La jeunesse du Burkina est très remontée contre Paris
Acte djihadiste ou nationaliste? On est en droit de se poser la question. Bien sûr, le Burkina n’est pas à l’abri d’une attaque terroriste. Le pays l’a encore vécu récemment. Le 13 août 2017, lorsqu’un commando tuait 18 personnes dans l’attaque d’un café à Ouagadougou.
Et il y a aussi un groupe terroriste, Ansarul Islam, qui opère dans le nord du pays. L’armée burkinabè aidée par la France ne parvient pas à l’éliminer. L’attaque à la grenade qui visait des soldats français et a blessé des civils fait peut-être partie de ce terrorisme.
Mais c’est peut-être aussi l’expression du rejet de la France par une partie de la population, notamment dans la jeunesse. D’ailleurs, l’armée française présente à Ouagadougou se fait particulièrement discrète. Il n’y a pas d’éléments de la force barkhane installés ici. Officiellement, il s’agit d’instructeurs auprès de l’armée burkinabè.
Toujours la FrançafriquePour la visite de Macron à Ouagadougou des étudiants débaptisent symboliquement l'avenue Charles De Gaulle en Thomas Sankara ✊ pic.twitter.com/ZJpN2cawdq
— Nsi Mababu (@NsiMababu) November 27, 2017
Défiance disions-nous. Ainsi, alors que le président Macron prononçait un discours à l’université, des heurts ont éclaté entre des manifestants anti-impérialistes et les forces de l’ordre. La jeunesse est très remontée contre la France. Symboliquement, elle a débaptisée l’avenue Charles de Gaulle en boulevard Thomas Sankara. Et pour cause. L’assassinat de l’ancien président Burkinabè, figure nationale, fait débat. Certains y voient la main de la France pour reprendre le contrôle du pays. La population attend la clarté dans ce dossier. En réponse, Emmanuel Macron a promis lors de sa visite de déclassifier les documents sur l’affaire.
«Des dirigeants français ont longtemps permis à des individus de s’éterniser au pouvoir, de faire de la prédation des ressources publiques et la patrimonialisation du pouvoir des modes de gestion de l’Etat. Tout cela, bien souvent avec la bénédiction des réseaux de la Françafrique», écrit le mouvement dans une lettre ouverte au président français.Ce n’est pas le seul grief adressé à la France. Depuis l’insurrection populaire de 2014 qui a abouti au départ de Blaise Compaoré, les élites burkinabè ont soif de reconnaissance. Car, pour elles, la Françafrique n’est pas morte. Le Balai citoyen, ce mouvement populaire qui a œuvré au départ de Compaoré, place cette relation compliquée entre les deux pays en tête des problèmes.
Même la politique monétaire est un argument de défiance. Certes, le pays n’est pas le seul à se plaindre de la contrainte que représente le franc CFA, désormais aligné sur une monnaie forte, l’euro. Le nationalisme se niche également dans la monnaie. Plusieurs pays africains rêvent de frapper leur propre devise. Outre le prestige, cette monnaie serait un atout contre la concurrence internationale, et une garantie d’autonomie quant à la politique économique à mener.
Autant de reproches qui peuvent servir de terreau à un djihadisme de plus en plus actif dans le pays.
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