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Les lois kényanes contre l’homosexualité impactent-elles le tourisme du pays ?

Alors que la Haute Cour du Kenya s'est prononcé le 24 mai 2019 contre la dépénalisation de l’homosexualité, la question paraît très surprenante: quel lien peut-il y avoir entre l'homosexualité et le PIB (produit intérieur brut) ?

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
L'hôtel Kilili Baharini à Malindi au Kenya. (CELLAI-ANA / ONLY WORLD)

La Haute Cour du Kenya a refusé, le 24 mai 2019, d'abroger des lois datant de l'époque coloniale qui criminalisent l'homosexualité. Elle a estimé qu'une telle décision ouvrirait la voie à des unions entre personnes du même sexe.

La question de savoir quel lien peut avoir l’homosexualité avec le PIB (produit intérieur brut) part du constat que sa légalisation serait un acte de modernité. Une société tolérante et inclusive générerait un environnement favorable à l’investissement. La sympathie qu’on peut avoir pour le pays fait qu’on va y séjourner plus volontiers en vacances, ou y investir pour des entreprises.

Or selon un rapport d’Amnesty International paru en juin 2013, l’homosexualité reste passible des tribunaux dans près des trois quarts des 54 pays africains. "Dans 36 pays africains, les lois prévoient des sanctions pénales pour les rapports consentis entre personnes de même sexe, parfois même la peine de mort comme en Mauritanie, en Somalie ou au Soudan" explique Dorothée Delaunay, d’Amnesty, au Figaro. Dans ce contexte, dépénaliser l’homosexualité devient alors un marqueur fort.

Une ONG qui milite pour les droits LGBT, Open for Business, a même quantifié ce que les lois anti-homosexuels font perdre à l’économie du Kenya. Le montant est estimé par l’ONG à 1,3 milliard de dollars (environ 1,2 milliard d’euros), soit 1,7% du PIB. On se situe bien évidemment dans le domaine de l’estimation.

Un plus pour le tourisme

Parmi les points faibles du Kenya, l’ONG pointe du doigt le très mauvais classement de la capitale Nairobi en termes d’attractivité, tout en bas de l’échelle. La ville n’est pas assez innovante, n’attire pas des travailleurs spécialisés dans leur domaine. Elle n’offre pas non plus une bonne qualité de vie. Selon l’enquête, les entreprises à haute valeur ajoutée se développeraient d’avantage dans les sociétés inclusives.

C’est dans le domaine du tourisme que les attentes sont les plus fortes. En 2013, la profession traversait une crise profonde, due aux avertissements lancés aux voyageurs quant aux menaces de kidnapping et de violence en tous genres. Selon Aljazeera, ces alertes venaient d’Europe et des Etats-Unis, à la fois contributeurs de touristes et très "gay friendly".

"Pour l’heure, ce segment LGBT n’est pas significatif dans nos hôtels", explique à Al Jazeera Hasnain Noorani, directeur de Pride Group. "Peut-être que si l’homosexualité était autorisée, cela augmenterait l’attractivité du Kenya auprès de la communauté LGBT dans le monde." Une homosexualité qui, aux yeux de Hasnain Noorani, ne doit pas s’afficher. "Nous ne voulons pas contrarier les clients qui ne partagent pas les mêmes choix."

Les discriminations à l’égard de la population LGBT se mesurent aussi dans le domaine de la santé. En particulier, la lutte contre le sida se révèle particulièrement compliquée dans un milieu qui se cache et où le dépistage est difficile. Le taux de prévalence du sida s’élève à 18,2% dans le milieu LGBT kényan, contre 5,6% pour le reste de la population. Le coût de la maladie est estimé à 1 milliard de dollars (900 millions d’euros).

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