"Un partenariat correct, qui doit être revisité" : à peine élu, Bassirou Diomaye Faye entend remettre à plat les relations entre le Sénégal et la France
Au Sénégal, le candidat battu, Amadou Ba, de la coalition au pouvoir a concédé, lundi 25 mars, sa défaite dès le premier tour de l'élection présidentielle de dimanche face au candidat antisystème Bassirou Diomaye Faye. Le président élu, second de l'opposant Ousmane Sonko qui n'a pas pu se présenter, va pouvoir appliquer son programme qui prévoit notamment la sortie du franc CFA. Franceinfo l'a rencontré dans son QG de campagne, à la veille du scrutin.
Lundi, Bassirou Diomaye Faye, le nouveau président sénégalais a déclaré que son pays resterait "l'allié sûr et fiable" de tous les partenaires étrangers "respectueux". "Respectueux", un mot très important car il signifie des relations d’égal à égal. La France, ancienne puissance coloniale du Sénégal est effectivement son premier partenaire commercial et économique, et Paris espère maintenir avec Dakar des relations solides.
Équilibrer la relation
À la veille de l'élection, quand nous l'avons rencontré, Bassirou Diomaye Faye a insisté pour dire qu’il n’est pas question de rompre avec la France mais de revisiter les relations entre les deux pays : "La rupture, c'est par rapport à nous-mêmes, à nos pratiques de gouvernance, à nos relations avec les partenaires, quels qu’ils soient. La France n'est pas sortie du Sénégal, elle est au Sénégal. Le partenariat entre la France et le Sénégal, jusqu'au moment où je vous parle, est un partenariat correct mais qui doit être revisité. Il doit être plus gagnant pour nous."
"Nous n'avons aucune focalisation sur la France. Nous l'avons déjà dit il y a des années, on ne nous a malheureusement pas écoutés."
Bassirou Diomaye Faye, président nouvellement élu du Sénégalà franceinfo
Pour Bassirou Diomaye Faye, le partenariat avec la France doit être le plus équitable possible, et il implique donc qu’il ne l’est pas à l’heure qu'il est. Ce qui veut dire que le Sénégal va vouloir revoir certains accords commerciaux, tout comme les accords de pêche avec le Sénégal ou les accords de défense, dans le but de protéger les intérêts des Sénégalais.
Le nouveau président veut instaurer un changement de paradigme. Et cela doit passer par la sortie du franc CFA, vestige de la colonisation, selon Bassirou Diomaye Faye : "L'Afrique, c'est 54 pays, il n'y a que 14 pays qui n'ont pas leur propre monnaie, les 40 autres ont leur monnaie. Pourquoi devons-nous renoncer à un levier de financement aussi important quand on aspire au développement ? Nous sommes très pauvres, très endettés, très en retard sur le monde. Voilà un levier que vous devez pouvoir activer pour aller plus vite vers le développement endogène. On vous dit : 'non, non, non, catastrophe, n'en parlez pas'. Cette souveraineté-là, comme les autres souverainetés, on ne peut pas y renoncer. Au contraire, on va davantage l'affirmer parce qu'un pays souverain doit être totalement souverain. Pas à moitié."
Le Sénégal est donc prêt à se doter de sa propre monnaie pour réduire l’emprise économique de la France. Il est également question de diversifier ses partenaires. Autant de propositions qui ne figuraient pas dans le programme du candidat du pouvoir, Amadou Ba, désigné par le président sortant Macky Sall qui entretenait, lui, d’excellentes relations avec Paris.
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