale et y a investi massivement ces dernières années. (GAVIN HELLIER / ROBERT HARDING PREMIUM / ROBERT HARDING)
«Nous assistons à un événement historique», s'est félicité le président kirghiz Almazbek Atambaïev en inaugurant, le 28 août 2015, une ligne à haute tension, financée par Pékin. «Aujourd'hui, nous pouvons dire que le Kirghizstan a gagné son indépendance énergétique», a-t-il déclaré.

En raison de ses riches ressources en énergie hydroélectriques, le pays livre de l'électricité au Kazakhstan et en Ouzbékistan en échange de combustible. La nouvelle ligne à haute tension, dont le coût s'élève à 345 millions d'euros, est construite à flancs de montagne et relie les villes provinciales de Datka et Kemin.

L’ex-République soviétique va ainsi pouvoir économiser plusieurs millions d'euros de redevances à ses deux pays voisins. Car pendant l’ère soviétique, la distribution électrique dépendait d'un réseau unifié qui reliait l’Asie centrale à la Russie. Jusqu'à un tiers de la production énergétique du Kirghizstan transitait alors par ses voisins avant de revenir dans le pays.

Ressources en énergie hydroélectriques 
L'accord pour construire cette ligne à haute tension avait été conclu en 2010 avec le chinois TBEA. On estime que 45% de l'électricité produite est détournée illégalement ou perdue, notamment en raison de fuites dans le système vetuste de distribution.

Dans le domaine pétrolier, la suprémattie russe s'est vue concurrencée par une compagnie à capitaux chinois, établie à Kara-Balta, au nord du Kirghizstan. Cette raffinerie est censée couvrir à elle seule 70% de la demande en produits pétroliers du pays.

Au Kirghizstan, la Chine est fidèle à ses stratégies habituelles, basées sur des prêts bancaires à des taux préférentiels et sur la construction d'infrastructures en échange des droits d'exploitation des resources minières et énergétiques. Pékin vient d'accorder au Kirghistan un prêt de 300 millions de dollars pour aider Bichkek à construire une route reliant le Nord et le Sud du pays à travers les montagnes.

300 kilomètres de voie ferrée
Les autorités chinoises promettent également depuis plus de dix ans de construire une voie ferrée de 300 kilomètres de long qui reliera sa province du Xinjiang à l'Ouzbékistan en passant par le Kirghizstan. Ce projet, dont le coût est évalué à plus de 2 milliards de dollars, se voit néanmoins contesté par de nombreux Kirghizes. Ces derniers redoutent, avec la présence économique grandissante de la Chine, une poussée migratoire chinoise et une dépendance accrue de leur pays envers Pékin.

Le Kirghizstan, petit pays limitrophe d'à peine plus de 5,5 millions d'habitants ayant une frontière commune de plus de 1000 km avec la Chine, a pris ses distances avec Washington qui a dû fermé sa base militaire de Manas ouverte après le 11-Septembre. En cause: l'attribution du prix Défenseur des droits de l'homme à Azimpjan Askarov, condamné par la justice de son pays pour crimes graves.

Le départ des Américains de Manas était souhaité par Moscou et Pékin qui voient disparaître un concurrent. Mais ces deux poids lourds de l'investissement au Kirghizstan restent néanmoins dans une compétition économique et politique. Sur ce dernier point, Pékin peine à faire jeu égal avec Moscou qui bénéficie d'une forte présence linguistique (nombre de Kirghizses parlent russe), culturelle et politique de l’ancienne URSS.

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