Cet article date de plus de trois ans.

Mozambique : retour à la normale au Cabo Delgado, et le Rwanda y a largement contribué

Les rebelles qui ont attaqué la ville de Palma en mars 2021 sont désormais en fuite après l'offensive menée par les contingents du Rwanda et de la Communauté de développement de l'Afrique australe.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Une patrouille de soldats sud-africains près de Pemba, dans la région du Cabo Delgado au Mozambique, le 5 août 2021. (ALFREDO ZUNIGA / AFP)

Le calme et la stabilité sont revenus dans au moins trois zones du Cabo Delgado, indique la SAMIM, le contingent militaire de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) envoyé sur place. Dans les districts de Mueda, Macomia et Nangade, ces forces constatent une reprise de l’activité économique, conséquence directe selon la SAMIM de son action.

Les insurgés avaient notamment bloqué les routes pour isoler puis capturer les villes qui ne pouvaient plus obtenir d’aide extérieure. La population qui le pouvait avait fui et désormais elle revient chez elle. On constate également la réapparition de villageois qui rapportent avoir été détenus par les jihadistes. Ces derniers ayant quitté leur base face à l’avancée des forces gouvernementales ont relâché les civils détenus.

L'exploitation du gaz en objectif

"Les forces de la SAMIM ont ouvert des routes de Pemba à Macomia, Awasse, Mueda et Nangade, rétablissant la confiance du public que le risque d'attaque est faible en raison des patrouilles constantes des forces de la SAMIM et des Forcas Armadas de Defesa de Mocambique (FADM)", a déclaré Patrick Mfadali, porte-parole de la force conjointe. L’électricité a également été rétablie à Mueda, où elle avait été coupée il y a un an lors d’une attaque terroriste sur une sous-station. Cela a permis notamment de relancer les services bancaires.

Ce lent retour à la normale permet aux autorités d’envisager la reprise par Total du projet de gaz naturel liquéfié dans le district de Palma. La Banque africaine de développement avance un délai de 12 à 18 mois si la normalisation se poursuit. Le ministre de l'Energie du Mozambique, Max Tonela, n’a pourtant pas donné de calendrier et l’opérateur lui-même n'a rien laissé paraître de ses intentions.

Le Rwanda déterminant

"Ils sont impressionnants, les Prussiens de l'Afrique moderne", dit de l’armée rwandaise un analyste militaire sud-africain. A l’issue d’une opération éclair, le contingent rwandais d’un millier d’hommes, le premier venu aider l’armée du Mozambique, a repris début août le contrôle de la ville portuaire de Mocimboa da Praia. Cible de la première attaque des jihadistes en 2017, la cité était aux mains des insurgés depuis un an et était devenue, de fait, leur quartier général.

Le président rwandais Paul Kagame est récemment revenu sur l’engagement militaire de son pays dans la crise du Cabo Delgado. Il a notamment voulu couper court à la rumeur selon laquelle la France, voire même le groupe pétrolier Total, auraient financé l’intervention. "Personne ne sponsorise" le soutien militaire que le Rwanda fournit, a martelé le président Kagame.

Il a également rappelé que son armée est présente à la demande des Mozambicains et s’est étonné que certains critiquent l’arrivée des soldats rwandais avant ceux de la SADC. "Si quelqu’un a le feu à sa maison et demande de l’aide, je n’ai jamais entendu qu’on demande à celui qui est arrivé le premier pourquoi il a été si rapide à venir combattre le feu !"

Repli des jihadistes dans le Niassa ?

Mais pour Paul Kagame, le travail est loin d'être terminé. La province voisine de Niassa est selon le président rwandais la prochaine cible des rebelles al-Shabab après le Cabo Delgado. D'ailleurs, des soldats rwandais et de la SAMIM ont été vus dans la ville de Lichinga, capitale de la province, mais pour l’heure aucun combat n’a été signalé.

Ces forces anticipent un repli des rebelles al-Shabab du Cabo Delgado, à la recherche de lieux éloignés des troupes gouvernementales. Le Niassa est aussi potentiellement une zone fertile pour le recrutement des jihadistes. Surnommée "le bout du monde" par les Mozambicains, c’est la région la moins peuplée du pays. Il y existe la même pauvreté et une extrême inégalité dans la population, comme dans le Cabo Delgado.

Isolée, difficile d'accès, très pauvre, tous les ingrédients sont réunis pour faire de la province du Niassa le nouveau repère des terroristes.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.