La descente aux enfers de la Libye : les voisins tentent d’arrêter les dégâts
Il y a six ans, le pays s'étaitt débarrassé de 42 ans de dictature brutale. Il vient de célébrer le sixième anniversaire de la révolte déclenchée le 17 février 2011 dans une Libye qui est aujourd'hui toujours en proie à l’anarchie. De nombreux habitants ont paradé dans les rues de Tripoli. Mais le cœur n’était pas vraiment à la fête.
«On s’est débarrassé d’un dictateur pour en voir apparaître 10.000 à la place», se plaint une habitante de Tripoli qui explique à l’AFP que les seigneurs de guerre et leurs milices font la loi dans le pays depuis 2011.
Des quartiers transformés en champs de bataille
La mort du colonel Kadhafi, le 20 octobre 2011, n’a rien réglé du tout. Bien au contraire, le pays est fracturé plus que jamais. Le quotidien des Libyens est devenu un vrai calvaire, témoigne l’envoyé spécial de l’AFP. Certains quartiers de Tripoli ont été transformés en champs de bataille entre groupes armés rivaux.
«Nous vivons à la merci d’hommes obsédés par les armes, la violence et le pouvoir au détriment des pauvres gens comme nous», se lamente un habitant. Il n’a aucune idée sur les raisons des combats ni sur l’identité des protagonistes qui s’affrontent sur une avenue commerçante.
Le gouvernement d’union nationale dirigé par Fayez al-Sarraj et appuyé par l’ONU est entré en fonction en mars 2016. Depuis, il s’est montré incapable d’assurer la sécurité. Son autorité n’est pas reconnue par le parlement libyen basé à Tobrouk. Celui-ci s’est allié avec le maréchal dissident Khalifa Haftar qui a installé son quartier général à Benghazi. Il contrôle une grande partie de l’Est libyen où se trouvent les principales installations pétrolières du pays.
Aucune force n’est assez puissante pour s’imposer
Profitant de l’absence d’une autorité centrale, les milices font régner l’anarchie dans la capitale. «Une ville éclatée où aucune force n’est assez puissante pour prendre le dessus», témoigne l’envoyé spécial de Libération. Tous les habitants qu’il a rencontrés vivent la peur au ventre.
«Plus personne n’ose sortir avec une voiture propre. On la volerait en pleine rue, en pleine journée. A Tripoli, la vie humaine ne vaut pas plus que le prix d’une balle», raconte un entrepreneur libyen qui a décidé de fuir cet enfer. Il a été terrorisé par l’enlèvement de son fils de 11 ans, kidnappé par des hommes armés à son école. Il a dû payer une rançon de 100.000 euros pour le retrouver.
«Dans ce pays, les kidnappings sont devenus une industrie spécialisée de haut niveau», raconte-il dans les colonnes de Libération.
Un journaliste libyen travaillant pour l’agence de presse chinoise Xinhua News est resté entre les mains de ses ravisseurs pendant trente et un jours. Sa famille a dû réunir une rançon de 67.000 euros pour obtenir sa libération. Une expérience qui l’a profondément traumatisée.
«J’évite les quartiers populaires et je ne fais plus de sujets qui pourraient déplaire aux milices», confie-t-il.
Les voisins nord-africains veulent arrêter les dégâts
Les Libyens assistent impuissants à la destruction systématique de leur propre pays.
«Les services s’effondrent et aucune entité politique ne semble capable de gouverner. Au contraire, elles sont préoccupées par un bras de fer pour obtenir le pouvoir absolu», explique un habitant de Tripoli..
Face à cette descente aux enfers, les voisins nord-africains se mobilisent pour tenter d’instaurer un dialogue entre les protagonistes libyens. Les ministres des Affaires étrangères algérien, tunisien et égyptien viennent de se réunir à Tunis. Des tractations sont en cours avec les différentes factions libyennes dans le but de rapprocher les positions des uns et des autres.
Les trois pays voisins sont préoccupés par l’insécurité qui règne à leurs frontières avec la Libye, devenu un pays de transit à la fois pour des groupes djihadistes, pour les trafiquants d’armes et pour de nombreux migrants souhaitant rejoindre l’Europe.
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