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Tunisie: le gouvernement impuissant face à l'invasion des sacs en plastique

Le spectacle désolant se répète à l'infini: sacs en plastique accrochés aux arbres ou éparpillés au sol, bouteilles vides obstruant les égouts, décharges saturées. Face à cette dégradation, les autorités tunisiennes affirment vouloir agir mais peinent à convaincre. Pour certains, le laisser-aller général est la conséquence de la révolution de 2011 qui a renversé le dictateur Ben Ali.
Article rédigé par Véronique le Jeune
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Tout le pays est constellé de sacs en plastique divers. (FETHI BELAID / AFP)

(Article publié une première fois le 18/04/2016)
Devant le Parlement, le Premier ministre Habib Essid a admis la détérioration de la situation au cours de ces dernières années, avec des «conséquences négatives sur la qualité de vie» des Tunisiens. Sans compter les conditions de séjour des touristes qui, depuis le soulèvement de 2011 et, il y a un an, les attentats de Tunis et de Sousse, se font désespérément attendre.

Chaque année, les 11 millions d'habitants produisent quelque 2,3 millions de tonnes de déchets ménagers et utilisent près d'un milliard de sacs en plastique non recyclables, selon des chiffres officiels. Les autorités, quant à elles, enfouissent 80% de ces déchets sur une quinzaine de sites répertoriés mais bientôt engorgés. Le reste finit dans des «décharges anarchiques», selon le ministère de l'Environnement.

Dans les municipalités, le ramassage des déchets ne se fait plus de façon systématique et organisée. De simples «délégations spéciales» ont été constituées après la révolution pour gérer les affaires courantes. En attendant la tenue d'élections locales, peut-être au printemps 2017.

Cette situation provisoire encourage un laisser-aller général. Le dépôt anarchique des détritus s'est répandu partout, même dans le centre de Tunis, où l'on zigzague entre les saletés.

Des peines durcies
En mars 2016, le Parlement a renforcé la loi en durcissant les sanctions contre le dépôt anarchique de déchets, désormais passible d'une peine de prison allant de 16 jours à trois mois et/ou d'une amende de 300 à 1.000 dinars (130 à 440 euros). Mais beaucoup, dont Abdelmajid Hamouda, directeur général de l'Agence nationale de gestion des déchets (Anged), jugent que ce texte aura peu d'effets sans une «grande opération de sensibilisation».

De son côté, le ministre de l'Environnement Néjib Derouiche a annoncé qu'un projet de loi interdisant la fabrication et la distribution des sacs en plastique non recyclables serait bientôt présenté aux députés, promettant «de lourdes amendes» aux contrevenants. Il est aujourd'hui établi que ces sacs menacent la vie de plusieurs espèces terrestres et marines, argue son ministère.

Mais les intéressés ne l'entendent pas de cette oreille et prévoient un sit-in le 28 avril prochain pour protester contre cette future mesure. Les industriels de la plasturgie annoncent que cette loi pourrait menacer jusqu'à 30.000 emplois directs et indirects. Autre argument avancé: que le gouvernement réforme le système de gestion des déchets au lieu d'interdire les sacs en plastique. La quadrature du cercle, en quelque sorte.

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