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Soudan : pourquoi la CPI veut juger Omar el-Béchir

L'ancien président est visé par deux mandats d'arrêt internationaux pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis au Darfour.

Article rédigé par franceinfo Afrique avec AFP
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Au centre, en blanc, l'ancien président soudanais Omar el-Béchir lors de son procès pour corruption à Khartoum, la capitale du Soudan, le 14 décembre 2019.  (MAHMOUD HAJAJ / ANADOLU AGENCY)

Le Soudan va remettre l'ex-président Omar el-Béchir à la Cour pénale internationale (CPI) a affirmé un haut responsable soudanais le 11 février 2020. Incarcéré à Khartoum depuis sa destitution en avril 2019, Omar el-Béchir, 76 ans, a jusque là échappé à la justice internationale. 

Pourquoi est-il recherché ?

Le Conseil de sécurité de l'ONU a mandaté le procureur de la CPI en mars 2005 pour enquêter sur le Darfour, province de l'ouest du Soudan. Vaste comme la France, cette région est secouée depuis 2003 par un conflit opposant les forces soudanaises à des rebelles de minorités ethniques, lesquelles s'estiment marginalisées. Les violences ont fait plus de 300 000 morts et 2,5 millions de déplacés, selon l'ONU.

Dans le cadre de son enquête, la Cour a estimé qu'Omar el-Béchir, ainsi que "d'autres dirigeants soudanais de haut rang", avaient "adopté un plan commun visant à mener une campagne anti-insurrectionnelle" contre plusieurs groupes armés s'opposant au gouvernement soudanais au Darfour.

Quelles charges sont retenues contre lui ?

Omar el-Béchir est visé par deux mandats d'arrêt internationaux émis par la CPI en 2009 et 2010 pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre qui auraient été commis au Darfour entre 2003 et 2008, au moins. Parmi les chefs d'accusation retenus contre lui figurent des crimes tels que meurtre, viol, torture, pillage et transfert forcé. La CPI a notamment conclu qu'il y a "des motifs raisonnables de croire qu'Omar el-Béchir a agi avec l'intention spécifique de détruire" différents groupes ethniques.

Il est le premier président en exercice à avoir fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la Cour et la première personne à avoir été accusée de génocide. L’ancien chef d’Etat a toujours fermement nié ces accusations.

Pourquoi a-t-il, jusque-là, échappé à la justice internationale ?

Créée en 2002 pour juger des pires atrocités commises dans le monde, la CPI ne dispose pas de sa propre force de police pour arrêter les suspects qu'elle recherche. Cet élément constitue un obstacle continuel pour la Cour. Laquelle dépend ainsi du bon vouloir des Etats concernant l'exécution des mandats d'arrêt qu'elle publie.

Plusieurs Etats membres ont d'ailleurs refusé d'arrêter Omar el-Béchir, qui a continué de voyager dans une dizaine de pays sans être inquiété, malgré les appels des défenseurs des droits de l'Homme à l'interpeller. Des voyages principalement effectués dans des pays de la région, notamment en Jordanie. En décembre 2017, il s’était aussi rendu à Damas en Syrie, où il était arrivé dans un Tupolev "aux couleurs de la Fédération de Russie", notait alors Le Monde. L’homme est ainsi "un pivot de l’influence russe en Afrique", analysait le quotidien. El-Béchir s’est aussi rendu en Afrique du Sud.

Dans deux procédures distinctes, la CPI a jugé en 2017 que Pretoria et Amman avaient manqué à leurs obligations en décidant de ne pas arrêter el-Béchir lorsqu'il se trouvait sur leur territoire. La Jordanie et l'Afrique du Sud avaient toutes deux avancé l'argument de l'immunité présidentielle afin de justifier leur décision de ne pas arrêter el-Béchir, alors chef d'Etat en exercice. La révolution et sa destitution ont changé la donne. 

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