Lazarus Chakwera, le très pieux nouveau président du Malawi
Il a battu, le 23 juin 2020, le chef de l'Etat sortant, Peter Mutharika. La réélection de ce dernier en 2019 avait été invalidée suite à une fraude massive.
Le nouveau président du Malawi, Lazarus Chakwera, qui a prêté serment le 27 juin 2020, avait été élu quatre jours plus tôt. Ce scrutin avait été organisé en raison de l'annulation de la réélection, en 2019, du chef de l'Etat sortant Peter Mutharika, 79 ans. Après le Kenya en 2017, le Malawi est le deuxième pays d'Afrique subsaharienne à avoir annulé une élection présidentielle, mais le premier où le nouveau scrutin voit la défaite du sortant. Le vainqueur de cette nouvelle élection est un ancien pasteur évangéliste qui affirme avoir répondu à l'appel de Dieu pour se lancer en politique.
Lazarus Chakwera dirige depuis 2013 le Parti du Congrès du Malawi (MCP). Un parti qui a gouverné ce pays d'Afrique australe de 1964 à 1994, pendant le règne du dictateur Hastings Banda.
Le nouveau président a tenté d'insuffler du sang neuf dans l'ancien parti unique en se démarquant de la poigne de fer de Hastings Banda. "Les dirigeants impliqués dans ces choses mauvaises ont quitté le MCP", a-t-il récemment assuré. Depuis l'avènement de la démocratie, son mouvement a systématiquement perdu tous les scrutins nationaux. Son succès vient mettre un terme à cette série, à la troisième tentative.
Après sa prestation de serment le 28 juin, jour de son 65e anniversaire, il a promis à ses concitoyens "un gouvernement qui écoute, pas un gouvernement qui crie, un gouvernement qui se bat pour vous, et non pas contre vous".
Une longue bataille judiciaire et politique
Candidat malheureux en 2014, puis en 2019, il prend ainsi sa revanche sur le président sortant Peter Mutharika, au pouvoir depuis 2014, au terme d'une longue bataille judiciaire et politique. En 2019, il avait rejeté les résultats officiels de la présidentielle qui donnaient Peter Mutharika vainqueur, par moins de 160 000 voix d'écart.
Le chef du MCP avait alors saisi la justice, qui lui a donné raison en annulant la présidentielle pour cause de fraudes massives. Une première dans l'histoire politique du pays, une rareté dans celle du continent. En Afrique subsaharienne, seul le Kenya a connu pareil scénario avant le Malawi, en 2017.
"Dieu m'a parlé"
Lazarus Chakwera a bâti son succès électoral en prônant la rupture avec le régime de son prédécesseur, à ses yeux corrompu et incapable de sortir de la pauvreté ce pays de 17 millions d'habitants. Pour faire mordre la poussière à Peter Mutharika, il a reçu le soutien du vice-président Saulos Chilima, qui a claqué la porte du camp présidentiel et réuni en 2019 autour de sa candidature 20,2% des suffrages. L'ancienne présidente Joyce Banda (2012-2014) s'était, elle aussi, associée à sa candidature.
Thank you, my Lord Jesus. pic.twitter.com/NZ3OUdphdX
— Dr. Lazarus Chakwera (@LAZARUSCHAKWERA) June 27, 2020
("Merci Seigneur Jésus", écrit le nouveau président du Malawi dans ce tweet)
Avant d'accéder à la tête du MCP en 2013, Lazarus Chakwera, père de quatre enfants, a dirigé pendant près d'un quart de siècle la congrégation des Assemblées de Dieu du Malawi. Laquelle compte plus de 222 000 membres et 1 696 églises. "Dieu m'a parlé. Dieu ne m'a pas dit : 'Je te retire de ton ministère'. Il m'a dit : 'Je prolonge ton ministère pour que tu puisses conduire une nation tout entière'", a-t-il expliqué dans une récente vidéo, où il pose devant des vitraux.
(Dans cet entretien en anglais, réalisée pour le compte de la Saint Andrew's Presbytarian Churb (Sapres), il explique pourquoi il a décidé de présenter sa candidature)
En campagne, cet homme charismatique a pris l'habitude de conclure ses meetings par une prière. Comme on peut le voir ci-dessous lors d'une réunion électorale à Lilongwe, capitale du pays, le 20 juin.
Le nouveau chef de l'Etat du Malawi est né dans une famille pauvre, après la mort de ses deux frères aînés. Ce qui lui a valu d'être baptisé Lazarus (Lazare), en référence au personnage ressuscité du Nouveau Testament. Chanteur émérite de gospels qu'il entonne volontiers avec un fort accent américain, il est diplômé de philosophie et de théologie. "J'adore chanter, même tout seul sous la douche", a-t-il confié à l'AFP.
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