Émeutes au Chili : le pays "vit encore avec un legs de la dictature militaire et un sentiment d'inégalité"
Gaspard Estrada, directeur exécutif de l'Observatoire politique de l'Amérique latine et des Caraïbes de Sciences Po, réagit sur franceinfo lundi aux émeutes qui secouent le Chili depuis trois jours.
Sept personnes sont mortes dans les émeutes qui touchent le Chili depuis trois jours. Pour la deuxième nuit consécutive, le couvre-feu a été décrété à Santiago. Le Chili est "en guerre", a affirmé dimanche le président Sebastian Piñera. "Le Chili vit encore avec un legs de la dictature militaire et un sentiment d'inégalité", explique sur franceinfo lundi 21 octobre Gaspard Estrada, directeur exécutif de l'Observatoire politique de l'Amérique latine et des Caraïbes (Opalc) de Sciences Po.
franceinfo : Comment expliquez-vous que ce soit l'augmentation de quelques centimes du prix du ticket de métro qui ait déclenché de telles manifestations ?
Gaspard Estrada : Cela peut paraître peu, quelques centimes, mais pour les étudiants c'est beaucoup et cela illustre une certaine forme de malaise au Chili du fait des inégalités sociales qui sont très fortes. Cela contraste avec l'image que l'on peut avoir du Chili puisqu'il s'agit du pays qui dispose du plus fort taux de développement avec un indice du PIB le plus important par habitant, dans la région. Le Chili vit encore avec un legs de la dictature militaire et un sentiment d'inégalité. C'est tout cela qui a explosé il y a quelques jours.
Le Chili était jusqu'à maintenant le pays le plus stable d'Amérique latine. Il y a des fractures sociales très présentes ?
Le Chili reste un pays important, modèle, pour certains pays de la région, notamment l'Argentine. Pourtant, il a évacué les questions sociales, les fractures et tout cela rejaillit par le biais de cette mesure.
Le mouvement est-il structuré ? Sait-on qui en est à l'origine ?
Non, c'est d'ailleurs une des originalités de ce mouvement et qui complique la tâche de monsieur Piñera. Il s'agit de mouvements étudiants, mais il n'y pas véritablement de structure qui agit en tant que porte-parole de ces mouvements. C'est ce qui va aussi compliquer la tâche pour les forces de police. D'ailleurs, monsieur Piñera a fait usage de l'armée, ce qui ne s'était pas vu au Chili depuis la fin de la dictature fin des années 1980.
Que pensent les Chiliens de l'intervention de l'armée ?
Cela crée un très grand émoi, un grand impact sur l'opinion publique et provoque des réactions outrées. Certains disent qu'il s'agit d'un problème social, qu'il faut répondre aux inégalités économiques du Chili et non pas réprimer les jeunes chiliens.
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