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Zimbabwe : le gouvernement réagit violemment aux critiques de l'Eglise

Une lettre pastorale de la Conférence des évêques catholiques du Zimbabwe s'interroge sur la compétence du pouvoir. Ce dernier demande des explications au Saint-Siège. 

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Messe dans l'église du Sacré-Cœur de Harare, le 5 août 2018. Le Zimbabwe, pays majoritairement chrétien, ne compte qu'un million de catholiques. (MARCO LONGARI / AFP)

"Il n'est pas clair pour nous, que la direction nationale que nous avons possède les connaissances, les compétences sociales, la stabilité émotionnelle et l'orientation sociale pour gérer les problèmes auxquels nous sommes confrontés en tant que nation", écrivent les évêques dans leur lettre pastorale publiée le 14 août.
Ils y condamnent également l'interdiction de la manifestation du 31 juillet et l'arrestation d'opposants.

Une critique directe de la politique menée par le président Mnangagwa, qui n'a pas tardé à faire réagir le gouvernement zimbabwéen. Pour le ministre de la Justice, Ziyambi Ziyambi, cette lettre "constitue une insulte pure et simple à la personne du président Mnangagwa et de tout son gouvernement et est rédigée dans un langage décidément indigne d'une institution telle que l'Église catholique".

Dans la foulée, le ministre des Affaires étrangères Sibusiso Moyo a rencontré le nonce apostolique au Zimbabwe, monseigneur Marek Zalewski, afin de clarifier la situation. La question pour Harare est de savoir si cette lettre reflète l'opinion officielle du Saint- Siège envers le Zimbabwe.

Officiel ou pas ?

"Étant donné que les vénérables évêques représentent l'Église catholique, le gouvernement est obligé d'engager directement le Vatican pour vérifier si ces déclarations reflètent ou non l'attitude officielle du Saint-Siège envers les dirigeants du Zimbabwe ou si ce ne sont que les vues des différentes personnes concernées", a déclaré Ziyambi Ziyambi.

Le moment est grave pour le gouvernement du Zimbabwe. Car les évêques viennent ainsi ajouter leur contribution à une longue liste de critiques qui secoue le pouvoir en place. Corruption, répression politique et échec économique.

"Un esprit maléfique"

Dans ce contexte de crise, la réponse gouvernementale à la prise de position des évêques a sérieusement dérapé dès la publication de la lettre.

Monica Mutsvangwa, la ministre de l'Information s'en est prise à Robert Ndlovu, président de la Conférence des évêques, et donc chef de l'Eglise du Zimbabwe. "Un esprit maléfique" qui chercherait à monter les groupes ethniques les uns contre les autres accuse la ministre.

En clair les Ndebele, minorité ethnique du Zimbabwe à laquelle appartient l'archevêque Ndlovu, cherchent à rendre "coupables collectivement" de la crise, les membres la majorité Shona, à laquelle appartient  le président Mnangagwa."Ndlovu mène lentement la congrégation catholique du Zimbabwe vers un génocide du type de celui du Rwanda", concluait la ministre.
Des propos condamnés par l'opposition qui parle d'un "discours de haine incendiaire".

Le ton a depuis un peu changé, mais clairement l'heure est toujours au bras de fer entre le pouvoir et l'église. Et dans le contexte, il est peu probable que les évêques se taisent.

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