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Burkina Faso : une manifestation contre un convoi de l’armée française montre le désarroi du pays face au terrorisme

Selon le gouvernement français, la Russie est à la manœuvre pour déstabiliser la France dans le Sahel et rendre ses troupes indésirables aux yeux des habitants.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Les soldats burkinabè tués à Inata ont été enterrés le 23 novembre 2021 dans la section militaire du cimetière Gounhin à Ouagadougou. (OLYMPIA DE MAISMONT / AFP)

Le 16 novembre dernier, à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, la population est descendue dans la rue pour réclamer la démission du président Roch Marc Christian Kaboré, face à la dégradation de la situation sécuritaire du Burkina Faso. L’attaque contre des gendarmes à Inata le 14 novembre, où 57 personnes dont 54 militaires, ont été tuées, a été vécue comme une humiliation dans le pays. Il s’agit de l’attaque la plus meurtrière contre les forces de défense depuis six ans, affirme l’AFP. Si l'action du président est de plus en plus décriée, le sentiment d’impuissance s’est reporté contre la présence de l’armée française jugée au minimum incapable, voire pire complice, des terroristes. Ainsi l’odyssée d'un convoi militaire français lors de la traversée du pays est révélatrice de l’état d’esprit d’une partie de la population.

Tirs de sommation

En transit entre Côte d’ivoire et Mali, le convoi d’une soixantaine de véhicules militaires a été bloqué une première fois à Bobo-Dioulassou par une manifestation, puis une nouvelle fois, le 20 novembre, dans la ville de Kaya, au nord-est de Ouagadougou, la capitale burkinabè. Le paroxysme a été atteint alors, obligeant le convoi à se regrouper sur un terrain vague. "Un groupe de manifestants a tenté de découper le grillage pour rentrer dans l’emprise et les gendarmes burkinabè ont tiré des grenades lacrymogènes pour disperser la foule. Les soldats français ont effectué quelques tirs de sommation au-dessus de la foule", expliqué l’état-major des armées à l’AFP.

Selon RFI, le convoi serait désormais stationné à Laongo, à une trentaine de kilomètres de la capitale. "L'objectif était d’éviter tout simplement une nouvelle journée de face à face avec la population afin de faire redescendre la tension", a expliqué le colonel Pascal Ianni, le porte-parole de l’Etat-Major

Pour l’heure, aucune date n’a été donnée pour un redémarrage du convoi. D’autant que les manifestants les plus virulents, comme ceux de la Coalition des patriotes africains, vont jusqu’à accuser la France d’armer les terroristes. 

Le gouvernement burkinabè a dans le même temps décidé de suspendre l’accès à l’internet mobile pour quatre jours. Une "mesure arbitraire, abusive et injuste", a dénoncé Eddie Komboïgo, le chef de file de l’opposition politique.

Les Russes à la manœuvre ?

Certains très jeunes manifestants ont même brandi le drapeau russe. Tout comme au Mali voisin, certains réclament la présence des Russes, présumés plus efficaces que les Français. Une attitude qui irrite profondément Jean-Yves le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, qui voit une manœuvre orchestrée par Moscou. "Il y a des manipulateurs, par les réseaux sociaux, les fausses nouvelles, l’instrumentalisation d’une partie de la presse, qui jouent contre la France. Certains, parfois même inspirés, par des réseaux européens. Je pense à la Russie."

L’hebdomadaire Le Point adhère également à cette thèse. Pour lui, RT, Spoutnik ou l’Internet Research Agency "inondent les réseaux sociaux de fake news et de vidéos fabriquées de toutes pièces tendant à démontrer aux Africains, avec une efficacité certaine, que la politique africaine de la France serait fondée sur l’exploitation et le pillage des ressources africaines". Selon le magazine, des vidéos russes seraient à l’origine de l’accusation de complicité entre les jihadistes et Barkhane.

Ainsi dans un article du site russe RT en date du 8 octobre 2021, le Premier ministre malien Choguel Kokalla Maïga affirme avoir des preuves que des groupes activistes sont entraînés sur son territoire. "Selon le responsable malien, la France contrôle désormais une enclave à Kidal, le Mali n'y ayant pas accès", écrit RT.

Mais si la rupture entre la junte militaire au pouvoir à Bamako et la France semble consommée, ce n'est pas encore le cas au Burkina Faso, tant que le président Roch Marc Christian Kaboré parvient à se maintenir au pouvoir.

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