Maroc : un journaliste placé en détention pour agression sexuelle contre un jeune homosexuel
Soulaimane Raissouni, 48 ans, a été interpellé le 22 mai à la suite d'accusations publiées sur Facebook par un militant pour les droits des personnes LGBT. La défense dénonce un procès politique.
Le 25 mai, la justice marocaine a placé en détention préventive le rédacteur en chef du quotidien indépendant Akhbar el-Yaoum, Soulaimane Raissouni, soupçonné d'agression sexuelle. Ce journaliste de 48 ans avait été interpellé trois jours avant, à la suite d'accusations publiées sur Facebook par un militant pour les droits des personnes LGBT (lesbiennes, gays, bi, trans). Le jeune homme a ensuite été entendu par la police.
Le juge d'instruction près la cour d'appel de Casablanca a décidé "de placer Soulaimane Raissouni en détention préventive pour les besoins d'une enquête sur des faits présumés d'attentat à la pudeur avec violence et séquestration", au terme de sa garde à vue le 25 mai, a précisé à l'AFP son avocat Said Benhommani. Sa première audition est prévue le 11 juin. D'après son avocat, "il nie tous les faits qui lui sont reprochés". Le plaignant n'a pas souhaité faire de commentaire auprès de l'AFP.
"Solidarité"
Le directeur de Reporters sans frontières (RSF), Christophe Deloire, a exprimé sur Twitter son "entière solidarité" avec le rédacteur en chef, suscitant des réactions mitigées sur les réseaux sociaux marocains. Si certains font le lien entre son interpellation et ses éditoriaux au ton critique, d'autres appellent à être solidaire avec les personnes qui dénoncent des agressions sexuelles (lien en arabe).
THREAD #Maroc Nous exprimons notre entière solidarité avec le journaliste marocain Suleiman Raissouni, rédacteur en chef du journal arabophone Akhbar el Yaoum, victime d'une campagne de diffamation relayée par les médias en ligne proches des services de renseignement. pic.twitter.com/3YSocBURN8
— Christophe Deloire (@cdeloire) May 22, 2020
"La culture du viol a de beaux jours devant elle", a commenté Ibtissam Lachgar, une militante du collectif de défense des libertés individuelles Mali.
"Affaire politique"
Le syndicat national de la presse marocaine a pour sa part rappelé dans un communiqué "la présomption d'innocence", dénonçant "la diffamation dont sont victimes les protagonistes de cette affaire". Le directeur du journal Akhbar el-Yaoum, Taoufik Bouachrine, a été condamné l'an dernier à 15 ans de prison ferme pour "viol", "traite d'être humain" et "agressions sexuelles".
Taoufik Bouachrine a toujours nié ces accusations, parlant d'une "affaire politique" et de "preuves fabriquées", et affirmant avoir eu des relations consenties. En réponse à des critiques sur le traitement de son dossier, les autorités marocaines ont toujours affirmé que la procédure judiciaire était conforme aux normes internationales, mettant en avant "l'indépendance de la justice".
La nièce de Soulaimane Raissouni, Hajar Raissouni, une journaliste du quotidien, a également eu des démêlés avec la justice. Arrêtée en août 2019 et condamnée dans une affaire d'avortement illégal, elle a aussi dénoncé une "affaire politique". Elle avait finalement été graciée après sa condamnation.
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