Cet article date de plus de quatre ans.

Coup d'Etat militaire : la presse malienne entre soulagement et inquiétude

L'arrestation, puis la démission forcée, du président Ibrahim Boubacar Keïta sont diversement appréciées par les journaux maliens. 

Article rédigé par franceinfo Afrique
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des manifestants, partisans de l'imam Mahmoud Dicko,  sur la place de l’Indépendance à Bamako, le 18 août 2020. (STRINGER / AFP)

Dans un même journal, l'enthousiasme de la rue et le scepticisme d'un éditorialiste. D'abord la "joie" de la rue avec des témoignages recueillis par Le Pays, comme celui d'Alpha Boubacar Cissé :  "J’ai un sentiment de soulagement. Je suis très content et ému de voir le peuple manifester ainsi leur joie suite à cette victoire. Cela me rappelle les événements récents du pays. Les Maliens sont toujours comme ça. Nous avons toujours fait des luttes héroïques pour l’avènement de la démocratie au Mali. (...) Nous étions dans un système, celui d’[Ibrahim Boubacar Keïta] IBK qui avait atteint ses limites. Actuellement, l’Etat n’existe pas. Il y a l’injustice, la corruption, pas d’éducation, rien ne va plus dans ce pays. Par cette mutinerie, les militaires ont vraiment fait leur devoir". 

Amnésie 

A côté de l'enthousiasme, la prudence : "C’est tout de même un paradoxe de voir une grande partie de la population soutenir ou encore pousser les militaires à prendre le pouvoir, tandis que le Mali peine toujours à sortir du coup d’état de 2012. Il ne fait aucun doute que le peuple malien n’est pas prêt pour la démocratie. En 28 ans d’exercice démocratique, le Mali peine à prendre son destin à main. Aucune situation ne peut justifier un coup d’état. Ceux qui s’y sont hasardés l'ont pris à leur dépens", avertit Amadingué Sagara.

"Nouvel homme fort "

Malijet, lui, a tourné la page IBK et préfère se focaliser sur le "nouvel homme fort du Mali", le colonel Sadio Camara, sur lequel il ne tarit pas d'éloges. "Encadreur chevronné de la garde nationale, il est apprécié par tous ses frères d'armes pour sa rigueur et son sérieux. (...) Révolté avec ses collègues d'armes par la corruption qui gangrène le pays et le délitement de l'armée, le colonel Camara et ses hommes sont passé à l'offensive militaire ce matin et se sont emparés du pouvoir ce mardi 18 Août 2020. (...) Au Prytanée militaire où Sadio Camara était directeur, sa fille a fait deux fois le concours d'entrée sans succès. C'est dire à quel point son honnêteté et son sens de la responsabilité. Sérieux et déterminé, le colonel Sadio est apprécié par tous ses subalternes", s'enflamme Malijet.  

"Les militaires abrègent la lutte"

Pour L'informateur, la faute originelle revient à la "surdité" d'IBK. "Une liesse populaire a accueilli jusque tard dans la nuit la chute du locataire de Koulouba, Ibrahim Boubacar Keïta, placé sous bonne garde des militaires avec sa famille et plusieurs personnalités de son défunt régime, qui avait essuyé une vague de contestations menées par l’imam Mahmoud Dicko. IBK a semé le vent, il a récolté la tempête. Emmuré dans une tour d’ivoire, il a tenté de retrouver par le biais de la Communauté économique des Etats de l’Afrique (CEDEAO) toute la légitimité perdue au niveau national dans le naufrage de la mauvaise gouvernance", analyse L'Informateur. 

"Nous reviendrons si..."

Les putchistes ont-ils les faveurs de la population ? "Certes le régime d’IBK est parti, mais notre souhait est de voir un nouveau Mali. Nous souhaiterions avoir des autorités qui se soucient de ce pays. On a besoin des gens qui travaillent pour le peuple et non pour eux-mêmes. Au cas où ceux qui viennent au pouvoir agissent de la même manière qu’IBK, nous les ferons partir comme on a ainsi fait partir Ibrahim Boubacar Keita", avertit un manifestant.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.