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Bangladesh : le chef du parti Jamaat-e-Islami pendu, les islamistes en colère
L’exécution de Motiur Rahman Nizami pour des crimes de guerre commis durant la guerre d'indépendance en 1971 fait resurgir le passé du Bangladesh et fragilise les islamistes de Jamaat-e-Islami. Au risque d’un embrasement.
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Le pays est divisé en deux : d'un côté les laïcs et nationalistes heureux de la pendaison du leader du parti Jamaat-e-Islami, Motiur Rahman Nizami, et de l'autre les islamistes qui promettent de mettre le régime à genoux. Traître pour les premiers, héros pour les seconds, l’ancien député et ministre âgé de 73 ans a été pendu à la prison centrale de Dacca, la capitale, dans la nuit du 11 mai 2016.
Chefs d’accusions : génocide, viols et organisation d'un massacre d'intellectuels au cours de la troisième guerre indo-pakistanaise, qui aboutit à l'indépendance du Pakistan oriental, aujourd'hui Bangladesh. Jamaat-e-Islami s'était opposé à la séparation d'avec l'actuel Pakistan. L'accusation estimait que le dirigeant avait joué un rôle de premier plan dans la création de la milice islamiste pro-pakistanaise Al-Badr qui a tué intellectuels, médecins et journalistes lors de la guerre d'indépendance.
#MotiurRahmanNizami 's crime chart. pic.twitter.com/RcQXuYKejv
— Bangladesh Today (@Bangladesh2day) May 11, 2016
Le présent rattrapé par le passé
Environ trois millions de personnes ont péri lors de la guerre de 1971 et des milliers de femmes ont été violées. La Première ministre Sheikh Hasina, arrivée au pouvoir en 2009, est la fille du père de l’indépendance Sheikh Mujibur Rahman, premier président de Bangladesh en 1971, renversé quatre ans plus tard.
En mettant sur pied le Tribunal des crimes de guerre, elle a suscité de vives critiques de l’opposition, notamment de Jamaat-e-Islami, qui y voyait une machine judiciaire d’épuration. Cinq hommes politiques de l'opposition, dont quatre dirigeants du Jamaat-e-Islami, ont été exécutés depuis la fin 2013, après avoir été reconnus coupables par le tribunal. Ce qui a entraîné de violents heurts entre sympathisants islamistes et les forces de l’ordre, dans lesquels près de 500 personnes ont trouvé la mort.
Bangladesh hangs Motiur Rahman Nizami for war crimes. https://t.co/9DxIgb0zzH pic.twitter.com/m5NdkYJL6c
— Al Jazeera News (@AJENews) May 11, 2016
Les partisans de Motiur Rahman Nizami menacent le gouvernement et entendent aller au clash. Ont-ils les moyens de faire tomber la Première ministre Sheikh Hasina ? «Avec l'exécution de Nizami, la direction du Jamaat qui avait relancé le parti depuis l'après-guerre de 1971 est maintenant complètement décimée. C'est un coup sévère contre le parti», analyse Mubashar Hasan, professeur à la University of Liberal Arts. Craignant les violences, les autorités avaient lancé une vague d’arrestations sans précédent dans les milieux islamistes avant l’exécution du leader du parti Jamaat-e-Islami.
Le Bangladesh traverse une période de tensions après la vague d'assassinats à coups de hache par des islamistes présumés de blogueurs laïcs, d'intellectuels et de membres de religions minoritaires. L'organisation Etat islamique (EI) et une branche d'al-Qaïda ont revendiqué ces meurtres mais le gouvernement nie leur présence au Bangladesh et impute ces crimes à des groupes islamistes locaux.
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