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Egypte: un journaliste de télé en prison pour «fausse nouvelle»

Un présentateur de la télévision publique égyptienne a été arrêté brièvement et relâché sous caution, accusé d’avoir offensé la police. C’est le dernier exemple en date de la reprise en main des médias du pays à l’approche de l’élection présidentielle. Le journaliste se faisait écho de la difficulté des familles de policiers à vivre.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min

Khairy Ramadan est journaliste sur la première chaîne de la télévision publique. Le ministre de l’Intérieur l’a accusé de diffuser «des fausses nouvelles vis-à-vis des forces de police et de les diffamer», lors d’un numéro de son magazine dominical L’Egypte Aujourd’hui. En l’occurrence, Khairy Ramadan relayait les propos de la femme d’un colonel de la police. Elle se plaignait des bas salaires dans la police. 320 euros mensuel pour faire vivre la famille.

Le présentateur a passé quatre jours en prison avant d’être relâché sous caution. Une sanction qui frappe un journaliste pourtant soutien du pouvoir depuis un long moment. L’avertissement est d’autant plus clair. L’affaire Ramadan survient dans une ambiance de pression croissante sur les journalistes, accusés fréquemment par le pouvoir de colporter de «fausses nouvelles».

Pression
«Tout le ministère de l’Intérieur est en colère après ce qu’il s’est passé», prétend la présidente de l’association des femmes de policiers, Rasha Kamel. «Il a présenté les familles de policiers comme des mendiants manquant d’argent pour envoyer leurs enfants dans les bonnes écoles privées.» Voilà donc Khairy Ramadan lâché par ceux qu’il pensait défendre. Cette réaction d’une femme de policier apporterait donc du crédit à l’accusation du ministre de l’Intérieur qui parle de fausse nouvelle. A condition que la réaction de Rasha Kamel soit spontanée!

Surveillance
Les autorités ont prévenu qu’elles gardaient un œil sur les médias et poursuivraient quiconque propage de fausses nouvelles. A l’approche de l’élection présidentielle, les 26 et 28 mars 2018, le pouvoir accentue  la pression.

Le ministère de la Justice a annoncé qu’il utiliserait toute la loi pour poursuivre ceux qui usent de «fausses déclarations, infos ou rumeurs qui menacent la sécurité publique et apportent la terreur au cœur des individus». Bien évidemment, tout ce qui peut nuire au président candidat Al-Sissi est considéré comme une fausse nouvelle.

Il y a une semaine, deux journalistes, Mai El-Sabagh et Ahmad Mustafa, ont été détenus quinze jours pour diffusion de «fausses nouvelles qui menacent la sécurité publique». Leur seule faute: avoir réalisé un reportage sur l’histoire du tram à Alexandrie (lien en Anglais).

«Le climat ne peut pas être pire, c’est effrayant», a réagi un membre du bureau du syndicat des journalistes, Mahmoud Kamel. Déjà labellisée par Reporters sans Frontières «pire prison pour journalistes», l’Egypte n’arrange pas son cas.

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